Tournoi de Paris-Bercy : cap mental, connexion avec son entraîneur... Comment Ugo Humbert a atteint sa première finale de Masters 1000
Un exploit majuscule. Dernier Français engagé au Rolex Paris Masters, Ugo Humbert s'est qualifié, samedi 2 novembre, pour sa première finale en Masters 1000, après avoir battu Karen Khachanov lors de sa première demi-finale dans la catégorie juste en dessous des Grands Chelems. Face à Alexander Zverev, dimanche 3 novembre, il tentera de devenir le quatrième Français à inscrire son nom au palmarès du tournoi de Bercy, après Guy Forget (1991), Sébastien Grosjean (2001) et Jo-Wilfried Tsonga (2008).
Conquérant dès son entrée en lice, le Messin, 18e mondial et numéro un français, a d'abord tenu son rang face aux Américains Brandon Nakashima (35e) et Marcos Giron (49e).
Puis, il n'a pas tremblé face au numéro 2 mondial, Carlos Alcaraz, qu'il a maîtrisé pour la première fois de sa carrière, lors de son huitième de finale (6-1, 3-6, 7-5), devenant le premier Français à remporter une victoire sur un Top 3 dans ce tournoi depuis 2010 (Gaël Monfils avait battu Roger Federer en demi-finales). "C'est la plus belle victoire de ma carrière et le meilleur moment que j'ai vécu sur un court de tennis", avait réagi le joueur après sa victoire face à l'Espagnol, jeudi 31 octobre.
"J'étais content parce que je voulais qu'il rentre sur le match, non pas en outsider, mais en étant prêt à aller au combat. Il a été tout de suite agressif. Il est allé chercher ce match. Ce sont des victoires qui peuvent faire passer un cap", s'est réjoui son entraîneur Jérémy Chardy, auprès de franceinfo: sport.
Le lendemain, il a remis ça avec l'Australien Jordan Thompson, qu'il a dompté en quarts de finale (6-2, 7-6) vendredi 1er novembre. Ce nouveau cap franchi lui a permis de devenir le premier Français à atteindre les demi-finales d'un Masters 1000 depuis Richard Gasquet à Cincinnati en 2019.
Un résultat qui ne surprend pas Arnaud Clément, ex-top 10 mondial, et consultant pour franceinfo: sport. "Il retrouve un niveau de jeu qu'il a déjà atteint dans la saison. En termes de niveau de jeu et sur des surfaces très rapides [comme celle du Rolex Paris Masters], ce résultat [face à Alcaraz] n'était pas quelque chose d'inimaginable", souligne-t-il.
"C'est la surface sur laquelle il est le plus performant. Son tennis est bien réglé, il n'a pas besoin de forcer. Il prend la balle tôt, ses balles vont rester assez basses. Il a réuni toutes les conditions pour s'imposer."
Arnaud Clément, ex-joueur du top 10à franceinfo: sport
De son côté, le principal intéressé estime qu'il a trouvé une certaine sérénité, qui lui permet de se détacher du score. Le résultat parle de lui-même : "La chose dont je suis le plus fier, c'est que dès que je suis sur le court, je suis prêt à tout. Je ne suis jamais trop inquiet. Et je joue en m'écoutant, avec un super feeling et c'est pour cela qu'à la fin, je suis capable de faire des coups incroyables pour remporter la victoire", s'est réjoui Ugo Humbert en conférence de presse après sa qualification en demi-finales.
2024, l'année de la sagesse
Cette qualification dans le dernier carré d'un Masters 1000 est le fruit d'un long travail, entrepris notamment avec Jérémy Chardy, son entraîneur depuis juillet 2022. C'est à ses côtés qu'il réalise sa meilleure saison en 2024, avec deux titres coup sur coup à Marseille et à Dubaï (ATP 500), un quart de finale à Monte-Carlo (Masters 1000), un huitième de finale à Wimbledon, une finale à Tokyo (ATP 500) et une demi-finale à Paris-Bercy. "L'année a été très positive, analyse Jérémy Chardy. Il s'agit de la saison où il aura eu le plus de victoires. C'est un signe qu'il a progressé dans tous les domaines du jeu que sont le physique, la technique et le mental."
