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Vendée Globe - Romain Attanasio, fou de glisse et fan de Sam

Pour son deuxième Vendée Globe, Romain Attanasio met le curseur performance un peu plus haut. Il a désormais la maturité et le recul nécessaire pour cela. Le skipper de Pure Best Western adore chausser les skis en dehors de la voile, mais adore aussi sa compagne, Samantha Davies, elle aussi au départ du Vendée Globe. Son rêve : que Sam l’attende sur la ligne. Petites confidences d’un père de famille tranquille.
Article rédigé par Eric Cintas
France Télévisions - Rédaction Sport
Publié
Temps de lecture : 6 min
Romain Attanasio à bord de son navire

Romain si vous aviez fait un autre sport, lequel auriez-vous pratiqué ?
Romain Attanasio : "En fait mon rêve aurait été d’être surfeur avec les plus belles femmes du monde sur les plus belles plages du monde. Mais j’adore le ski, c’est un vrai plaisir même si j’aurais trop peur dans les descentes. Il faut être très motivé, les avoir très accrochées… Pourtant je fais du free ride avec Aurélien Ducroz mais je ne vais pas jusqu’à sauter des barres rocheuse de 35 mètres, 4 mètres maximum. A la base mon grand-père était guide haute de montagne, moniteur de ski et traceur olympique et ma tante, Joëlle Trevelo était en équipe de France de ski. Il n y a que des skieurs chez nous. Je vais avouer quelque chose, moi voileux, c’est une erreur. Je suis né à Paris en transit, mais la famille du côté de papa est des Hautes-Alpes, mon grand-père avait participé à la création de la station de sports d’hiver de Vars."

Romain Attanasio, enfant sur les skis, l'une de ses autres passions (PICASA)

Mais alors pourquoi la voile ?  
RA. : "J’ai aussi un grand oncle par alliance qui est breton et un jour, au grand désespoir du grand-père, j’ai choisi la voile à cause de lui. Il s’appelle Henri le Coz, il avait un poker, un bateau de 8 m25 à Port-Navalo et je passais mes vacances chez lui. En 1990 je n’avais pas bien travaillé à l’école et je me suis retrouvé en pension à Chauny dans l’Aisne. C’est l’année où Florence Arthaud gagne la Route du Rhum, et j’avoue que j’étais un peu amoureux d’elle. Mon grand oncle est venu me chercher dans l’Aisne pour aller au salon nautique, puis Port-Navalo et voilà comment c’est parti. A l’internat j’avais même ma valise marquée, Florence Arthaud d’un côté, et Etap 22.i de l’autre (le nom de mon premier bateau), tout le monde se foutait de moi. Et bien cette valise mon grand-père me l’a ramenée il y a deux ans au départ de la Route du Rhum. On l’a retrouvée aux Sables d’Olonne la semaine dernière, ce n’est pas un hasard."

Florence Arthaud, mais aussi Michel Desjoyeaux et Franck Cammas, sont des personnages référents de votre carrière ?
RA : "Flo, je n’ai pas osé l’aborder quand j’avais 17 ans sur les pontons. J’ai dû attendre quelques années plus tard en 2000 sur mon premier Figaro, je suis allé courir la Générali Solo en double, et j’avais fini devant Florence qui naviguait dans le team de Philippe Poupon. J’avais imprimé le classement et je l’avais envoyé à mon père. On est devenu copains. Mich lui m’a tout appris, en 2005 après la solitaire, il m’appelle pour venir sur Géant, son trimaran Orma sur le grand prix de Vigo je n’osais pas y croire. Après je suis allé sur le Groupama 2 de Franck Cammas. Ces deux marins m’ont appris plein de trucs."

