Scandale Fifa: les justices suisse et américaine vont s'exprimer
Depuis le 27 mai et l'interpellation à Zurich, à la demande de la justice américaine, de sept hauts responsables du football, deux jours avant la réélection de Sepp Blatter pour un 5e mandat à la tête de la Fédération internationale de football (Fifa), les révélations n'ont pas cessé. Au total, 14 personnes sont visées par la justice new-yorkaise: 9 membres de la Fifa, tous d'Amérique du Sud ou centrale, et 5 hommes d'affaires, dans le secteur du marketing sportif. D'après l'enquête américaine, lancée par Mme Lynch alors qu'elle était encore procureur à New York, ce sont 150 millions de dollars de pots-de-vin et de rétrocommissions qui auraient circulé dans les hautes sphères du football, depuis 25 ans. Accusation phare du FBI et de l'IRS, le fisc américain: ces 10 millions de dollars que l'Afrique du Sud aurait versé à la Concacaf, la confédération d'Amérique du Nord, d'Amérique centrale et des Caraïbes, en 2008, en contrepartie de trois voix pour obtenir le Mondial-2010. Une somme qui aurait en majeure partie profité à Jack Warner, alors président de la Concacaf et toujours patron de la Fédération des Caraïbes (CFU).
'Monsieur 10%' taupe du FBI
A la base des accusations de la justice américaine, il y a une "taupe", l'Américain Chuck Blazer. L'ex-secrétaire général de la Concacaf a reconnu avoir touché des pots-de-vin du Maroc et de l'Afrique du Sud dans le cadre de l'attribution des Mondiaux-1998 et 2010. Et il collabore avec les enquêteurs américains depuis 2011. Les révélations de Blazer, surnommé "Monsieur 10%", vont-elles permettre à Mme Lynch d'annoncer de nouvelles inculpations ? Ce n'est "que le début", avait affirmé le 27 mai Kelly Currie, procureur fédéral de Brooklyn. Joseph Blatter, président de la Fifa en sursis depuis sa démission surprise du 2 juin, quatre jours à peine après sa réélection, n'a en tous cas pas été auditionné, que ce soit par la justice suisse ou américaine. Et en attendant le congrès électif de la Fifa du 26 février 2016 qui désignera son successeur, il gère tranquillement, sans jamais quitter la Suisse, préférant éviter "les voyages à risques", pour reprendre ses propres termes du 5 juillet.
Du côté suisse, une enquête est pourtant en cours sur l'attribution des Mondiaux-2018 et 2022. Officiellement ouverte le 10 mars, elle découle d'une plainte de la Fifa elle même, en novembre 2014. Mais elle ne semble pas inquiéter outre mesure du côté de la Fifa.
81 cas suspects de blanchiment
"S'il existe des preuves que la Russie et le Qatar ont obtenu (la Coupe du monde) grâce seulement aux pot-de-vin, alors elle pourrait leur être retirée", avait expliqué Domenico Scala, président du Comité d'audit de la Fifa, le 7 juin: mais "ces preuves n'ont pas été fournies", avait-il ajouté. Durant l'été, l'enquête suisse a révélé 81 cas suspects de blanchiment d'argent signalés par les banques. Et M. Lauber pourrait dévoiler de nouveaux éléments lundi après-midi, après avoir fait le point sur les demandes d'extradition américaines visant les six dirigeants de la Fifa encore détenus dans des prisons du canton de Zurich. Paradoxalement, la Fifa en sait peut-être plus que les enquêteurs suisses sur la façon dont la Russie et le Qatar ont décroché leurs Mondiaux, grâce au rapport qu'elle avait commandé en août 2012 à l'ancien procureur américain Michael Garcia.
Le 13 novembre 2014, Hans-Joachim Eckert, président de la chambre de jugement du comité d'éthique de la Fifa, avait relevé dans ce rapport Garcia "des comportements douteux", mais aucune preuve de corruption. Furieux de cette présentation "erronée et incomplète", M. Garcia avait démissionné de son poste d'enquêteur de la Fifa le 17 décembre 2014. Depuis, ce rapport n'a toujours pas été publié in-extenso par la Fifa, malgré la demande en ce sens de Michael Garcia ou de Michel Platini, président de l'UEFA et candidat officiel à la succession de Blatter.
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