Portrait de l'inoxydable Loïck Peyron
"Cette victoire est belle parce que depuis 12 ans je ne rêvais plus de la gagner. C'est un sentiment étonnant." Et le record ? "C'est la cerise sur le bateau." Loïck Peyron, vainqueur de la 10e Route du Rhum avec le maxi trimaran Banque Populaire VII, trouve toujours les mots. Et les bons. C'est une de ses qualités. Le navigateur est surtout un touche-à-tout génial, un surdoué de la voile capable de passer de la Coupe de l'America à la course océanique avec un égal talent. A 54 ans, il a donc ajouté un nouvel exploit à une liste déjà longue mais où manquait justement un succès dans cette transat en solo entre Saint-Malo et Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), à laquelle il avait déjà participé six fois sans jamais la gagner.
Avant même ce triomphe dans le "Rhum" 2014 (doublé d'un temps canon de 7 jours 15 heures et 8 minutes), le palmarès du Baulois donnait le vertige: trois victoires dans la Transat anglaise (1992/1996/2008), deux dans la Transat (en double) Jacques-Vabre (1999-2005), une dans la Barcelona World Race (en double/2011)... Sans oublier le Trophée Jules-Verne (en équipage/2012) et cinq titres de champion du monde Orma (trimarans de 18,28 m). La liste n'étant pas exhaustive.
Un skipper et un communiquant
Peyron, qui a bouclé lundi sa 49e traversée de l'Atlantique, a également été co-barreur du catamaran Alinghi dans la 33e Coupe de l'America en 2010 à Valence (Espagne) et du trimaran AC72 Artemis dans la 34e, l'an dernier à San Francisco. Le skipper de Banque Populaire VII (31,50 m) est un véritable Zébulon tchatcheur, aussi à l'aise en monocoque qu'en multicoque, doté d'un sens de la communication hors du commun.
Capable de défendre avec un égal brio des points de vue diamétralement opposés à cinq minutes d'intervalle, il ne peut jamais résister à la tentation d'un bon mot. Témoin cette boutade lancée au ministre des Sports de l'époque, David Douillet, à son arrivée à Brest après s'être emparé du "Jules-Verne" le 7 janvier 2012 avec ses treize équipiers: "c'est gentil d'être là... Si j'avais su que vous veniez, je me serais rasé..." "Loïck est comme un couteau suisse, il peut tout faire sur un bateau", a dit de lui Ernesto Bertarelli, patron du défi suisse Alinghi dans la 33e "Cup".
Un navigateur prisé
Né le 1er décembre 1959 à Nantes, habitant Le Pouliguen (Loire-Atlantique), Loïck est le cadet des trois Peyron. Bruno, l'aîné, a remporté le premier Trophée Jules-Verne en 1993 (puis en 2002 et 2005), et Stéphane, le benjamin, ancien véliplanchiste, est journaliste et documentariste. Initiés par leur père officier de marine marchande, Loïck Peyron, ses deux frères et deux soeurs ont tiré leurs premiers bords sur le bateau familial. La mise à l'eau du grand monocoque Vendredi 13 (39 m) pour la Transat anglaise de 1972, à laquelle il assiste en compagnie de son oncle et skipper Jean-Yves Terlain, a été déterminante pour l'avenir du jeune Loïck, alors âgé de douze ans. C'est ce jour là qu'il décide de devenir navigateur professionnel. A 18 ans, il réalise sa première traversée de l'Atlantique et n'a, depuis, cessé d'enrichir son curriculum vitae.
Loïck Peyron est un skipper recherché car, à la différence de quelques grandes gueules patentées, il élève rarement la voix à bord de ses bateaux et garde son calme même dans les situations délicates. "En mer, a-t-il expliqué après le "Jules-Verne", j'aime bien dédramatiser. Ce n'est pas parce que les choses deviennent un peu plus compliquées, voire angoissantes, qu'il faut être angoissé soi-même, parce que ça transparait immédiatement sur une équipe".
Son palmarès
3 victoires dans la Transat anglaise (1992/1996/2008)
2 victoires dans la Transat Jacques-Vabre, avec Franck Proffit (1999) et Jean-Pierre Dick (2005)
1 victoire dans la Barcelona World Race, avec Jean-Pierre Dick (2011)
1 Trophée Jules-Verne, en équipage (2012)
5 titres de champion du monde Orma (trimarans de 18,28 m)
2 campagnes pour la Coupe de l'America:
Co-barreur d'Alinghi en 2010
Co-barreur d'Artemis en 2014
Vidéo : L'interview de Loïck Peyron à son arrivée
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