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Congé paternité dans le rugby : "Je l'ai pris pour aider ma femme, mais chacun fait ce qu'il veut", répond l'ailier Timoci Nagusa à ses détracteurs

Depuis le 1er juillet, les pères bénéficient désormais de 28 jours de congé paternité, contre 14 auparavant, et l'ancien joueur de Montpellier a décidé d'en profiter.

Article rédigé par franceinfo: sport - Léo-Pol Platet
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
Le puissant ailier fidjien, Timoci Nagusa, a décidé de profiter de son congé paternité pour s'occuper de sa fille. Il l'a dévoilé sur Twitter, le lundi 11 octobre. (IROZ GAIZKA / AFP)

Son annonce en a surpris plus d'un, lundi 11 octobre. Alors que son club de Grenoble savoure encore sa victoire contre Rouen (21-16) en ProD2, Timoci Nagusa goûte à un autre plaisir. L'ailier fidjien de 34 ans vient d'accueillir son deuxième enfant. Et comme le prévoit désormais la loi, il bénéficie d'un congé paternité de 28 jours. Un choix mûrement réfléchi, qui ne manque pourtant pas de faire réagir dans le monde du rugby. Entre deux biberons, le principal intéressé a répondu aux questions de franceinfo: sport.

Pourquoi avez-vous choisi de prendre ce congé paternité ?

Timoci Nagusa : J'ai saisi cette opportunité pour aider ma femme et m’occuper du bébé. C’est mon devoir. Je n'ai fait que saisir l’opportunité offerte par le gouvernement français à tous les pères, et j'en suis très reconnaissant. Je me sens pleinement accepté et je profite de l’occasion d’être présent avec mon bébé pour ses tous premiers jours sur Terre.

Quel est votre quotidien depuis la naissance de votre deuxième enfant ?

Etre avec un bébé c’est du travail 24 heures sur 24. Je me réveille toutes les deux heures, je ne peux pas dormir, parce que mon bébé pleure pour avoir à manger. C’est beaucoup d’insomnies parce qu’on a aussi un enfant qui n’a que treize mois. Ma femme se repose, elle doit récupérer après l'accouchement. C’est compliqué, mais j’en profite tous les jours, je profite de chaque moment, de chaque seconde. C’est vraiment très important. Je suis plus qu’heureux, je ne peux pas le décrire en un seul mot.

Cela aurait été différent si vous aviez dû continuer à jouer ?

Je pense que ça aurait été un peu difficile. Comme je vous l’ai dit, j’ai pris ce congé pour pouvoir aider ma femme parce qu’elle doit récupérer après l’accouchement. Je voulais aussi apprendre, découvrir à quel moment ma fille allait se réveiller, dormir, manger. Je désirais connaître sa routine. Maintenant, je sais tout ça. Et si ma femme doit s’absenter, je saurai quoi faire.

Vous n’avez pas joué en ce début de saison à cause d’un protocole commotion. Comment soignez-vous cette blessure et comment vous préparez-vous à revenir ?

J’avais repris l’entraînement avec l’équipe deux semaines avant de prendre mon congé. En ce moment, je profite du fait que mes enfants dorment beaucoup pour réaliser mon entraînement physique. Je fais une heure de musculation chaque jour, à 1 ou 2 heure du matin parce que ma salle est ouverte 24 heures sur 24. Je fais aussi de la course à pied. En fait, je continue de me maintenir en forme physiquement. Quand mon congé sera terminé, je pourrai rejouer directement si l’équipe a besoin de moi.

Ce choix a surpris dans le monde du rugby [dans les colonnes de Midi Olympique, l'ex-sélectionneur du XV de France, Philippe Saint-André disait : "Il lui faudra pratiquement sept à huit semaines de plus pour se réathlétiser et revenir. Donc en gros, le joueur n’est pas absent qu’un mois mais trois mois."]

J'entends les commentaires des gens. Je comprends qu'ils pensent que si je ne m’entraîne pas je vais mettre du temps à revenir, à être prêt. Mais je n'expose pas ma vie privée. Je ne poste rien sur les réseaux sociaux quand je fais ma muscu ou ma course à pied. Les gens pensent ce qu’ils veulent, moi, je sais ce que je fais pour rester en forme malgré mon arrêt. Je suis rugbyman professionnel depuis quinze ans. Je fais mes affaires parce que je sais que quand je reviendrai, je serai prêt.

Philippe Saint-André, Patrick Arlettaz ou Jonathan Wisniewski ont dit ne pas comprendre votre décision. Qu’en pensez-vous ?

Je n’ai pas suivi ce qu’ils ont dit. Pour moi, c’est un choix personnel. Je ne sais pas comment cela se passe ailleurs. Je ne vais pas dire aux gens ce qu’ils doivent faire ou leur demander de faire comme moi. Chacun fait ce qu’il veut. La loi offre un congé paternité de 28 jours mais libre à chacun de le prendre ou non. Pour moi, la famille c’est plus important que tout dans la vie. Ma femme est très importante. Quand je partirai en déplacement avec l’équipe, quand je serai à l’entraînement, elle restera auprès de mes enfants. Prendre cette décision c’est aussi une manière de la protéger.

Au contraire, votre choix a été plutôt félicité et apprécié par le grand public. Pensez-vous que cela peut contribuer à changer les choses ?

Vous ne pouvez pas imaginer tout le travail que font les mamans. Je m'en rends très bien compte maintenant que je fais ce travail chaque jour. Je constate que c’est très difficile. C’est beaucoup plus dur d’être une maman qu’un joueur de rugby, parce qu’elles travaillent toute la journée, sans dormir (rires).

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