Streaming illégal : un avocat répond à quatre questions concernant l'évolution de la loi
La lutte contre le streaming illégal se poursuit avec la promulgation d'un nouvel article de loi.
C'est un nouveau pas de franchi dans la lutte contre le streaming illégal. Une nouvelle loi relative à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique a été promulguée lundi 25 octobre. Elle permettra notamment la constitution de listes permettant de répertorier les sites pirates. Pour Franceinfo:sport, un avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle et du droit du numérique répond à quatre questions.
Qui souhaitait l'élargissement de cette loi ?
Depuis l'avènement des chaînes de télévision privées et des droits TV, le streaming illégal ne s'est jamais aussi bien porté. Le problème, c'est que les médias diffuseurs paient très chers ces droits qui ruissellent ensuite vers les ligues et les clubs.
"Tous ces grands événements de sport diffusés illégalement en streaming mettent en péril le modèle économique, non seulement des médias, mais aussi des clubs de football, explique Etienne Bucher, avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle et du droit du numérique. Ces derniers vivent justement parce qu'il y a des redevances de droits de télévision. Donc c'est une loi qui était demandée au début par ces personnes-là et justement cette loi qui a été promulguée permettra à ces personnes-là, mais aussi aux autres de bénéficier des nouvelles dispositions qui ont été mises en place."
Comment va-t-elle être mise en application ?
Dans les faits, ce nouvel article paru au Journal officiel, doit permettre la constitution de listes publiques pour répertorier les sites pirates. Ces derniers, en plus d'un blocage définitif, s'exposent à des sanctions pénales. De plus, les sites dits "miroirs", ceux qui reprennent une majeure partie des contenus d'un site condamné seront également bloqués. "En fait, cela va fonctionner un petit peu comme des listes noires pour lister justement l'ensemble des entités qui se sont adonnés à un moment ou un autre à ces pratiques qui sont contrefaisantes. Ce n’est pas une révolution dans la loi, une simple évolution aux nouveaux usages contre lesquels il faut lutter."
Quelles en sont les limites ?
"Dans l'esprit de la loi, c'est une très bonne disposition et c’est quelque chose qui va dans le bon sens, débute l'avocat. Mais la difficulté c’est qu'il est extrêmement facile de créer de nouveaux sites qui ne seront pas dans la liste noire. Ils [les créateurs de ces sites] n'ont même pas besoin de créer de société. Alors c'est une bonne chose pour "arrêter un petit peu l'hémorragie” et éviter que ces sites qui ont pignon sur rue puissent continuer à faire des streaming illégaux."
Ainsi, si les sites les plus connus devraient rapidement être identifiés puis mis hors-ligne, de nouveaux sites pourront continuer à diffuser ces rencontres en streaming.
Que risquent vraiment les utilisateurs et les diffuseurs ?
Selon un baromètre effectué par l'HADOPI, près de douze millions d'internautes profitent de ces sites pirates illégaux. Dès lors, impossible d'imaginer des sanctions contre chacun de ces internautes. Si les spectateurs ne courent pas de grands risques, les administrateurs de sites, eux, s'exposent à de lourdes sanctions.
"TF1 ou beIN ne va pas porter plainte contre vous parce que vous avez regardé un match en streaming, estime Etienne Bucher. C'est techniquement possible mais complètement impensable d'un point de vue judiciaire. C'est pour ça que l'arsenal juridique et législatif mis en place va viser directement les entités qui mettent en place ces contenus sur internet et qui se rémunèrent grâce à la publicité. Eux sont dans la pure contrefaçon des droits d'auteur, des droits de production, des droits d'organisateur d'événements sportifs. Ils risquent des amendes extrêmement importantes et si ce sont des personnes physiques ils risquent de la prison car la contrefaçon est un délit."
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