Viva Espana !
Championne d'Europe en titre, l'Espagne est à une victoire de réaliser un doublé Euro-Mondial que seule... l'Allemagne a réalisé jusqu-là, en 1972/1974. L'affiche à Johannesburg, entre Espagnols et Néerlandais qui n'ont encore jamais été couronnés, sera inédite dans l'histoire des finales de Coupes du monde. Qui plus est, ce sera la première fois qu'une nation européenne remportera le titre mondial en dehors du vieux continent. La Roja défiera donc pour un premier sacre des Néerlandais dont ce sera la troisième tentative en finale. En 1974, les Oranje de Johan Cruyff avaient été battus par l'Allemagne (1-2) à Munich. Quatre ans plus tard en Argentine, ils avaient également cédé, contre l'Albiceleste (1-3 a.p.).
Pour l'Allemagne, qui a manqué l'occasion d'atteindre pour la huitième fois de son histoire une finale d'un Mondial -ce qui aurait été un record-, il s'agira, comme en 2006 chez elle, de terminer à la troisième place du tournoi. La Mannschaft devra pour cela battre, samedi à Port Elizabeth, l'autre demi-finaliste malheureux, l'Uruguay, éliminé mardi par les Pays-Bas (2-3). La victoire espagnole s'est décidée après un corner de Xavi, qui trouvait Puyol lancé comme un missile, et dont la tête puissante était imparable pour Neuer (73). Ce but concrétisait une réelle domination de la Roja, contre un adversaire qu'elle avait déjà battu en finale de l'Euro 2008 sur le même score.
Pour ce choc des Titans, le sélectionneur espagnol Vicente Del Bosque avait choisi de se passer de Fernando Torres en attaque pour la première demi-finale espagnole de l'histoire. Et donc d'aligner Pedro aux côtés de David Villa. Pedro, 22 ans, jamais titularisé durant ce tournoi, honorait sa 7e sélection. L'attaquant du FC Barcelone avait fait une entrée remarquée contre le Paraguay en quart de finale (1-0), notamment avec un tir sur le poteau qui avait débouché sur le but de la victoire. Torres, auteur du but de la victoire en finale de l'Euro 2008 contre l'Allemagne (1-0), payait ainsi le prix de sa prestation fantomatique depuis son arrivée en Afrique du Sud. Pour le reste, Del Bosque avait donc reconduit l'équipe qui était venue à bout du Paraguay. De son côté, Joachim Löw avait opté pour Piotr Trochowski pour remplacer Thomas Müller, suspendu pour accumulation de cartons jaunes. Agé de 26 ans, Trochowski, milieu offensif d'Hambourg, honorait de son côté sa 35e sélection et avait la redoutable tâche de faire oublier la révélation allemande de ce tournoi avec quatre buts. Hormis ce changement, Löw avait reconduit l'équipe qui avait dominé l'Angleterre (4-1) en 8e de finale et l'Argentine en quart de finale (4-0). Comme attendu, Sami Khedira, ménagé à l'entraînement cette semaine, tenait sa place aux côtés de Bastian Schweinsteiger.
L'Espagne prenait le match en mains dès le début. David Villa se procurait la première grosse occasion dès la 6e minute. Bien alerté par Pedro, le futur Barcelonais butait sur Neuer. Sept minutes plus tard, Puyol, bien servi par Iniesta qui avait débordé sur le côté droit, mettait son coup de tête au dessus. Forts de leur supériorité technique, les Espagnols dominaient nettement ce premier quart d'heure. Il fallait attendre la 16e minute pour voir les Allemands se montrer un tantinet dangereux sur un corner puissant où Casillas manquait un peu sa sortie. Entre temps, un spectateur avait fait irruption sur le terrain, rapidement repris par les forces de l'ordre. La rencontre reprenait sur un rythme tranquille, "la Roja" développant son jeu de passes tandis que la Mannschaft misait sur le contre. Etrangement, aucune faute n'avait encore été commise après 25 minutes de jeu. Proprement incroyable à ce niveau.
C'est Sergio Ramos qui la commettait dans la minute suivante sur Podolski, une bonne semelle qui aurait mérité un avertissement. A la demi-heure, Xabi Alonso tirait de loin mais le ballon passait à droite de la cage gardée par Neuer. Les Allemands répliquaient par une frappe puissante de Trochowski que Casillas déviait en corner (32e). Une première alerte pour l'équipe de Vicente Del Bosque. Hormis celle-ci, la Seleccion gérait bien son affaire, sans se mettre en danger. Mais ça manquait tout de même cruellement de vitesse pour déborder l'arrière garde adverse, repliée dans son camp. Juste avant la pause, sur un contre allemand, Klose, au contact de Piqué, s'écoulait dans la surface. L'arbitre magyar, Monsieur Kassai, ne bronchait pas, à juste titre, l'attaquant d'origine polonaise étant venu lui-même buter sur la jambe de son adversaire. Dans la foulée, un tir de Pedro était bien capté par Neuer. Les deux formations regagnaient les vestiaires sur ce score vierge.
