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6 Nations - XV de France: la faillite à tous les étages

En encaissant une 10e défaite lors de ses 13 derniers matches depuis le début de l'année 2018, les rugbymens français ont sombré corps et âme à Twickenham contre l'Angleterre (44-8). Individuellement, collectivement, les Bleus n'ont pas existé. A 7 mois de retrouver les Anglais (et les Argentins notamment) dès les poules de la Coupe du monde, les Bleus sont plus que jamais dans le rouge.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 5min
  (ADRIAN DENNIS / AFP)

Une tactique qui ne paye pas

Au temps des statistiques à tout va, et de la gestion des joueurs via des GPS individuels, certains chiffres peuvent être trompeurs. Comme la semaine dernière contre le pays de Galles, l'équipe de France perd tout en ayant davantage le ballon que l'adversaire. C'est le paradoxe de cette formation, et peut-être aussi le signe d'une tactique qui ne paye pas.

A Twickenham, les joueurs français ont gagné 591m (contre 425m aux Anglais) et ont eu 53% de possession de balle. En revanche, l'Angleterre a passé 54% de son temps dans le camp tricolore. Et a inscrit 6 essais, contre 1 seul aux Bleus. La semaine dernière, face aux Gallois, la tendance était encore plus accentuée: 487m gagnés pour les Bleus (contre 384 aux adversaires), 57% de possession et 63% d'occupation territoriale. Tout ça pour une défaite (24-19) avec un essai de moins que le XV du Poireau.

Si la France garde plus le ballon, elle n'en fait pas grand-chose. En face, les équipes parviennent à faire des changements de rythme, et donc à créer des espaces dans la défense. Les Anglais se sont régalés avec des coups de pied dans l'espace libre qui ont mis à l'agonie le collectif tricolore. C'est toute la différence. "Globalement on le sait, on connaît nos manques en première période. Nous savions que ça allait se passer de cette façon, et on n'a pas su y répondre", constatait amèrement Jacques Brunel après le match. "Ils enchaînent trois coups de pied rasants et ils marquent, ils marquent, ils marquent", énumérait Gaël Fickou. "Ils avaient juste à nous mettre sous pression avec le jeu au pied. C'est bien vu. (...) L'Angleterre, c'est plus vite, plus fluide, c'est un cran au-dessus", reconnaissait Damian Penaud.

Des cadres pas assez performants

Au Stade de France contre le pays de Galles, les cadres (Guirado, Parra, Picamoles, Fofana) avaient été sortis autour de l'heure de jeu, ce qui avait pu expliquer certaines critiques sur une fin de match mal maîtrisée. A Twickenham, Guirado, Parra, Lopez, Picamoles n'ont pas pu éviter la marée blanche.Pire encore, ils ont parfois précipité l'avalanche, à l'image de l'en avant entre Lopez et Guirado amenant le premier essai anglais, et de cette grossière faute du capitaine Guirado provoquant la première pénalité de la Rose. En six minutes, l'Angleterre menait (8-0) sur un début de match coupable de ceux qui devaient au contraire mener les troupes à la victoire. A la 29e minute, c'est Morgan Parra qui commettait un en-avant sur un ballon aérien, et Jonny May en profitait pour inscrire son triplé. "C'est difficile, car on n'est pas invité", a constaté Guirado après le match. "On n'est pas invité sur le rythme, l'intensité."

D'habitude fer de lance et perce-muraille des Bleus, toujours parmi ceux qui avancent le plus, Louis Picamoles n'a pas eu son rendement habituel, avec seulement 59m gagnés en Angleterre après 48m face aux Gallois. Par comparaison, Antoine Dupont, qui a passé 23 minutes sur le terrain, a parcouru 87m, il est vrai dans une période où l'intensité du match avait clairement baissé. "On a un peu l'impression de ne pas avancer, c'est triste pour nous", regrettait Mathieu Bastareaud.

Dans un naufrage collectif, les individualités ont du mal à surnager. Certaines devraient néanmoins entrevoir un peu de lumière. 

La lente mais constante agonie

Depuis la place de finaliste à la Coupe du monde 2011, qui faisait suite à une 2e place dans le Tournoi des 6 Nations la même année et le dernier Grand Chelem en 2010, l'équipe de France s'enfonce. Depuis cette date, jamais les Bleus n'ont fait partie des deux meilleures équipes d'Europe. Son meilleur résultat dans le Tournoi: 3e en 2017. Lors de la deuxième saison de Guy Novès, limogé en décembre de la même année après n'avoir pas gagné un seul match entre la tournée de juin et celle de novembre. Ils ont gagné plus de matches qu'ils n'en ont perdus qu'à deux reprises dans cette compétition: en 2014 et 2017.

Avec Jacques Brunel, la tendance n'a pas changé: 3 défaites et 2 victoires dans le Tournoi 2018, 5 défaites et 1 victoire lors des deux tournées annuelles. "On a changé de sélectionneur il y a un peu plus d'un an parce qu'on sentait que ça ne se passait pas très bien", a déclaré Bernard Laporte sur Europe 1. "On ne peut pas dire que ça se passe mieux aujourd'hui. Mais ce serait difficile et certainement dangereux de changer à nouveau."

Dans 7 mois, la Coupe du monde sera un sacré défi, avec une poule où les Bleus affronteront Anglais et Argentins, pour seulement deux places qualificatives. De là à imaginer que pour la première fois de son histoire, le XV de France ne sorte pas de la phase de poules de la Coupe du monde, il n'y a qu'un pas. 10e nation mondiale, la France n'a jamais été aussi mal classée dans son histoire.

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