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Rugby : le Top 14 est-il encore un eldorado ?

Le championnat de France, terre promise pour les étrangers en quête de gros salaires ? C'est désormais plus compliqué que ça.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La patrouille de France passe au-dessus du stade Marcel-Michelin, à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), le 9 octobre 2010.  (THIERRY ZOCCOLAN / AFP)

Le Top 14 est-il toujours la terre promise des rugbymen ? On pourrait le croire tant les joueurs étrangers se précipitent dans notre championnat, les exilés célèbres comme Frédéric Michalak reviennent au bercail et les clubs français vont loin en Coupe d'Europe. Erreur ! Les premiers signes d'une crise de croissance se font jour. Retour sur trois idées reçues encore vraies... mais pour combien de temps ?

• Les salaires sont plus élevés en France qu'ailleurs

C'est vrai, mais... ils sont en baisse. Si le salaire moyen d'un rugbyman de Top 14 tourne autour de 10 000 euros, il est en légère diminution cette année après avoir triplé en dix ans. A Clermont, club phare du Top 14, le président explique au site spécialisé Le Rugbynistère : "Le phénomène est général dans tous les clubs car on voit arriver dans le rugby un plafond économique qui nous oblige à anticiper et à revoir les salaires à la baisse." Le club auvergnat a décidé de passer de 38 à 34 joueurs, et privilégier son centre de formation.

La décision n'est pas uniquement due à la crise mais aussi au fait que la masse salariale des joueurs est encadrée depuis 2010 par ce qu'on appelle un salary cap, c'est-à-dire une enveloppe par club à ne pas dépasser. La mesure a été mise en place il y a quelques années en Angleterre et au Pays de Galles avec un succès très mitigé (en anglais), mais un plafond bien plus bas (5 millions d'euros contre presque 9 en Top 14). Jusqu'à présent, le salary cap français ne prenait pas en compte les divers avantages annexes offerts aux joueurs (droit à l'image, avantages en nature, cadeaux des partenaires du club), mais ça va changer... en 2013-2014. Pour laisser le temps aux clubs de préparer la transition.

• Les étrangers se battent pour jouer en Top 14

C'est vrai, mais... à partir de la saison prochaine, les clubs seront contraints d'avoir 50% des joueurs de leur effectif formés sur le territoire (c'était 40% en 2011-12, ça grimpera à 60% en 2013-14). Dans certaines équipes où l'on pratique la course aux armements en recrutant des stars étrangères, comme Toulon, ça risque de poser un problème. Le quotidien britannique The Telegraph (en anglais) note que "la fuite des cerveaux s'est ralentie" à cause de cette mesure, même si les clubs français sont plus compétitifs pour attirer les stars étrangères que leurs homologues anglais.

Conséquence inattendue : la hausse artificielle de la valeur des joueurs français. Le président du club de Toulouse explique dans L'Equipe qu'"il y a une augmentation des tarifs bien supérieure à 20% sur les deux dernières années, et qui est la conséquence de cette mesure, certes vertueuse à la base, mais terriblement inflationniste en terme de salaires."

En revanche, si vous êtes argentin, vous pouvez envoyer votre CV ailleurs. "Il y a une grosse dévaluation du joueur fidjien et je ne parle même pas de l’argentin, relève le président de Toulon, Mourad Boudjellal. A cause du Four Nations, il ne vaut plus rien." A partir de l'été 2012, l'Argentine va en effet participer à cet équivalent du Tournoi des six nations pour l'hémisphère sud. Il sera donc retenu en sélection de juillet à octobre.

• Les clubs français sont en meilleure santé financière qu'ailleurs en Europe

C'est vrai, mais... certains clubs de bas de tableau de Top 14 ou de Pro D2 sont sur le fil du rasoir : Brive a dû drastiquement couper dans sa masse salariale en 2010, Bourgoin a coulé à cause de difficultés économiques, Tarbes, Montauban, Albi ou le Stade Français ont subi des coups de bambou financiers. Bref,  les différences de moyens et la profondeur de l'effectif entre les 14 équipes conditionnent en grande partie le classement à la fin de la saison.

En tentant de réguler en amont, le rugby français s'épargne pour le moment les dérives de son homologue anglais où un monument comme les London Wasps est au bord de la faillite

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