Dès l'entame de la seconde période, l'Espagne tentait d'accélérer la cadence. Deux tirs de Xabi Alonso, le premier du droit après un superbe numéro de Pedro sur l'aile droite, le second du gauche, frôlaient les montants du but allemand. Du coup, Jansen remplaçait Boateng, décision de Joachim Löw (52e). Les Champions d'Europe cherchaient à donner davantage de vitesse à leur jeu mais Villa, bien décalé par Xavi aux 18 mètres, plaçait son tir hors du cadre. Puis en deux minutes, les Ibères manquaient d'ouvrir la marque. D'abord sur une belle action collective conclue par un tir puissant dans l'axe de Pedro que le portier allemand repoussait tant bien que mal. Ensuite, dans la continuité, sur un centre d'Iniesta que Villa coupait un pil trop tard. Enfin, sur un nouveau tir de l'intenable Pedro qui passait de très peu à droite de la cage de Neuer (57e).
Le coach allemand décidait alors de faire entrer le prometteur Kroos à la place de Trochowski (62e). L'Allemagne subissait en effet trop et il fallait changer quelque chose. D'autant que Ramos, bien lancé dans la surface par une belle ouverture de Xabi Alonso, était tout près d'exploiter la situation, obligeant Podolski à revenir le contrer (illicitement ?) in extremis. L'Espagne dominait copieusement son sujet mais l'Allemagne résistait encore. Mieux, elle se procurait sa première grosse occasion du match à la 69e minute (!). Beau mouvement côté gauche, débordement et centre au second poteau de Podolski que Kroos reprenait de volée mais que Casillas déviait au prix d'une belle parade. Mais ce sont les Espagnols qui ouvraient le score à la 73e minute. Xavi tirait un corner que Puyol catapultait d'une tête splendide dans les filets adverses (1-0).
L'Espagne ratait l'occasion de doubler la mise à neuf minutes du terme, Pedro préférant tenter le crochet sur Mertesacker plutôt que de décaler Torres, rentré juste avant à la place de Villa et démarqué sur la gauche. L'Espagne tenait finalement bon et s'offrait sa première finale de Coupe du monde. Un exploit bien mérité pour la "furia Roja", techniquement et collectivement meilleure. Viva Espana !
Réactions
Vicente Del Bosque (sélectionneur de l'Espagne): "Je ne veux pas donner de noms, je pense à tous les joueurs qui ont tous été extraordinaires. Mais attention, il nous reste un match à jouer! Nous sommes heureux ce soir, mais il faut voir comment nous allons récupérer. Je pense à tous les gens qui ont beaucoup travaillé autour de cette équipe depuis des années. On connaît le football néerlandais, et ce sera très difficile en finale."
David Villa (attaquant de l'Espagne): "Je suis très content, on a joué notre meilleur match du Mondial, avec le match qu'on a fait, on aurait pu marquer plus de buts mais c'est celui de (Carles) Puyol qui nous emmène en finale. Jamais dans l'histoire de notre pays nous n'avions atteint ça (la finale de la Coupe du monde), nous sommes très contents de disputer la finale, mais il faut être champion maintenant!"
Philipp Lahm (capitaine de l'Allemagne): "La déception est immense. Nous avons beaucoup essayé, et ça n'a pas souri. En première période, nous n'avons pas joué assez courageusement vers l'avant. Derrière, nous n'avons pas lâché grand chose. Je n'ai aucune envie de jouer le match pour la troisième place".
Manuel Neuer (gardien de but allemand): "La déception est très grande en cet instant. Mais nous savons que nous avons disputé un bon tournoi. Nous n'avons pas joué assez vers l'avant et nous ne nous sommes pas créé assez d'occasions. Et on a manqué un petit peu de courage peut-être. Il nous a aussi peut-être un peu manqué d'audace. Dans quasiment tous les matches, nous avons marqué des buts en première période et c'est comme ça que notre confiance augmentait. Aujourd'hui c'était différent, l'Espagne a pris les choses en main et a eu beaucoup plus d'occasions".
Marcell Jansen (défenseur allemand): "L'Espagne était meilleure ce soir, il aurait fallu être plus audacieux, notamment dans le dernier quart d'heure alors qu'ils étaient un peu à plat. Il faut maintenant finir ce tournoi sur une bonne note".
Joachim Löw (sélectionneur allemand): "Compliments aux Espagnols. Je crois qu'ils vont être champions du monde. Ils sont les meilleurs depuis deux, trois ans. Au niveau du jeu, ils sont tellement bons, ils nous ont poussés à la limite. Ils ont une façon de faire courir la balle qui fait qu'on ne peut que courir derrière. Nous n'avons pas pu nous emparer du ballon comme il aurait fallu, et ça nous a coûté beaucoup d'énergie."
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