Et automatiquement vous avez été emporté par cette passion ?
RA : "En regardant Florence Arthaud, j’ai voulu faire ça, je suis un rêveur, donc je voulais le faire, partir, être sur l’océan. Ma place, je suis allé la chercher pour être aujourd’hui au départ, personne n’y croyait mais c’est un défi sur la vie. Je l’ai tellement voulu. Il ne suffit pas de la vouloir mais j’ai bossé aussi pour.
En 1997 je veux partir sur la Mini Transat, mais je n’avais pas payé la location du bateau. J’ai enchaîné les petits boulots, En 1999 c’est mon père qui, distribuant mes dossiers sur des chantiers autour de Locmariaquer, trouve une entreprise d’Arras, LTP Lokanor et je fais ma première Mini.
"

 

Le monocoque de Romain Attanasio, de toutes les couleurs

L’autre femme de votre vie après Florence Arthaud, c’est votre compagne, Samantha Davies. Une rencontre de mer ?
RA : "On s’est rencontré avec Sam en mars 2003 au tour de Bretagne à Saint-Malo, ma première course en Figaro 2. Elle arrivait en France pour faire la saison et on s’est croisé au briefing de départ. Je l’ai revue lors de la Solitaire et de la Générali solo, et enfin à St-Gilles-Croix-de-Vie, à la Route du Ponant 6 mois après et là je lui ai envoyé le gennaker de mon cœur… Sam est farouche mais, ça fait quand même 18 ans qu’on est ensemble, et puis Ruben est né entre temps. Il a 9 ans désormais.
A la maison, on parle d’autre chose que de voile, on a beaucoup de boulot l’un et l’autre, on va chercher Ruben à 19 h à la garderie, puis on enchaîne le bain, les devoirs et le coucher de notre fils. On adore la Bretagne, aller dans des endroits qu’on ne connait pas. Mais on a des repères comme l’ile de Houat par exemple. J’y allais quand j’étais gosse car j’ai beaucoup voyagé avec mon père, Sam allait aussi en croisière là-bas tous les étés. Du coup on loue un bateau de croisière et on y passe quelques jours. Et l’hiver va en faire du ski en famille, Sam aime ça. Tant mieux.
"

Vous avez souvent navigué ensemble ?
RA : "On a souvent eu une chance folle, mais aussi on a connu des vaches maigres, des années sans bateaux, des années avec un seul bateau pour deux mais on mesure la chance qu’on a. On n’a pas pu faire beaucoup de courses en double. Au début quand je l’ai connue, elle était chez OC sport dans l’équipe de Mark Turner et on avait voulu faire une course en double mais Mark n’avait pas voulu, en prétextant que ce n’est pas une croisière. Du coup on l’avait très mal pris et en 2010, quand je l’ai embarquée sur Savéol dans la transat AG2R, on a failli gagner. On passe les Canaries en tête et on avait à cœur de prouver qu’on était efficaces car en duo, on est très complémentaires et on finit 4e. Même si on n’a pas la même façon de naviguer, on se complète très bien, on forme une belle équipe, à terre aussi."

Vous avez vos habitudes en course, vous êtes un couple dans la vie, allez-vous vous soutenir mutuellement sur ce Vendée Globe ?  
RA : "A la maison on peut se dire les choses sans les cacher, on peut parler de tous les trucs du moment qui concernent notre vie de couple, on est censé tout se dire comme dans une équipe. Malgré tout, on ne se dit pas tout mais on n’est pas rivaux.
Pendant la course on se parle quasiment tous les jours par mail, car par téléphone on ne trouve jamais le bon moment. Le mail est mieux, tu peux le relire plus tard. Elle me donne les nouvelles de la maison, car ses parents gardent Ruben notre fils pendant la course. On n’a pas le droit de se filer des infos météo, c’est interdit, et puis faire du routage pour quelqu’un, c’est compliqué, j’aurais trop peur, et elle aussi, de dire une connerie. On a donc instauré une règle : à chaque fois que l’un dit quelque chose qui pourrait être considéré comme une info météo, il ne faut surtout pas que l’autre en tienne compte.
"

Romain Attanasio et Samantha Davies confinés en Bretagne avant le départ

Et les parents de Ruben ont des ambitions dans cette course ?
RA : "On va déjà essayer de se détendre avant le départ, boire une dernière bière ensemble le dernier soir dans notre sweet home où nous sommes confinés. Et puis après, chacun ira de son côté à son bateau. Sam quittera le ponton avant moi. Au final, j’espère qu’elle va m’attendre et qu’elle va faire une course de dingue. Sam peut faire un truc de malade, je n’arrête pas de me dire ‘ne lui dis pas car ça va lui mettre la pression, et elle n’aime pas'. Moi j’espère simplement que je vais arriver, être secrètement dans le top 10 mais que c’est Sam qui m’attendra. Ça voudra dire qu’elle aura réussi son Vendée Globe."

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