Victor Muffat-Jeandet : "Marcel Hirscher a énormément fait évoluer la discipline"
Victor, en quoi Marcel Hirscher a-t-il changé le ski alpin ?
Victor Muffat-Jeandet : "Cela fait très longtemps que je le côtoie que nous sommes de la même année, 1989. Depuis tout petit d'ailleurs avec la Topolino, l’équivalent des championnats du monde ski pour les 14/16 ans. Il était déjà présent. On peut dire sans hésiter que c’est le meilleur skieur de tous les temps. Il a énormément fait évoluer la discipline. Il l'a beaucoup professionnalisée, tant sur le développement du matériel, que sur la logistique, ou encore sur la façon de gérer sa fatigue et ses déplacements. Et puis aussi grâce à ses résultats qui sont indéniables, qui n’ont jamais été réalisés, et qui sont exceptionnels d’autant plus de l’évolution de notre sport, qui comme tous les autres, s’est densifié et s’est professionnalisé. Et puis réaliser ce qu’il ce qu'il a réalisé, c’est vraiment incroyable."
Sur le plan technique également, il a été décisif dans l'évolution de votre discipline...
V. M.-J. : "Technique et physique ! Il a amené énormément d’engagement et d’intensité. Et du coup ça a fait aussi beaucoup bouger les choses où il a toujours été capable de mettre énormément d’engagement dans ses manches, surtout en deuxième lorsqu’il partait dernier et qu’il devait tenir son rang. Ça aussi, ça a beaucoup contribué à sa légende."
Son équipe privée, avec son entourage auprès de lui, c'était aussi quelque chose de novateur ?
V. M.-J. : "Oui, c’est novateur. C’est quelque chose qui est aussi un petit peu particulier parce que je pense, enfin c’est même sûr, que ça a contribué justement à ses résultats et à la réalisation de ses performances. Maintenant, c’est quelque chose aussi qui est en dehors de la réalité, et du coup, c'est un peu utopique. Disons que ça se comprend qu’il ait mis ça en place pour être réalisé mais ça été fait avec des moyens qui sont démesurés. Ce n’est pas forcément quelque chose de réaliste on va dire."
En terme de préparation physique, il s'est également distingué... Pourquoi ?
V. M.-J. : "Il a toujours été très discret avec ce qu’il faisait. Il y a une année en particulier qui avait fait parler parce qu’il avait pris beaucoup de poids. C’est surtout qu’il a élevé le sport à un niveau d’intensité au-dessus. Et puis aussi, il a été intelligent pour s’adapter, des fois il a été en difficulté techniquement par rapport à d’autres skieurs comme Kristoffersen qui a amené des choses novatrices en slalom et qui était supérieur. Il a réussi justement à faire évoluer sa technique, et à s’adapter."
Sur le plan mental, a-t-il aussi changé les pratiques ?
V. M.-J. : "Malgré le fait qu’il soit très fair-play et correct, il a toujours essayé de gagner donc il nous a rien amené du tout. Après, on s’est beaucoup interrogé sur beaucoup de points. Effectivement, au niveau du mental, l’intensité qu’il arrivait à mettre sur ses secondes manches, malgré toute la pression. Il faut savoir qu’en Autriche, c’est le pays où le ski est le sport numéro un. Il faut que les gens s’imaginent que c’est complètement différent de ce qu’on peut vivre en France. Je pense que lui vit ce que Neymar vit actuellement en France. Donc c’est vrai, il a souvent été impressionnant d’un point de vue mental sur sa capacité à se détacher de ces pressions-là et à libérer complètement son ski."
Si on devait retenir qu'une seule chose de Marcel Hirscher, qu'est-ce que ce serait ?
V. M.-J. : "Ce sont vraiment ses deuxièmes manches où il su a mettre le curseur à plus de 100% et tenir jusqu’en bas. Il y en a tellement, mais c’est ça qui a été le plus marquant dans son personnage."
Enfin, avez-vous une anecdote avec lui à nous raconter ?
V. M.-J. : "Il a toujours été protégé par son staff très protecteur. Sur le circuit Coupe du monde, il a toujours été fair-play, respectueux. On n’a jamais vraiment partagé des choses ensembles. Sur mes premières Coupe d’Europe, je l’avais battu. Et puis après il a pris un ascendant un peu plus fort. Et je l’ai retrouvé sur mon premier podium en Coupe du monde en géant. Donc j’ai pu l’arrosé au champagne un jour ! Il y a beaucoup de monde qui ont partagé un podium avec lui, et moi j’ai le mien. La petite anecdote, que l'on partage avec Alexis (Pinturault), une fois il avait fait troisième. Il était vraiment déçu ce jour-là car il n’avait pas fait une bonne course, Alexis avait gagné, et moi j’avais fait 4e."
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