Rugby : face au peu de moyens investis dans leur équipe, les joueuses de l’AS Bayonnaise se mettent en grève
Les joueuses de Bayonne, qui évoluent en Élite 1, la première division nationale du rugby féminin, ont refusé de jouer leur match de Coupe de France face au Stade Toulousain dimanche.
Elles ont encaissé 118 points et n’en ont marqué que 16, dont un seul essai, en trois journées de championnat d’Elite 1… Les joueuses de l’Association Sportive Bayonnaise ont refusé, dimanche 7 octobre, de disputer leur rencontre de Coupe de France face au Stade Toulousain, pour protester contre le manque de moyens investis par leur club dans le rugby féminin. Dans une lettre ouverte, elles regrettent de ne pas disposer d’un effectif suffisamment large pour s’entraîner convenablement et de ne pas être écoutées par la direction.
Dernières de la poule B de la première division nationale de rugby féminin, les Bayonnaises voulaient taper du poing sur la table, dimanche, en refusant d’affronter le Stade Toulousain. Elles déplorent notamment un manque d’effectif en raison des départs, non remplacés, de plusieurs joueuses à l’intersaison : "L’an dernier, personne dans le club ne nous a demandé si on restait ou pas. Pour préparer la suite et la saison suivante, il faut normalement savoir sur qui on peut compter. On a perdu trois premières lignes et le travail de recrutement en amont n’a pas été fait. Résultat, aujourd’hui, on se retrouve avec trois premières lignes, dont une qui n’est pas formée à ce poste et une qui évolue au niveau fédéral. Jouer en Elite 1 peut mettre en danger leur intégrité physique", explique Brandy Cazorla, l’une des meneuses de la fronde.
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Le président du club, Gilles Peynoche, s’est défendu dans les colonnes du journal Sud Ouest [article payant] : "Tous les clubs sont en difficulté à ce niveau. On n’a pas de première ligne, on ne va pas en inventer". Quant aux départs, notamment ceux de Pauline Bourdon et de Lou Baguette à Toulouse : "On ne pouvait pas les retenir. Le Stade Toulousain, ça brille plus", explique-t-il.
Seulement 20 joueuses à l’entraînement
Pour combler ce manque de joueuses aux postes de première ligne, les Bayonnaises et leur staff élaborent des stratagèmes: "Face à Montpellier, on savait déjà que deux de nos premières lignes simuleraient des blessures pour sortir. On joue avec le règlement pour obtenir des mêlées simulées, sinon on est trop en difficulté", explique Brandy Cazorla.
Moralement ça devient aussi très compliqué, on ne se déplace plus dans l’esprit de gagner mais de limiter la casse.
Brandy Cazorlaà franceinfo:sport
Et au delà des matchs, ce manque d’effectif se fait aussi ressentir à l’entraînement, où seulement 20 joueuses sont présentes en moyenne, selon la lettre ouverte : "On ne peut même pas bosser en opposition à 15 contre 15 à l’entraînement, et c’est plus compliqué de performer sans avoir d’entraînement en conditions réelles", ajoute la troisième ligne aile.
Des "caprices de princesses"
Alors que les autres clubs de première division se développent, les « Neskak » ont l’impression que le leur fait du surplace : "On en arrive à un point où notre club est passé d’une demi-finale il y a quatre ans à jouer le maintien maintenant. C’est un petit club local, qui n’a pas réduit ses moyens, mais ses concurrents se sont structurés. Donc l’écart se creuse désormais", constate Brandy Cazorla.
Après de longues réclamations, elles ont obtenu, cette saison, un accès à une salle de musculation publique et un préparateur physique, financé par l’Aviron Bayonnais, le club masculin professionnel voisin. "C’est le minimum syndical pour rester au niveau élite et on nous répète sans cesse que ce sont des caprices de princesses, qu’on en demande toujours plus", complète la joueuse passée par le XV de France.
Un club qui stagne pendant que ses concurrents se structurent
Avec un tel constat, les frondeuses regrettent que leur club n’attire plus de nouvelles joueuses : "Maintenant, tous les clubs proposent de l’argent. Nous, on n’est pas venues à Bayonne pour ça, mais il y a deux ans, on a quand même demandé une prime de match de 20 euros, pour marquer le coup et pour montrer l’investissement dans le rugby féminin, mais on nous a ri au nez. On a expliqué à nos dirigeants qu’ils n’auraient pas d’autre choix que de mettre ça en place, sinon, personne ne viendra jouer chez nous". Dans le journal Sud Ouest, Gilles Peynoche se défend : "Avec la hausse des prix de l’essence, on a rallongé les indemnités kilométriques. On n'est pas resté inactifs".
Brandy Cazorla estime que l’ASB n’a plus les épaules pour se maintenir au plus haut niveau : "On pense aujourd’hui que pour l’avenir du rugby féminin, on n’aura pas d’autre choix que de se rapprocher des structures professionnelles garçons. Ça commence avec l’Aviron Bayonnais, mais pas assez rapidement". Alors que leur président a jugé dans la presse locale que l’action de ses joueuses n’était "pas respectueuse", elles espèrent de leur côté pouvoir faire bouger les choses et n’envisagent pas de reconduire leur grève pour ne pas mettre leur saison en péril.
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