Soupçons de dopage sur le Tour de France : "Ça rappelle une période qu'on ne pensait pas retrouver", regrette l'ancien coureur Eric Boyer
Eric Boyer, manager de l'équipe Cofidis de 2002 à 2012, appelle de ses voeux une prise de conscience chez les décideurs du cyclisme pour en finir avec les affaires de dopage.
"Ça rappelle une période qu'on ne pensait pas retrouver", a déclaré l'ancien coureur professionnel Eric Boyer, manager de l'équipe Cofidis de 2002 à 2012, mardi 22 septembre sur franceinfo, à propos des soupçons de dopage sur le Tour de France 2020. Le médecin et le kinésithérapeute du cycliste colombien Nairo Quintana, membre de l'équipe française Arkea-Samsic, sont en garde à vue depuis la veille. "Ce qui est dommage, c'est d'avoir embauché les frères Quintana en acceptant qu'ils arrivent dans cette équipe avec leur propre médecin et leur propre kiné", a jugé Eric Boyer.
franceinfo : Ces gardes à vue et ces perquisitions rappellent forcément un peu la période noire du vélo de la fin des années 1990 ?
Eric Boyer : Oui, ça rappelle effectivement une période qu'on ne pensait pas retrouver. Et c'est bien dommage de constater encore que l'Oclaesp (l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique) est obligé d'être vigilant, d'enquêter, de regarder ce qui se passe dans les chambres d'hôtel occupées par les coureurs. Je pensais qu'à l'UCI (Union cycliste internationale), dans les fédérations nationales, chez les dirigeants au plus haut niveau de ce sport, au sein des dirigeants des équipes, il y avait une prise de conscience liée au passé de notre sport… Ce n'est pas le cas et c'est bien dommage.
Mais il y a des contrôles antidopages réguliers avant et pendant le Tour de France… Cela ne suffit donc pas ?
C'est vrai que les coureurs cyclistes sont soumis à des contrôles en permanence le jour, la nuit, le matin très tôt, ils sont réveillés et on leur prend du sang, de l'urine, tout ça de façon inopinée, quand ils sont chez eux, à l'hôpital, etc. Il faut absolument continuer à pratiquer ce genre de contrôles. Mais non, malheureusement, ça ne suffit pas. Je pense qu'il faut maintenant essayer de convaincre tous les décideurs du cyclisme à se mettre autour de la table et réfléchir à ce qu'on peut faire de plus. Je pense que ça passe par l'éducation, il faut que les dirigeants prennent conscience que, certes, ils sont là pour faire gagner des courses à leurs coureurs, mais qu'ils doivent être aussi garants de leur santé, de l'éthique et de la morale. Tant qu'on n'aura pas compris ça, on n'avancera pas.
L'équipe Arkea-Samsic, dirigée par Emmanuel Hubert, est pourtant en pointe dans la lutte contre le dopage. Le manager général affirme d'ailleurs que l'enquête ne vise pas son "staff directement"…
Oui, c'est possible, je connais bien Emmanuel Hubert. Avec son équipe, il fait partie du MPCC, le Mouvement pour un cyclisme crédible, un regroupement de dirigeants, d'équipes, de managers, d'équipes qui ont décidé de faire plus que les règles proposées par l'UCI. Par exemple, s'auto-interdire l'utilisation de cortisone. Le règlement l'autorise mais quand on est membre du MPCC, on se l'interdit. Ce qui est dommage, c'est d'avoir embauché les frères Quintana [le frère de Nairo Quintana, Dayer, est également coureur professionnel] en acceptant qu'ils arrivent dans cette équipe avec leur propre médecin et leur propre kiné. Et c'est peut-être ça que veut dire Emmanuel Hubert : il a accepté, semble-t-il, qu'il y ait un staff personnel pour ces deux coureurs-là et il se pourrait qu'aujourd'hui ça lui retombe dessus.
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