Six nations 2024 : à quoi servent les protège-dents connectés, désormais incontournables dans le Tournoi ?

Les joueurs et les joueuses du Tournoi des six nations doivent désormais porter un protège-dents connecté sur le terrain, pour recueillir des données sur les chocs et les impacts.
Article rédigé par Maÿlice Lavorel
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6min
Un protège-dents avec le logo de la fédération anglaise avant le match entre l'Angleterre et la Nouvelle-Zélande, le 31 octobre 2021 à Exeter (Royaume-Uni). (MAT MINGO / PPAUK / SHUTTERSTOCK / SIPA)

C'est un petit outil technologique qui accompagne désormais les joueurs et les joueuses sur le terrain. Depuis le début de l'année, World Rugby a rendu obligatoire le port des protège-dents connectés pendant les matchs. L'objet doit aider à mieux identifier et comprendre les chocs à la tête, et leurs conséquences sur les organismes, pour mieux protéger la santé des joueurs et des joueuses.

Le protège-dents connecté comporte un accéléromètre et un gyroscope pour enregistrer des données. "Ces protège-dents enregistrent deux choses sur les impacts : les accélérations linéaires, ainsi que les accélérations rotationnelles. Ce sont des accélérations de mouvements. Par exemple, quand la tête prend un coup, il y a aussi une force rotationnelle", décrypte Romain Loursac, ancien médecin du XV de France féminin, aujourd'hui à Lyon. Dans son club du LOU, chaque protège-dents vient avec une boîte connectée à une caisse pour télécharger les données, et un traitement à UV pour désinfecter. 

Identifier d'éventuelles commotions

"On a une tête modélisée, une flèche d'impact qui indique à quel niveau a eu lieu le choc, et les intensités", poursuit le médecin. La technologie fonctionne de pair avec l'analyse vidéo, pour retrouver les actions correspondant aux données récoltées. 

La technologie permet d'aider à identifier les chocs importants, et donc d'éventuelles commotions cérébrales. "Le protège-dents permettra pendant le match d'alerter l'équipe médicale indépendante. Si un joueur subit une accélération à la tête, elle recevra une alerte pour informer les staffs médicaux des équipes et les arbitres que le joueur doit quitter le terrain pour passer un examen HIA1", est-il écrit sur le site internet de la compétition.

Ce protocole d'évaluation des traumatismes crâniens, mis en place depuis plusieurs années, prévoit une évaluation en cours du match pour les joueurs et les joueuses ayant subi des chocs importants et suspectés de commotion cérébrale. Depuis le début de l'année, il prend en compte les alertes envoyées par le protège-dents connecté.

"Ce sont potentiellement des gros impacts qui seraient passés inaperçus. On peut dorénavant se questionner et aller regarder."

Romain Loursac, médecin du LOU

à franceinfo: sport

Les protège-dents doivent aussi servir à collecter des données pour le futur, notamment en étant utilisés au quotidien à l'entraînement. "Cela permet d'enregistrer le nombre et l'intensité des impacts sur l'ensemble d'une saison, à l'entraînement et en match", explique le médecin du LOU. Ces données doivent servir à mieux comprendre les chocs, les impacts et leurs effets sur les joueurs et les joueuses. "On est vraiment sur une phase de recueil. On mène une étude sur la technique de plaquage : si elle est bonne ou mauvaise, a-t-elle un impact sur l'intensité ressentie au niveau du cerveau ?", poursuit Romain Loursac.

C'est donc un outil de plus dans l'attention portée aux chocs à la tête et aux risques de commotion cérébrale. "On se rend compte que plus on avance, plus les chocs sont importants. On voit aussi qu'au niveau des cellules de g [unité de mesure de l'accélération de la pesanteur à la surface de la Terre], ça monte très haut. Sur la sécurité des joueurs, aujourd'hui, il n'y a plus de passe-droit", assure la troisième ligne française Emeline Gros. "Pour notre sécurité, c'est toujours mieux d'avoir ça parce que parfois, on n'arrive pas à identifier certains petits coups, ça peut nous aider", abonde la n°10 du XV de France, Lina Tuy. 

"On a un peu de mal à s'y habituer"

Mais l'objet n'en est encore qu'à ses débuts, notamment sur le plan du confort. Au début de leur Tournoi, en février, les joueurs du XV de France s'étaient ainsi plaints du ressenti du protège-dents obligatoire dans leur bouche. "C'est un peu compliqué. On a un peu de mal à s'y habituer. Ils sont un peu plus gros, il y a la puce qui est un peu grosse dans la bouche. Mais il faut s'y faire…", avait reconnu le deuxième ligne Romain Taofifenua.

Pour les joueuses tricolores, qui ont commencé à tester l'objet à la Coupe du monde 2022, l'inconfort est passé. "On a pu s'y habituer, on a pu les remouler. Il y a eu un petit temps d'adaptation quand même, parce qu'il y a un côté où c'est plus gros. Mais moi, ça ne me gêne pas plus que ça", assure la pilier Clara Joyeux.

Un protège-dents avant le match international entre l'Angleterre et la Nouvelle-Zélande, le 31 octobre 2021 à Exeter (Royaume-Uni). (MAT MINGO / PPAUK / SHUTTERSTOCK / SIPA)

"La qualité du protège-dents n'est pas encore optimale, par rapport à certains faits par des dentistes. Il y a le fait que plein de protège-dents ne chargent pas encore correctement. On est au début de la technologie, elle se met en place", résume Romain Loursac. Sortie sur protocole commotion lors du match en Ecosse le 30 mars, la centre française Gabrielle Vernier avait expliqué quelques jours plus tard que son protège-dents n'avait pas donné d'alerte.

Il va aussi falloir un peu de temps pour mettre en perspective les données récoltées, selon Romain Loursac : "On découvre, on n'est pas capable de savoir si 700, 800, 1000, 1500 impacts de plus de 5 g sur l'ensemble d'une saison, c'est beaucoup (...) C'est comme les GPS : la première fois qu'on les a mis aux joueurs, on ne savait pas si courir 15 kilomètres à telle allure, c'était bien ou pas."

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