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Voile : contre vents et marées, Jacques Civilise a maintenu le cap de la Drheam Cup

Le Covid-19 aurait pu le mettre par terre. Mais Jacques Civilise est un battant. L'organisateur guadeloupéen de la Drheam Cup a réussi l'exploit de réunir stars et des amateurs. Pas moins de 94 bateaux ont répondu présents. Avec un nouveau label, le Grand Prix de France de course au large. Chapeau !
Article rédigé par franceinfo
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À 74 ans il est toujours sur le pont, incroyable bonhomme ! Ce natif de Pointe-à-Pitre est arrivé dans l'Hexagone au Havre à l'âge de sept ans, par bateau, sur le Colombie, "un baptême de mer incroyable" se souvient-il. Bien des années plus tard on le retrouve, aux commandes de la Drheam Cup. Depuis la tour de Port Chantereyne, il a une vision aussi périphérique et cohérente des choses, sur les concurrents, mais aussi sur le site de départ, le port, le PC presse installé au club de voile Livory. Il aime avoir tout sous la main. 

Avec son directeur de course Hervé Gauthier, il observe attentivement les conditions météo qui attendent ses 94 bateaux. Masque obligatoire dans l'espace clos, cet amateur éclairé qui a fait plus de 50 ans de régates a appris la voile à Cherbourg quand il était enfant. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c'est dans cette ville qu'il va organiser le premier départ de SA course, en 2016. Il n'est pas devenu organisateur par hasard.

De l'automobile à la voile 

Ce manager dans l’âme, avait été nommé en 1997 par Carlos Ghosn pour manager les programmes innovations des Laguna 2, Velsatis et Espace 4 au sein du groupe Renault. En 2002 il crée son cabinet de conseil en innovation et management de grand projets (il travaille pour la formule 1 avec Michelin, Dcns, et surtout pour la Coupe de l'América le Défi), en modélisant son savoir faire et sa pratique dans un système de management, qu'il nomme "Drheam", basé sur un modèle de fonctionnement et de comportement d'un équipage sur un voilier de course.

Il y a 5 ans Jacques Civilise est parti d'un constat : le manque d’une grande course au large en France style Fastnet comme en Angleterre ou la Sydney Hobart en Australie. "Nous sommes les rois des transats ou des courses trans-océaniques avec la Route du Rhum-Destination Guadeloupe ou le Vendée Globe, mais nous ne le sommes pas sur les grandes courses au large de plus de 600 nautiques alors je me suis devant une feuille blanche et j'ai créé cette course de ce format-là". Cela paraît simple, mais Jacques Civilise va appliquer ses idées. 

 

Concept original et novateur

Dès la première année le fédération française de voile, a validé l'idée, en homologuant le course pour les années paires en alternance avec le Fatsnet Anglais qui a lieu les années impaires. Jacques réalisait son rêve, mais ceci n'explique pas la traduction littérale de la Drheam Cup, qu'on pourrait presque appeler la course de rêve. Le concept est le suivant : "le H de Drheam, ce n'est pas une faute d'orthographe, le logo c'est l'acronyme de Dévelopement Relations Humaines Et Application Management. Il m'est apparu nécessaire d'y mettre cet ingrédient humain." L'Adn de la Drheam Cup, c'est compétition partage et fête, et qui dit partage dit grande course au large open ouverte à tous.

On retrouve aussi bien les pros que les amateurs, et Thomas Coville ou Franck Cammas vont cotoyer sur la même ligne Jacques Pelletier ou Valérie Guilmard, qui courrent avec la même passion.
"Dans le milieu de la voile on rassemble des grands sportifs et des grands amateurs, dans d’autre sports comme la formule 1 c’est dur de courir contre Hamilton alors que là on peut le faire, c’est la particularité et le charme de notre sport" rappelle Billy Besson, le Marin polynésien, quintuple champion du monde de Nacra 17, embarqué cette année avec Thibaut-Vauchel Camus.
Jacques est partout sur les pontons de Cherbourg, c‘est sa manière de faire. Joignable H24 comme il aime à dire. Un petit côté rétro qui n'est pas pour déplaire aux skippers. Du pro à l’amateur, le Guadeloupéen a toujours un mot attentionné pour les marins. 

Les marins apprécient le boss...

