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Estelle Sartini : "La France, une équipe solide et organisée"

Aujourd’hui débute à Marcoussis la septième édition de la Coupe du Monde de rugby féminin, l’occasion pour notre consultante, Estelle Sartini, de faire le point sur l’état de santé de la discipline dans l’hexagone et les chances françaises dans ce tournoi. « Les filles se sont donné les moyens d’obtenir des résultats et j’espère qu’elles vont concrétiser », a estimé à notre micro l’ancienne demi d’ouverture des Bleues (82 sélections).
Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
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Cette Coupe du Monde en France constitue une occasion unique de mettre en valeur le rugby féminin. Ne regrettez-vous pas le fait qu’elle se déroule en région parisienne début août, alors que bon nombre de franciliens sont actuellement en vacances ?

Estelle Sartini : « J’en ai discuté avec les organisateurs et je vous avoue que dans un premier temps, je trouvais que cela n’était pas une bonne idée. Quand on y réfléchit bien, sachant que beaucoup d’étrangers viennent voir leurs équipes, il est vrai que la capitale attire pas mal de monde. Beaucoup de choses ont été mises en place, notamment des navettes, pour faire venir les gens au stade. J’espère que ça va fonctionner. Le président de la FFR, Pierre Camou, me disait que c’était très compliqué de mettre en place le tournoi dans le Sud, par rapport aux terrains, aux locaux et aux disponibilités des clubs. Maintenant, c’est de l’histoire ancienne. Il faut désormais penser à faire en sorte que ce soit une belle réussite. Je sais que les places assises ont été prises d’assaut à Marcoussis, les joueuses vont jouer à guichets fermés, ce qui est une bonne chose. A nous de faire de la publicité pour que les gens viennent massivement au stade pour suivre l’équipe de France et voir de beaux matchs de rugby ».

Quelles sont selon vous les principales différences avec le rugby masculin, notamment dans la préparation physique et l’approche tactique des rencontres ?

E.S. : « Il n’y a pas de différences flagrantes. Un homme et une femme sont différents à la base. Forcément, une femme n’a pas la même puissance, ni la même force. Il y a des différences sur le plan physique, dans la rapidité, la gestuelle, ... Autrement, les règles et l’activité sont similaires, on va rechercher les mêmes qualités chez les filles : la force et la puissance devant, l’explosivité derrière. Mais aussi une vraie aisance technique, une bonne gestuelle, une grande capacité à lire le jeu, … Néanmoins, le rugby féminin est peut-être plus dans l’alternance entre combat et évitement. Le rapport physique est bien plus important chez les garçons. Le jeu chez les femmes ressemble davantage à celui des hommes il y a une dizaine d’années. Le jeu au pied a été moins travaillé ces derniers temps, mais c’est en train de changer. On se rend compte que c’est une qualité technique qu’il faut posséder au très haut niveau et l’équipe de France a la chance d’être bien pourvue dans ce secteur, en la personne de Christelle Leduff (Perpignan) et Sandrine Agricole (Rennes) ».

« Le rugby féminin est peut-être plus dans l’alternance entre combat et évitement. Le rapport physique est bien plus important chez les garçons. Le jeu chez les femmes ressemble davantage à celui des hommes il y a une dizaine d’années ».

On a pu lire un peu partout ces derniers temps que l’objectif du rugby féminin était de s’inspirer de ce qui avait pu être fait médiatiquement du côté du football, est-ce pour vous une comparaison valable ?

E.S. : « Tout était à faire au niveau du rugby féminin. Comme vous avez pu vous en apercevoir, il était très peu présent dans les médias. L’engouement suscité par cette Coupe du Monde est un vrai point positif. Les filles n’en reviennent pas. Je suis surprise d’entendre que les gens ne s’y intéressent pas, parce qu’on n’arrête pas d’avoir des appels, que ce soit nous les consultants ou les joueuses elles-mêmes. Ces dernières ont également l’appui de la fédération et de la ministre des Sports, ce qui est plutôt bien ».

Que pensez-vous des moyens mis en œuvre par la FFR pour promouvoir le développement et la pratique de ce sport ? Sont-ils suffisants à garantir l’essor de la discipline à moyen terme ?

E.S. : « Il y a eu des progrès mais on peut toujours mieux faire. Il y a encore beaucoup de travail à faire, notamment en amont, dans la formation, les liens entre les clubs et les écoles, … C’est un travail de longue haleine, dans lequel beaucoup d’éducateurs sportifs, d’enseignants d’EPS s’impliquent au quotidien. Les résultats de l’équipe de France donneront envie à des jeunes filles d’accéder à la discipline. J’espère que les répercussions de la Coupe du Monde seront bonnes et qu’on aura d’autant plus d’enthousiasme à donner des moyens pour développer le rugby féminin, à la fois dans les écoles de rugby et dans le système scolaire ».

« Il y a encore beaucoup de travail à faire, notamment en amont, dans la formation, les liens entre les clubs et les écoles, … C’est un travail de longue haleine, dans lequel beaucoup d’éducateurs sportifs, d’enseignants d’EPS s’impliquent au quotidien. »

Quelles sont les chances de l’équipe de France dans ce tournoi ?

E.S. : « Elles sont plutôt bonnes. J’ai vraiment hâte de les voir jouer. Au vu de leurs résultats sur le tournoi des Six Nations, qu’elles ont brillamment remporté (en réalisant le Grand Chelem), il y a vraiment une équipe solide. On a là affaire à un groupe très homogène, avec beaucoup de qualités, que ce soit devant ou derrière. Leurs conquêtes sont très intéressantes, bien posées, par des joueuses de très grande qualité. On observe une vraie organisation collective, avec de l’alternance dans le jeu. On peut aussi espérer que les plus jeunes emmagasinent de l’expérience et de la confiance pour briller au fil des matchs. Les filles se sont donné les moyens d’obtenir des résultats et j’espère qu’elles vont concrétiser lors de la Coupe du Monde ».

Le forfait de l’ancienne capitaine, Marie-Alice Yahé, obligée d’arrêter sa carrière en raison de commotions cérébrales répétées, peut-il perturber psychologiquement les joueuses dans le domaine du combat physique ?

E.S. : « Les filles sont professionnelles dans leurs attitudes et dans leur façon d’aborder leur activité, même si elles ne le sont pas sur le papier. On est tous désolés pour Marie-Alice (Yahé) mais ça fait partie des risques de ce sport. Après ce qu’elles ont vécu pendant le tournoi, les joueuses ont vraiment montré beaucoup de confiance, de sérénité par rapport au travail effectué. C’est un groupe très solidaire, qui vit bien ensemble, avec une bonne ambiance. Elles restent toutefois lucides, sachant très bien que la compétition va être longue ».

Pour finir, un petit pronostic ?

E.S. : « Mon cœur voudrait que l’équipe de France l’emporte mais ma tête ne peut faire abstraction de l’obstacle que représente la Nouvelle-Zélande (quadruple championne du Monde en titre). Attention aussi à l’Angleterre, qui demeure une équipe redoutable et que je vois bien accrocher le podium ».

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