Malgré une baisse de régime en milieu de saison, Ugo Humbert est toutefois parvenu à retrouver les ressources nécessaires pour finir l'année reboosté, et a appris de 2024 pour mieux gérer son calendrier 2025. "Quand il y a des semaines où j’ai bien joué, j’ai voulu tout de suite enchaîner. Tu te sens bien, à la limite, tu te sens invincible, mais […] au bout d’un moment tu te rends compte que tu es cramé parce que quand tu vas au bout des tournois, ça demande quand même beaucoup d’énergie mentale", confiait Ugo Humbert avant son entrée en lice à Paris. L'heure de la sagesse et de la maturité a donc sonné.
Une nouvelle confiance en soi
Mentalement, Ugo Humbert a aussi franchi un nouveau palier. Lors de son match contre Carlos Alcaraz, il s'est beaucoup exprimé à voix haute sur le court pour s'encourager. "Tu peux le faire, tu es grand, tu es fort, tu travailles dur tous les jours pour ces matchs-là", répétait-il sur le court. "Il est parfois un peu possédé, avant ou pendant les matchs, rit Jérémy Chardy. Il a vraiment passé un cap dans la tête. Il croit davantage en lui, ce qui n'était pas toujours le cas avant."
"Cette année, pour la première fois, il s'est rendu compte qu'il pouvait rentrer dans les 10. Ses objectifs ont changé. Ça lui a mis aussi plus de pression, mais c'est un passage obligé pour rentrer dans les 10."
Jérémy Chardy, entraîneur d'Ugo Humbertà franceinfo: sport
"On voit le travail accompli mois après mois, sur la construction de son jeu, son état d'esprit et de sa confiance en soi, qui est capitale. Il a un jeu tellement à risque, qu'il a besoin de cette confiance, confirme Arnaud Clément. Il a aussi besoin d'une totale confiance en son coach. On voit qu'il le cherche beaucoup du regard. On sent qu'il y a une vraie connexion entre eux et on a l'impression que tout part de là. Ils se sont bien trouvés", appuie-t-il.
Une émulation avec les joueurs tricolores
L'émulation au sein des joueurs français, avec notamment Arthur Fils (20e à l'ATP) et Giovanni Mpetshi Perricard (31e), contribue encore aux performances d'Ugo Humbert. "Quand tu vois les autres Français qui jouent bien et qui ont des résultats, tu as envie de bien jouer aussi. Ils se tirent vers le haut. En tant que numéro 1 français et joueur le plus âgé, Ugo a envie de conserver ce rang. C'est une compétition saine", confirme Jérémy Chardy.
Grâce à cette confiance, le Français a appris à puiser dans l'énergie du public pour en faire une force, plutôt que d'en ressentir une quelconque forme de pression. "Le fait qu'il maîtrise plus son jeu, cela lui permet de plus s'exprimer sur le court, d'y amener sa personnalité, et de partager avec le public, ce qu'il adore en plus", glisse son entraîneur.
Transcendé une nouvelle fois par l'ambiance électrique de l'Accor Arena, Ugo Humbert a parfaitement su gérer sa casquette de favori face à Jordan Thompson. "Il est en mission. Jeudi, après sa victoire, il n'était pas euphorique. Il s'est tout de suite concentré pour son prochain match", nous avait glissé son coach. La mission s'est poursuivie face au Russe Karen Khachanov, pour un succès en trois manches 6-7 (6/8), 6-4, 6-3, face à un adversaire victime de crampes. "Etre en finale, avoir l'opportunité de faire quelque chose de grand, c'est juste incroyable. Je me suis offert ça et je suis vraiment fier", disait-il après sa qualification. Reste une dernière marche à franchir.
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