Open d’Australie : Nick Kyrgios, le diamant d’une île
Si les Français attendent depuis 1983 un successeur à Yannick Noah, dernier lauréat national de Roland-Garros, les Australiens patientent eux depuis 1976 et le triomphe inattendu de Mark Edmondson sur le gazon de Kooyong.
Potentiel important
Depuis, chaque décennie a suscité son lot de déception pour le tennis australien à Melbourne : Pat Cash dans les années 80 (deux finales perdues en cinq manches contre Stefan Edberg et Mats Wilander respectivement en 1987 et en 1988), Pat Rafter (demi-finaliste contre Andre Agassi en 2001) ensuite, Lleyton Hewitt enfin (finaliste face à Marat Safin en 2005) ont tous échoué à concrétiser les espoirs des fans de la petite balle jaune de la grande île.
Cette édition 2018 pourrait bien mettre un terme à cette déveine et au dicton qui va avec : "nul n’est prophète en son pays". Nick Kyrgios incarne le présent et l’avenir du tennis aussie de par son style, sa personnalité et son potentiel, immense.
McEnroe dithyrambique
Encensé par John McEnroe, -"C’est incroyable de voir à quel point Nick Kyrgios est talentueux. Le jeune joueur le plus talentueux dans le monde et le meilleur que j’ai vu depuis cinq ou dix ans"-, le natif de Canberra a clairement l’étoffe du héros. Beaucoup d’observateurs lui prédisent un beau palmarès à condition de dompter ses démons, à savoir une certaine nonchalance sur le court parfois conjuguée à des accès de colère qui nuisent à son rendement et qui lui ont valu une saison 2017 loin de ses ambitions (défaites au 1er tour à Melbourne et Paris, échecs au 2e tour à Wimbledon et New York).
McEnroe, qui s’est sûrement un peu reconnu en lui pour son côté écorché vif, l’adoube aujourd’hui après l’avoir vilipendé en 2016 après une sévère défaite contre Andy Murray à Wimbledon, où Kyrgios avait paru résigné. L’excentrique Australien le respecte énormément et adore ses conseils, comme il l’a révélé lors de la Laver Cup en septembre dernier où Big Mac, capitaine de l’équipe du reste du monde, coachait le joueur de l’hémisphère sud: "Nous nous sommes très bien entendus, a-t-il confié. C’était vraiment bien de l’avoir sur la chaise. Il m’a été d’une grande aide, il me comprend bien".
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Plus basket et showtime que tennis
Une prise de conscience semble s’être opérée chez Nick Kyrgios après quelques années faites de hauts et de bas. Il y a encore deux ans, il avouait ainsi son peu d’attirance pour son sport : "On ne peut pas dire que j’aime le tennis, non. A 14 ans, j’étais dingue de basket mais mes parents m’ont poussé à poursuivre le tennis. C’est plus un job en fait", reconnaissait-il volontiers comme pour justifier ses sautes de tension habituelles.
Roger Federer, après avoir découvert progressivement le personnage, l’a défendu l’an dernier avant sa confrontation en demi-finales du Masters 1000 de Miami, gagnée sur le fil: "Nous avons un grand groupe de joueurs émergents avec cette nouvelle génération. C’est une bonne chose pour l’ATP. Il faut arrêter de vouloir les conseiller sans cesse".
Wimbledon 2014 : une victoire inoubliable contre Nadal
Numéro 1 mondial junior en 2013 après notamment une victoire à l’Open d’Australie contre son compatriote Thanasi Kokkinakis, Kyrgios s’était révélé au monde du tennis lors du Roland-Garros suivant : il avait fait fructifier sa wild card en éliminant d’entrée Radek Stepanek en trois sets avant de tomber face à Marin Cilic au tour suivant.
Mais c’est lors de Wimbledon 2014 que le teenager (19 ans, 144e à l’ATP) va se faire réellement connaître du grand public : le droitier au revers à deux mains sort Richard Gasquet en sauvant neuf balles de match puis Rafael Nadal en 8e de finale en quatre sets après un duel de très haut niveau. Il paraît lancé sur l’autoroute du succès d’autant qu’il confirme en raflant ses trois premiers titres en 2016 (Marseille, Atlanta et Tokyo).
2018 a très bien commencé
Malheureusement pour lui, 2017 n’a pas été du même acabit malgré quelques performances sporadiques (finale à Cincinnati contre Grigor Dimitrov, demie à Miami devant Roger Federer lors d’un match très spectaculaire). Kyrgios a dû attendre le 31 décembre (et le premier tournoi comptant pour la saison 2018) pour regagner un tournoi. Il l’a fait à Brisbane, devant ses supporteurs (avec des victoires sur Alexandr Dolgopolov, Grigor Dimitrov et Ryan Harrison).
Cet Australian Open pourrait donc marquer l’avènement de Nick Kyrgios même s’il ne faut jurer de rien avec ce grand escogriffe capable du meilleur comme du pire selon son humeur du jour. D’autant que son tableau s’annonce ardu avec possiblement Jo-Wilfried Tsonga au 3e tour, Dimitrov en 8e, Sock ou Anderson en quarts, Nadal en demies et Federer en finale.
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