Les Ultimes, les rois de la fête, ont répondu au rendez-vous. Certes ils n'ont pas pu rentrer dans Port-Chantereyne, mais ils sont devant la rade, dimanche pour parader avant le départ. Thomas Coville est très heureux de faire cette course, il est le premier des grands à rendre hommage à l'organisateur guadeloupéen. "Jacques Civilise est resté pugnace et a cru en la possibilité de faire cette course. Pour nous il y a un sens d'être là, soutenir ce genre d’action et être à ses côtés. Notre sport n’est pas relié à la billetterie ou dans un stade, il est en pleine nature, et peut se dérouler sans que ce soit dangereux et trop contraignant."

Sur le Multi 50 Solidaires en peloton - Arsep, Thibaut Vauchel-Camus a bien sur un coup de coeur pour l'organisateur, la navigateur guadeloupéen n'a pas manqué d'arroser au champagne Jacques Civilise et les deux élus de Cherbourg-en-Cotentin et de la Trinité-sur-Mer. Non seulement parce qu'il effectue un doublé, mais aussi parce qu'il aime ce concept de course. "C'est un vrai personnage Jacques et j'ai un lien particulier avec la Guadeloupe quand je viens le voir ici, on a de vraies affinités. Il faut vraiment le féliciter de s'être bagarré pour maintenir l'évènement, d'avoir pu compter avec les partenaires institutionnels qui ont vraiment joué le jeu et se sont adaptés à la situation. Comme nous les marins quand nous devons le faire en mer lorsque la météo n'est pas celle annoncée."

En temps réel, Franck Cammas et son équipage sur le maxi trimaran Edlmond de Rotschild vont remporter la course en 1 jour 21 heures, 30 minutes et 33 secondes, devant Thomas Coville sur Sodebo. Tout l'équipage se prepare pour le Trophée Jules Verne, cette course leur permet de lancer la campagne contre le record. "C'est une très belle régate, intense comme nous les aimons avec des phases tactiques et des phases de vitesse pure. Cela nous a permis de retrouver nos marques et des mécanismes par rapport au bateau. On a pu rester proches de 40 noeuds en permanence lors de la nuit, c'est bien pour nous d'avoir pu pousser le bateau," avouera Franck Cammas.

...et les élus votent pour Jacques 

Enfin l’homme a su rassembler autour de lui les élus de tout bord, comme s’il créait un gouvernement de cohabitation de la mer, Cherbourg-en-Cotentin et la Trinité-sur-Mer, deux villes maritimes. Quand on voit les deux maires converser bateaux, c'est quelque chose de naturel, même s'ils ne sont pas du même bord politique. Benoît Arrivé le Maire de Cherbourg-en-Cotentin était au début de l'aventure en 2015, il se souvient très bien de ce premier contact. "Lorsqu’il est venu me voir il y a quelques années, il était un peu un rêveur mais il nous a vite convaincu. C’est aussi quelqu’un d’attaché aux valeurs humaines avec son fameux H de la Drheam Cup, il l'explique souvent. C’est tout ça à la fois Jacques, passionné par notre territoire où il a fait ses premières gammes de marin, passionné par la voile, passionné par les gens et quand vous venez agréger toutes ces compétences techniques et ce lien humain ça donne la Drheam Cup".
 

Même son de cloche chez Yves Normand le maire de la Trinité-sur-Mer, qui vient tout juste de retrouver son poste de premier élu, et qui ne manque pas de rappeler que près de 20 pour cent des engagés de la course sont de la Société Nautique de la Trinité, l'un des deux clubs organisateurs, avec le Yacht Club de Cherbourg-en-Contentin. Jacques Civilise a su réunir aussi autour de sa course le Yacht Club de France, club support pour cette troisième édition et l'Union Nationale pour le Course au Large en tant que partenaire technique. Jacques a longtemps couru le Spi Ouest-France à la Trinité-sur-Mer. Il y possède un monotype grand soleil de 40 pieds, et réside non loin à Crac'h, "son havre de paix breton, sa deuxième terre d'adoption" aime-t-il dire souvent. Le port breton est aussi l'un des endroits stratégiques de la course au large francaise. C'est de ce petit coin de Bretagne que sont souvent parties de belles aventures, comme celles de Laurent Bourgnon, double vainqueur de la Route du Rhum, ou les épopées du marin guadeloupéen Claude Bistoquet.


Jeudi soir le dernier concurrent a passé la ligne d'arrivée, il s'agissait du Loup Rouge, le bateau le plus ancien de la flotte, un yacht classique construit en 1962, attendu comme il se doit par le boss. La Drheam Cup, qui porte le label Grand Prix de France de Course au Large, est désormais bien installée dans le paysage de la voile océanique française et internationale, grâce à Jacques Civilise. Comme quoi l'automobile et la voile peuvent parfois faire bon ménage.
Rendez vous est pris en 2022 pour la quatrième édition.

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