"Dans les prochaines années, on sera plus nombreux" : sur la route du Rhum, deux skippers handicapés à l’assaut de l’océan
Damien Seguin et Fabrice Payen ne prennent pas le départ, dimanche, de la Route du Rhum pour remporter la célèbre course à la voile entre Saint-Malo et la Guadeloupe. Ils espèrent juste ouvrir la voie.
Pour la première fois dans l’histoire de la Route du Rhum, deux skippers handicapés seront sur la ligne de départ, dimanche 4 novembre. À l'occasion de cette 11e édition de la célèbre course à la voile entre Saint-Malo et la Guadeloupe, Damien Seguin et Fabrice Payen veulent porter un message au-delà de l’exploit sportif : même avec un handicap, rien n’est impossible.
Mon histoire a permis d'élever un petit peu le débat, à changer un petit peu le regard sur le handicap et surtout ça a donné des vocations derrière.
Damien Seguinà franceinfo
Le bateau de Damien Seguin, à la coque rouge vif, semble comme les autres, à un détail près. Le porte-drapeau paralympique 2012 n’a pas de main gauche. "Une des problématiques que j'avais, c'était de pouvoir utiliser mes deux bras, ce qui est impossible de faire avec les poignées classiques", explique-t-il. Alors il a trouvé une petite astuce pour manœuvrer sur les voiles avec les manivelles : "On a simplement adapté un manchon, dans lequel je rentre, avec ça je peux pousser et tirer dessus."
Damien Seguin est double médaillé d’or aux Jeux paralympiques à Athènes et à Rio, mais en 2005, quand il a voulu passer à la course au large chez les valides, la désillusion a été immense. "Je vais pour m'inscrire sur la Solitaire du Figaro et j'ai été refusé", raconte-t-il. La raison donnée par les organisateurs est qu'"il ne me considéraient pas capable de naviguer en bon marin".
Depuis, les conditions d’accès aux courses ont changé. Damien Seguin est considéré comme un véritable skipper. Il est prêt à se lancer dans deux ans dans un tour du monde en solitaire. Pour les 40 ans de la Route du Rhum, "on est deux au départ, mais je pense que dans les prochaines années, on sera plus nombreux", prédit le skipper.
"Le premier homme augmenté"
Fabrice Payen revient de loin. Il y a six ans, un accident de moto brise sa jambe. Trop de complications, trop de souffrance, cet ancien commandant de marine marchande prend une décision radicale : l’amputation de sa jambe droite. Avec cette décision, il perd "en plus la capacité à exercer [son] travail. [Il] se retrouve à l'hôpital pendant de très long mois, la vie sociale disparaît".
Aujourd’hui, le voilà au départ sur l’une des courses les plus difficiles grâce à une prothèse révolutionnaire faisant de lui le "premier homme augmenté, équipé d'une prothèse électronique" sur la Route du Rhum. Son coût est de 100 000 euros, soit le prix de son bateau. "C'est effectivement une prothèse qui est issue des conflits armées et on a ce genou qui est assez robuste, qui est totalement étanche", détaille-t-il.
Ses déplacements sur un bateau instable seront plus lents que ses concurrents, mais là n’est pas l’essentiel pour le Malouin de 49 ans. "C'est déjà une première victoire d'être là et de pouvoir déjà commencer à relayer le message sur le handicap, sur les différences", estime Fabrice Payen.
Damien Seguin. Fabrice Payen. Aucun ne part pour gagner, mais ils incarnent le même espoir et une leçon de vie vivifiante.
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