Avec ses premières médailles mondiales depuis 27 ans, le tennis de table français s'offre "une bouffée d'oxygène" avant les Jeux olympiques
"Il était temps", sourit Jean-Philippe Gatien l’un des derniers médaillés mondiaux français en tennis de table. 27 ans après la dernière médaille française dans un championnat du monde, individuels ou par équipes, hommes et femmes confondues, l’équipe de France a ramené deux breloques des Mondiaux par équipes de Busan (Corée du Sud). Si les Bleues ont obtenu le bronze, les hommes, battus par la Chine en finale, sont devenus vice-champions du monde, dimanche 25 février. De bon augure à cinq mois des Jeux olympiques de Paris.
Avoir enfin des successeurs ? "On en est les premiers ravis", se réjouit Jean-Philippe Gatien, leader des "Mousquetaires" vice-champions du monde en 1997. La nouvelle génération, menée par les frères Félix et Alexis Lebrun, s’est certes inclinée en finale contre la Chine, décuple championne du monde en titre, "mais le 3-0 est un peu sévère, et l’équipe de France a au moins eu le mérite de vivre ce moment-là, duquel il va y avoir des enseignements à tirer", juge Gatien.
Les Bleus, passés près de la médaille en 2022 avec un échec en quart de finale, comptaient cette fois parmi les quatre têtes de série, "un statut qui permet d’éviter de jouer les autres têtes de série (la Chine, l’Allemagne et la Corée du Sud), avant les demi-finales", explique Patrick Chila, médaillé par équipes en 1997 et membre du staff de l’équipe de France. "Et comme il n’y a pas de match pour la troisième place (avec donc deux médailles de bronze distribuées), la médaille était envisageable. Ils étaient à leur place en demi-finales, et la place en finale, c’est magnifique", poursuit-il. Grâce à leur deuxième place obtenue à Busan, les Bleus sont quasiment assurés d’être de nouveau têtes de série aux Jeux olympiques.
Un leader de seulement 17 ans, déjà meilleur joueur européen
Ce changement de statut, l’équipe de France le doit en partie à l’ascension des frères Alexis et Félix Lebrun, 20 et 17 ans, qualifiée de "fulgurante" par Jean-Philippe Gatien. "J’étais à Tokyo pour les derniers JO avec l’équipe de France, et si on m’avait dit qu’une médaille serait possible trois ans plus tard, dans tous les tableaux, j’aurais signé tout de suite tellement ça nous paraissait impensable. Et même une médaille aux championnats du monde deux ans plus tard, je n’y aurais pas cru", confie Patrick Chila. Simon Gauzy était alors le numéro 1 incontesté des Bleus à Tokyo, il est désormais le numéro 3, avec une 30e place mondiale, alors qu'Alexis Lebrun est 21e, et Félix Lebrun, meilleur joueur européen, 6e.
"Avec Félix, ils ont un leader de 17 ans qui vient d’une autre planète, souligne Jean-Philippe Gatien. Au-delà du niveau de jeu, il est incroyable de maturité, d’intelligence de jeu et de créativité. On peut imaginer qu’il va continuer à progresser, donc ça donne de très belles perspectives". Pour lui permettre de progresser, rien n’est laissé au hasard. "L’équipe autour d’Alexis et Félix est très créative. En plein exercice de haute intensité, de fréquence de balles, ils font en même temps une partie d’échecs pour travailler à garder leur lucidité malgré un état de fatigue conséquent. Tous ces petits détails sont explorés à fond. Et il y a cette volonté affichée, malgré leur jeune âge, d’aller chercher les plus grands titres", raconte Jean-Philippe Gatien.
Les féminines pas en reste
Dans leur sillage, c’est toute l’équipe de France de tennis de table qui a été "bonifiée", selon Patrick Chila. La France a d’ailleurs été la seule nation européenne à placer ses équipes masculine et féminine sur le podium à Busan. "On sent avec eux que rien n’est impossible, et qu’on peut gagner à chaque match. Le fait de les voir battre les meilleurs mondiaux, leur joie de vivre… Ça se répercute sur tout le monde", assure l’entraîneur. Et selon lui, "autant la médaille des hommes était envisageable, autant celle des filles est une très grosse performance. Elles n'étaient pas têtes de série, et réussir une médaille quand on ne l’est pas, c’est très compliqué."
Malgré leur défaite en demi-finale, également contre la Chine (3-0), les Bleues ont obtenu une médaille de bronze. Contrairement aux Mondiaux, il y aura un match pour la troisième place lors des JO de Paris, mais l’émergence des jeunes Prithika Pavade (19 ans) et Charlotte Lutz (18 ans) laisse entrevoir de beaux jours. "Le tennis de table français refait surface et tout laisse à penser que c’est quelque chose qui devrait être régulier dans les années à venir. C’est une bouffée d’oxygène pour le ping français et on est clairement dans une période excitante", se réjouit Jean-Philippe Gatien.
Les Français pourraient même se mettre à rêver d’affrontements plus réguliers face aux indétrônables Chinois. Ces derniers, qui occupent les cinq premières places mondiales devant Félix Lebrun, ne pourront d’ailleurs compter que sur deux représentants en individuel à Paris cet été. Le jeune Français pourrait donc se présenter avec le statut de troisième tête de série en individuel, pour espérer ramener une première médaille olympique à la France en tennis de table, depuis celle en bronze de Jean-Philippe Gatien et Patrick Chila en 2000.
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