Du bord du gouffre au Bouclier de Brennus, la renaissance du Stade français
"C'est un rêve, j'ai du mal à parler, c'est juste incroyable. Ça n'a pas été une très belle finale à regarder, mais on s'en fout, on a mené, on n'a jamais lâché. Maintenant, on va savourer." Au bord des larmes, pris par une émotion incontrôlable, Sergio Parisse était submergé par les sentiments au coup de sifflet final, sur la pelouse du Stade de France. Il faut dire que le capitaine italien du Stade français y a absolument tout connu. Il est au club depuis 2005, époque où le club de la capitale cumulait les finales et les trophées. Il avait même soulevé le Bouclier de Brennus une première fois en 2007, déjà après une victoire face à Clermont. Mais lui et les autres ne savaient pas que ce serait le début des ennuis.
Ce titre avait marqué la fin d’un cycle pour un groupe qui s'était délesté au fil des années de nombreux cadres (Pieter de Villiers, Christophe Dominici, Fabien Galthié, Juan Martin Hernandez, Sylvain Marconnet, pour ne citer qu’eux). La dynamique était cassée, la magie n’opérait plus et les résultats ont décliné avec le temps. Le parcours du Stade français en championnat s'était arrêté au stade des demi-finales en 2008 et en 2009. Ils auront attendu six ans avant de revenir dans le dernier carré. La chute s'est faite par étapes. La destruction de Jean-Bouin d’abord, puisqu’à l’été 2010, le stade a été rasé pour y construire une enceinte flambant neuve de 20 000 places.
La saison dernière en rampe de lancement
Mais en attendant sa livraison, le Stade français a dû prendre ses cartons pour déménager à Charléty. Ce dernier sonnait désespérément creux les soirs de match et l’âme du club s’y mourait à petit feu. Tout ça n'était rien à côté du tourbillon vécu en 2011. Président historique du Stade français, lui ayant redonné ses lettres de noblesse avec un discours novateur et une volonté de moderniser le rugby, Max Guazzini voulait alors lâcher les rênes. Les finances étaient exsangues, le déficit atteignait les six millions d’euros et Bernard Laporte était venu ajouter à la cacophonie en jouant les sauveurs avec un mystérieux fonds de pension canadien. Peine perdue, l’ancien sélectionneur du XV de France fut victime d’une escroquerie et c’est finalement Thomas Savare qui est arrivé à la rescousse fin juin.
Il a remis le club sur les rails financièrement, en injectant onze millions d’euros, et lui a évité de repartir en Fédérale. Il a fallu repartir de zéro, reconstruire un projet à moyen terme. Savare s’y est attelé avec son équipe et l’installation dans le nouveau Jean-Bouin aura été l’élément déclencheur. La saison dernière déjà, le Stade français allait mieux et ss'est mêlé à la lutte pour une place en phases finales jusqu’au bout. Malgré la défaite en barrage d’accession en Champions Cup, les bases pour le titre acquis cette année étaient posées. Des fondations enfin solides, pour un club qui a pris le temps nécessaire pour panser ses plaies et renaitre de ses cendres.
Voilà pourquoi dans le dernier quart d’heure samedi, lorsqu’ils étaient acculés par des Clermontois revenus à trois petits points et prêts à porter l’estocade, les Parisiens n’ont pas craqué. "On savait qu'on prenait un petit risque en mettant l'équipe qui avait joué les deux derniers matches, expliquait Gonzalo Quesada. On était un peu usé. On savait qu'on allait avoir du mal à finir le match. On n'arrivait pas à tenir le ballon, on déjouait un peu, et l'écart était si petit que tout est tombé d'un coup. C'est énorme." Le Stade français a tenu bon, avec ce cœur et ces tripes qu’il fallait pour tenir le cap dans la tempête, sur le terrain comme en dehors. "Pour nous c'est énorme, on sort de six années compliquées, personne ne nous attendait", reconnaissait Julien Dupuy après le match. Et c’est pour ça que l’issue n’en est que plus belle pour ce groupe.
Voir sur Twitter
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.