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Tour de France : pourquoi les Français ne sont plus capables de le gagner

Aucun coureur tricolore n’a terminé la course en tête depuis 1985. Les explications de Bernard Hinault, le dernier vainqueur, et de Pascal Chanteur, président du syndicat des coureurs pros.

Article rédigé par Didier Balez - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Bernard Hinault, quintuple vainqueur du Tour de France, le 21 juillet 1982, lors de la 17e étape entre Bourg d'Oisans et Morzine.  (AFP)

Le Tour de France n'a pas été remporté par un Français depuis vingt-huit ans. Et ce ne sera sans doute pas pour cette année. Pour expliquer ces décennies de disette sportive, francetv info a interrogé le dernier vainqueur tricolore, Bernard Hinault, et Pascal Chanteur, ancien coureur du Tour, aujourd’hui président du syndicat des coureurs professionnels.

Francetvinfo : Pourquoi aucun Français ne figure parmi les favoris du Tour 2013 ?

Bernard Hinault : Pour gagner le Tour, il ne faut penser qu'à cela, toute l'année. C'est une démarche individuelle, comme celle entamée par Froome depuis deux ans. Les meilleurs Français, comme Pinot, Rolland, Chavanel ou Voeckler peuvent lutter ponctuellement avec les meilleurs, mais pas viser la victoire finale. On les prépare pour des gros coups ponctuels : une victoire d'un jour, c'est plus facile que de briller pendant trois semaines...

Pascal Chanteur : C'est vrai que pour porter le maillot jaune, il faut oser attaquer, avoir des capacités physiques et psychologiques exceptionnelles, et surtout une grosse équipe autour de soi. Ce n’est pas le cas des Français cette année. Mais ils figurent quand même parmi les meilleurs coureurs professionnels, et ils ont de bons résultats depuis  le début de l'année. La formation à la française est performante. C’est peut-être un problème de génération. Chez nos juniors, nous avons de bons résultats. Pierre-Henri Lecuisinier a été champion du monde en 2011 et, la même année, Arnaud Démare a remporté le titre mondial chez les espoirs. On peut donc être optimistes.

Un Français pourra-t-il gagner le Tour dans les années qui viennent ?

Bernard Hinault : Dans les années 1970, sur le Tour, la moitié des coureurs étaient Français. Aujourd'hui, ils ne sont que 33 sur 198... La mondialisation du cyclisme a amené sur le Tour les meilleurs de tous les pays, des Etats-Unis, d’Australie, des pays de l’Est et bientôt d’Asie. Parmi eux, il y a de vrais "morts de faim" avec lesquels aucun Français ne peut rivaliser sur le plan de la motivation. Les Français doivent oser davantage ! Leur chance, c’est que le cyclisme devient plus sain. Les forces s'équilibrent, il y a de bons coureurs chez les jeunes. Si on leur laisse le temps, l’un d’eux pourra peut-être s’imposer sur le Tour.

Pascal Chanteur : Construire une équipe en France, c'est plus difficile qu'en Italie, en Angleterre ou en Ukraine. Les règlements, les charges sociales, les statuts coûtent plus cher aux sponsors français, les coureurs ont des salaires beaucoup plus élevés que dans les pays de l'Est ou certains pays moins développés. Du coup, ils ont besoin d'exister toute l'année et pas seulement sur les trois semaines du Tour. Cela dit, je suis plus optimiste que Bernard Hinault. Si un jeune Français comme Thibaut Pinot montre à nouveau son talent en finissant dans les cinq premiers à Paris cette année, il est certain que son directeur sportif le mettra en condition de gagner le Tour 2014.

 

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