Les obstacles à la fusion entre le Racing 92 et le Stade Français
Les présidents Savare et Lorenzetti ont donc lancé un pavé dans la mare en évoquant ce projet très avancé. Néannmoins, ils n'ignorent pas que, pour cette fusion soit validée, il leur faudra l'aval des deux assemblées générales des associations qui chapeautent les clubs professionnels. C'est le même cas de figure qui s'était présenté pour la fusion annoncé des deux clubs basques Biarritz et Bayonne, rejeté par les assemblées générales, ce qui avait fait capoté le projet.
La fronde des joueurs
Plus de 40 joueurs sous contrat au Racing 92, 37 du côté du Stade Français. Et dans quelques mois, de ces deux effectifs, il ne faudra faire qu'un. Et réduire le tout à une trentaine de contrats. Voilà un premier dilemme. Avec le départ de Gonzalo Quesada du Stade Français, annoncé depuis plusieurs semaines, c'est bien le duo du Racing 92 Travers-Labit qui prendra en mains les destinés sportives de la nouvelle équipe. Logiquement, les joueurs du Stade Français pourraient se sentir en danger face à cette fusion. Des rumeurs de grève les concernant pour le prochain match contre Castres, sont évoquées.
Formé au club, mais s'étant engagé avec le RCT pour la saison prochaine, Hugo Bonneval n'y est pas allé par quatre chemins pour donner son sentiment sur Twitter une fois cette annonce faite.
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Ce n'est pas le seul joueur emblématique à s'être exprimé, puisque Pascal Papé a préféré ne rien dire, tout en le disant... Sekou Macalou, autre joueur du Stade Français, a été plus lapidaire.
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"C'est pas une fusion, c'est le rachat du Stade Français par le Racing... donc la mort de notre club, le club de Paris", enrage sur Facebook l'avant de 23 ans Paul Gabrillagues, natif de la capitale et formé au Stade Français. "Je (ne) participerai pas à cette mascarade. Manifestez-vous et montrez qu'on est nombreux à l'aimer, ce club".
Au Racing, l'international Henry Chavancy, en ce moment à Marcoussis avec le XV de France, formé chez les Ciel et Blanc, fait également part de son désarroi.
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Pour tous, l'avenir s'écrit en pointillé. Car il va falloir "dégraisser" un énorme mammouth. Et si le contrat de travail n'est pas modifié, ce qui est souvent le cas lors d'une fusion, le refus de changer d'employeur est considéré comme une démission selon la loi.
Même hors des deux clubs, cette annonce a créé de l'émoi, comme chez Frédéric Michalak.
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Quels seront les réactions des supporters, des partenaires dont les contrats sont souvent pluriannuels, mais aussi des pouvoirs publics locaux, qui ont souvent leur mot à dire dans tout projet de ce genre. Et il ne faut pas oublier qu'au-delà des joueurs, au premier plan, il y a aussi les encadrements techniques, le corps médical, les administratifs et tous les salariés qui peuvent s'inquiéter de cette fusion.
A lire: Le Racing 92 et le Stade Français se lancent dans une fusion
Quels équilibres ?
Souvent, lors de fusions d'entreprises, il y a un gros qui mange le petit. Cela a été le cas dans l'histoire de ces deux entités, avec l'absorption du Club athlétique des sports généraux (CASG) par le Stade Français en 1995, ou celle de l'US Métro par le Racing Club de France en 2001, à chaque fois pour sauver un monument historique en danger et lui redonner de l'allant. Là, avec les deux derniers clubs champions de France, dont l'ancienneté dans le rugby français est équivalente (création en 1883 pour le Stade Français, 1890 pour le Racing), la différence n'est pas très marquée.
Sauf que l'argent est du côté du Racing 92, et de son président Jacky Lorenzetti, ancien patron de Foncia, dont l'engagement dans ce projet ne se dément pas. De l'autre côté, Thomas Savare a sauvé le Stade de la faillitte en 2011, mais depuis, il a perdu de l'argent et les résultats n'ont pas toujours été à la hauteur. Avec le départ de plusieurs joueurs (Lakafia, Bonneval, Slimani...) et de l'entraîneur qui l'avait mené au titre (Gonzalo Quesada), les gens du Stade Français sont clairement fragilisés.
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Quelle répercussion sur le Top 14 ?
Dans un peu plus d'un mois, le derby francilien pourrait avoir de sacrés détracteurs. Le 29 avril, à Jean-Bouin, le Stade Français reçoit le Racing 92. Une rencontre qui peut se révéler décisive pour l'hôte dans l'optique de son maintien, et pour la visiteur en vue d'une qualification pour les phases finales. Les autres équipes du championnat de France pourraient donc imaginer qu'une entente pourrait se faire, qui fausserait le final de ce Top 14. Et ensuite, la fusion des deux clubs devrait entraîner de facto la disparition d'une équipe du Top 14, et par ricochet le maintien du 13e (actuellement Grenoble) en fin de saison. La Ligue nationale de rugby (LNR) a indiqué à l'AFP qu'elle attendait la présentation du projet par les deux clubs dans l'après-midi pour s'exprimer. Son Comité directeur est prévu mardi et mercredi.
Quel stade ?
Depuis 2013, le Stade Français bénéficie du stade Jean-Bouin reconstruit. Propriété de la mairie de Paris, il peut accueillir jusqu'à 20000 spectateurs, et a été refait justement pour accueillir cette équipe. Mais depuis des mois, le Racing 92 attend la livraison de son nouveau stade, pour suppléer le stade Yves-du-Manoir de Colombes chargé d'histoire mais désuet. Cela devrait être effectif d'ici la fin de l'année 2017, avec une Arena flambant neuve, capable d'accueillir spectacles et matches, et surtout 32 000 personnes. Elle pourra alors devenir la plus grande salle de spectacle de France, devant l'AccorHotel Arena de Bercy. Et elle appartient en partie à une holding créée par Jacky Lorenzetti, le patron du Racing.
On voit donc mal la nouvelle équipe évoluer dans un stade appartenant à la mairie de Paris, et se passer des ressources financières importantes de sa propre enceinte. Mais une convention lie le Stade Français et la mairie parisienne. S'en soustraire est certainement possible. Mais les négociations seront rudes.
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