Un jour, un club : Quand Bob Marley a enflammé le stade de Dijon
Il a débarqué une après-midi de juin en 1980 dans ce qui n'était alors qu'une enceinte appartenant à un club évoluant en quatrième division du championnat français. En pleine tournée européenne avec son groupe les Wailers pour le Uprising Tour, Bob Marley a ainsi déposé ses valises le temps d'une soirée à Dijon au parc des sports Gaston-Gérard.
Le tout calé entre une date à Munich et une autre à Milan où il fera face à près de 120 000 fans dans un San Siro plein à craquer. L'organisateur du concert Daniel Linuésa raconte : "J'ai sauté sur l'opportunité quand j'ai su que le promoteur de Bob Marley cherchait un stade pour accueillir un de ses concerts. Et j'ai rapidement eu l'autorisation".
Un concert rocambolesque
Cette soirée, on lui en parle souvent. "Ce concert reste dans les tête dijonnaises comme un événement mythique. J'ai fait des concerts avec d'autres grands noms comme les Pink Floyd, Supertramp ou les Dire Straits, mais Bob Marley a marqué les gens". Tout ne se passe cependant pas comme prévu. "On devait faire une scène couverte à la base. Mais il y a eu des erreurs dramatiques de calcul. Et le toit a fini par s'écrouler sur la scène l'avant-veille du concert".
Vent de panique du côté des techniciens. Toutes les boîtes d'intérim sont appelées pour régler le problème. L'histoire ne peut pas s'arrêter en chemin. Linuésa reconnaît que le vent du boulet n'est pas passé loin. "Finalement, après une course contre la montre, tout a été déblayé puis remonté. Mais on a eu chaud".
"Mais qu'est ce que Marley vient foutre à Dijon !"
Linuésa peut respirer. La catastrophe est évitée. La popularité du chanteur est telle que plus de 10 000 billets ont ainsi déjà été vendus avant le concert. Franck est un passionné de musique et il avait dix ans au moment des faits. Et encore aujourd'hui, il a du mal à y croire. "Je me suis dit : mais qu'est ce que Bob Marley vient foutre à Dijon ! On a cru à un canular".
Présent à ce concert avec sa famille, il se souvient. "On était en milieu de fosse. J'ai des souvenirs très précis des musiciens de la scène, des décors. Je suis un très grand fan. J'ai vu celui qui était mon héros depuis l'âge de 6-7 ans. J'ai vu ce bonhomme avec ses dreadlocks qui sautaient en l'air. C'était monstrueux".
Foot et musique, même combat
Le concert se déroule en plein air à une époque où il est rare de voir ça en France. Du haut de ses 10 ans, Franck décrit l'ambiance particulière qui régnait ce soir là. "On est tous dehors. L'ambiance du stade de football est couplée à celui d'un concert. L'accord parfait entre deux mondes". Deux mondes auxquels Bob Marley a toujours souhaité appartenir. Comme avant chaque concert, il se donne à fond lors d'un match organisé sur la pelouse du Gaston-Gérard. "J'ai encore des potes qui me rappellent aujourd'hui qu'ils ont joué contre Marley en 1980" relate, amusé, Daniel Linuésa.
Cette ambiance de match de football, Franck la retrouve aussi durant le concert. Le jeune fan du chanteur de reggae se rappelle d'un stand du club qui vend pour l'occasion des fanions, maillots et autres écharpes siglés du Cercle de Dijon, l'ancêtre du DFCO. Franck va plus loin. "Il y avait même des supporters à côté de moi qui étaient habillés de la tête au pied aux couleurs du club. Écharpes et maillots tout y est passé. C'était une fusion entre deux populations".
La pétition de la discorde
Le concert ne connaît pas de fausses notes. Pourtant, plus aucun événement de ce type ne se déroulera à Gaston-Gérard. Linuésa raconte, à la fois amusé et interloqué. "Le cabinet du maire a téléphoné le surlendemain. Robert Poujade était alors en place. J'entretenais avec lui des bonnes relations et je pensais qu'il allait me féliciter. Mais ce ne fut pas le cas. Il m'a dit qu'il avait une pétition de 104 médecins et chirurgiens de l'hôpital du Bocage sur sa table. Les infirmières et les aides-soignantes n'ont pas pu mettre au lit les malades ce soir là car ils étaient tous en train de danser aux fenêtres. C'était génial. Le son s'est bien répandu mais au lieu d'aller se coucher à 20 heures, ils ont voulu prolonger le plaisir". Un concert qui restera unique. À jamais.
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