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Tsonga s'offre Federer et une demie à Roland-Garros

Jo-Wilfried Tsonga (N.6) a sans doute remporté l'une des plus importantes victoires de sa carrière à Roland-Garros, en battant Roger Federer (N.2) 7-5, 6-3, 6-3. Lors d'un match plein et d'une grande constance, le Français a profité de nombreuses approximations du Suisse pour remporter une victoire expéditive (1h51) qui lui ouvre les portes des demi-finales. Pour leur quatrième affrontement en quarts de finale d'un Grand Chelem, le Français remporte son deuxième succès (après Wimbledon 2011). Mais cette fois, c'est devant le public français, à Paris. Et contre David Ferrer (N.4), qu'il a battu une fois en trois confrontations, il aura une énorme chance de poursuivre son chemin, vendredi.
Article rédigé par Thierry Tazé-Bernard
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 7min
 

"J'ai envie de mieux." Voilà ce que disait Jo-Wilfrid Tsonga après sa qualification pour les quarts de finale. Et il a eu beaucoup mieux. En battant Roger Federer, il a battu LA référence du jeu, le plus grand joueur de tous les temps, celui pour qui il a sans doute le plus de respect voire d'admiration. Et pour la première fois, il s'est ouvert les portes des demi-finales de Roland-Garros, obstacle contre lequel il s'était heurté l'an passé contre Novak Djokovic malgré quatre balles de match. Il avouait récemment que cette défaite "fait partie des beaux films de ma carrière". Il en a désormais un beaucoup plus beau.

Arrivé pour la première fois en quarts de finale sans avoir concédé une seule manche, le Français était frais, en pleine confiance, avec tous les voyants au vert. A l'opposé, Roger Federer sortait d'un troublant match en cinq sets arraché au forceps à Gilles Simon. De l'énergie, de la concentration, il en avait laissé en route. Peut-être également de la confiance, notamment dans son jeu de jambes. Il avait évoqué cette perte de confiance pour expliquer le retournement de situation au tour précédent. Et aujourd'hui, les erreurs de placement, les fautes très nombreuses, le manque d'ajustement, et ces retards sur la balle sont autant d'indices qui plaident pour un problème physique. Est-ce aussi le vent qui lui a fait commettre de telles erreurs ? En tout cas, comme lors de ses plus cruelles défaites contre Nadal ici-même, le Suisse a accumulé les coups droits décentrés, signe que quelque chose ne fonctionne pas chez lui. Mais si Roger Federer a perdu, c'est aussi parce que Jo-Wilfried Tsonga a réalisé un match plein.

Le coup droit se grippe chez Federer

En net progrès dans tous les compartiments du jeu, Jo-Wilfried Tsonga a montré que la terre faisait maintenant partie de son domaine. Derrière son service, avec son coup droit et désormais un revers qui tient largement le coup, le N.1 français a appliqué une tactique clairement établie: pilonner le revers du Suisse, comme le fait si bien Rafael Nadal, l'agresser dès qu'il le pouvait, et frapper, frapper fort. Dans ce match, il n'a connu en fait qu'une seule frayeur: au premier set, lorsque l'ancien N.1 mondial lui a pris son service, après avoir sauvé une balle de break dans son jeu de service initial, pour mener (3-2) puis (4-2). Mais une fois ce premier quart-d'heure de jeu passé, un peu trop passé à frapper fort qu'à bien jouer tactiquement, "Jo" a remis son jeu en ordre de marche. A (4-3), il changeait de raquette, sauvait deux balles de (5-3) et sur trois fautes consécutives de Federer, il lui reprenait le service pour égaliser à (4-4). Les deux hommes restaient au coude à coude jusqu'au douzième jeu. Sur son engagement, le Suisse débutait en gâchant une volée liftée pour l'envoyer dans le filet, mais il revenait de 0-40 à 40A, sauvant trois balles de set en venant chercher chacun des points. Mais un coup droit dans le couloir, puis un boisé, il cédait son service, laissant au Français la manche (7-5) après 39 minutes de jeu.

Pris dans une mauvaise tornade, Roger Federer poursuivait ses erreurs en début de deuxième manche. Un coup droit boisé pour que Tsonga mène (1-0), puis quatre fautes directes consécutives, voilà comment il cédait son service (2-0). Preuve que la confiance n'était pas dans son camp, ce smash tenté 2m devant sa ligne de fond de court et envoyé dans le couloir, alors que son adversaire réussissait à peu près le même au jeu suivant (4-1). Souvent en retard sur la balle, pas à son aise, paraissant même parfois ne pas s'engager à fond, le 3e mondial n'avait aucune opportunité de faire le break, et en 35 minutes, le Manceau menait deux manches à une (7-5, 6-3).

Federer: "Jo-Wil était simplement trop fort pour moi"

Le troisième set démarrait de la même manière. Et pire encore. Servant le premier, Roger Federer excentrait un coup droit pour offrir une balle de break, et commettait une terrible double-faute, avec la complicité du filet sur la 2e balle. Mais il réagissait et sur sa deuxième balle de break, il assénait un fabuleux retour de coup droit pour débreaker (1-1). En panne de premières balles, Jo-Wilfried Tsonga semblait légèrement en retrait. Un coup de moins bien qui ne durait pas. Dans le fameux septième jeu, le Suisse envoyait un smash facile dans le filet, puis un coup droit hors des limites, avant de voir le passing-shot de son rival heurter la bande du filet pour finir dans son épaule. Le break était fait (4-3), et le Manceau ne perdait pas cet avantage. Et il s'emparait une nouvelle fois de l'engagement de Federer, pour conclure après seulement 1h51 de jeu. "'Jo-Wil' était simplement trop fort pour moi aujourd'hui", constatait avec lucidité l'ancien N.1 mondial. "Il a été solide dans tous les domaines, moi j'avais de la peine dans tous les domaines. Il fallait vraiment que je gagne ce premier set." La statistique qui illustre ce mal-être: ses 34 fautes directes et 43 fautes provoquées. En face Tsonga a commis 22 fautes directes et 26 fautes provoquées. C'est en quelque sorte le résumé de ce match.

Pour Jo-Wilfried Tsonga, ce succès peut ouvrir bien des portes. En demi-finale, il sera confronté au seul autre joueur qui n'a pas perdu un set depuis le début de la quinzaine: David Ferrer. Véritable métronome, l'Espagnol a déjà croisé la route du Français à trois reprises, pour une défaite (Wimbledon 2011) et deux victoires (Rome 2010 et Bercy 2012). Avec un public totalement acquis à sa cause, et après ce succès de prestige et d'importance, le Manceau a les cartes en main pour atteindre la finale, 30 ans après Yannick Noah et 25 ans après Henri Leconte, dernier joueur masculin français à s'être hissé jusque-là. Ce dernier était d'ailleurs aux premières loges, au bord du court, pour assister à la qualification. Mais il reste une marche à gravir, pour s'offrir de plus belles images encore dans le film de sa carrière. Il devient ainsi le 12e Français à atteindre les demi-finales à Paris. Seulement trois sont passés en finale (Proisy, 1972, Noah 1983, Leconte 1988), pour une victoire. C'est dire le défi qui l'attend.

Vidéo: la victoire de Tsonga

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Vidéo: la réaction du vainqueur juste après le match

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