Franck Lafitte, des maux aux Bleus
Les débuts
Franck Lafitte a découvert le volley à l’âge de 15 ans. Ce natif de Grenoble en 1989, qui a grandi à Echirolles, a suivi son meilleur ami, Nicolas Ninet. "C’est mon meilleur pote, on se connaît depuis qu’on a 3-4 ans, c’est le frère que je n’ai jamais eu". Il est reconnaissant envers celui qui est aujourd’hui à Lyon et avec qui les liens ne se sont jamais distendus malgré "un emploi du temps de malade". Leurs trajectoires se sont pourtant séparées très vite puisque six mois après ses débuts, Franck Lafitte rentrait au pôle espoirs à Lyon, avant de faire comme la plupart de ses coéquipiers en Bleu : intégrer le Centre National de Volley-Ball près de Montpellier.
Son parcours
Au CNVB, les choses ne sont pas très bien passées pour lui. Un épisode qu’il n’aime pas trop raconter. Après son départ, c’est à Grenoble qu’il a rebondi. Pendant un an, il évolue en Pro B et multiplie les boulots à côté. "J’ai travaillé dans le bâtiment, j’ai fait de la menuiserie. Je travaillais la nuit", explique-t-il. "Puis j’ai été contacté par Cédric Hénart, qui était en charge du centre de formation de Toulouse. C’est lui qui m’a redonné confiance en moi". S’il a du mal à se convaincre de son potentiel, le destin va lui donner un coup de pouce.
Les difficultés financières obligent le club à se séparer du central titulaire. "Je deviens titulaire du jour au lendemain, raconte-t-il, je dois ma carrière professionnelle à Cédric. Je lui en serai éternellement reconnaissant. Quand il m’a contacté pour que je vienne, il m’a demandé de venir deux, trois jours. J’ai logé chez un ami, Maxime Poyet, qui m’a fait visiter la ville et montré que le club était sérieux". "Cédric m’a fait croire en moi. Aujourd’hui, il continue à faire jouer des jeunes alors que c’est plutôt rare en Ligue A". Après le Spacer’s, Franck Lafitte a pris la direction de Montpellier pendant quatre ans où Arnaud Josserand l’a rappelé alors qu’il sortait d’une grosse blessure. Après son départ de Montpellier, Franck Lafitte joue désormais à Sète depuis cet été.
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Les blessures
La carrière de Franck Lafitte n’a jamais été linéaire en raison des blessures qui ont failli le faire raccrocher alors qu’il débutait à peine. Au CNVB, à 18 ans, il est stoppé net par une hernie discale. Après son départ du CNVB, il se refait une santé et un moral du côté de Montpellier jusqu’en janvier 2010, où il "s’éclate le genou droit". "Je me suis arraché l’os en dessous de la rotule", se rappelle-t-il. Résultat, dix mois d’arrêt. Un an et demi plus tard, il se fait les croisés du même genou après avoir vécu son premier été en Bleu. "Je me rappelle du jour. C’était le 27 septembre lors d’un entraînement". S’en suivra une saison blanche et une nouvelle rééducation. Ces épreuves lui ont forgé un mental en béton. "Après la première blessure, j’avais à cœur de revenir, je me suis vraiment bagarré", décrit celui qui n’a pas pu marcher normalement pendant deux mois.
La seconde a été dure. "Ça trotte dans la tête, tu te retrouves tout seul, tu ne fais rien de tes journées. La grosse blessure, c’est une petite mort, comme la retraite". Alors deux... "Si tu ne décides pas que tu vas aller mieux…", avoue-t-il. Son entourage a été essentiel, le staff médical de Montpellier aussi. Après sa première blessure, il avait fait sa rééducation au CERS à Cap-Breton. La deuxième sera faîte à Montpellier où Jean-Paul André, qui est aussi le kinésithérapeute des Bleus, le remettra sur pied. "On l’appelle le magicien, il me sauve la vie depuis que j’ai 16 ans". A chaque fois, Franck Lafitte a su se relever, mais il admet qu’une nouvelle grosse blessure lui serait fatale. "J’arrêterai. C’est tellement dur de revenir. C’est inhumain. Je touche tous les parquets qu’il y a chez moi mais si je me blesse encore gravement, je me soignerai bien et j’arrêterai".
L’équipe de France
Franck Lafitte a rapidement intégré les équipes de France jeunes. Les cadets, puis les juniors. A l’été 2011 pour la Ligue Mondiale, il découvre les A. "Je n’ai pas de souvenirs précis, c’était un peu bizarre, parce que je n’étais vraiment pas installé. Mais j’ai retrouvé Earvin (Ngapeth, ndlr), Kevin (Tillie, ndlr), donc je n’allais pas cracher dans la soupe". Sa blessure au lendemain de ce premier été avec les Bleus l'éloigne de l'équipe de France. Là encore, on va lui tendre la main. "Laurent Tillie a une place importante, il m’a offert une nouvelle chance". Franck Lafitte salue le travail du sélectionneur qui conçoit "équipe et le coach comme un partenariat". "Il a su créer une alchimie entre des joueurs exceptionnels".
Plus gêné par les blessures, il a su faire sa place. Même s’il joue peu, il profite des quelques minutes qui lui sont offertes. "Je suis troisième central, je dois amener mon énergie pour rebooster l’équipe. Je fais 2,03m, je suis un peu petit pour un central au niveau international, mais j’ai une grande gueule et j’amène beaucoup d’énergie. Quand je rentre, c’est que ça va mal", déclare-t-il. Aucune frustration chez le joueur - "chacun connaît son rôle, il n’y a pas d’ego, on est tous tourné vers l’objectif JO" - plutôt la joie de faire partie de cette équipe. "C’est le truc qui me tient à cœur". Encore plus après un été 2015 à rallonge mais couronné de deux triomphes, la Ligue Mondiale et l’Euro.
Le retour en club
"Pour tout te dire, je ne sais toujours pas si j’ai atterri", avoue Franck Lafitte. Le dimanche 18 octobre, la France venait à bout de la Slovénie en finale, "le mardi, je déménageais à Sète, mercredi je participais à mon premier entraînement et jeudi on jouait à Lyon", raconte le central. Tout s’est enchaîné très vite, il a fallu gérer la fatigue nerveuse et physique. "En revenant avec les deux médailles, tout est décuplé. L'attente de ton club, de tes coéquipiers". L’engouement populaire aussi. "Lors de ce premier match à l’extérieur à Lyon, je n’ai pas pu discuter avec mes parents, ni avec mon meilleur pote, Nicolas, qui étaient venus. Enfin seulement cinq minutes, parce que les gens voulaient prendre des photos". A Sète, c’est encore plus fort. A chaque match à domicile, le Barou, la salle de l’Arago, menace d’exploser. "A Sète, il n’y a que le foot et le volley", souffle Lafitte.
La musique
Après le volley, la musique est la grande passion de Franck Lafitte. "La première chose que je fais quand je rentre chez moi, c’est allumer ma chaîne hi-fi", lance-t-il. Avant de se plonger dans le volley, il a fait parti de plusieurs groupes. "Quand j’étais ado, je n’avais pas un rond pour m’acheter une guitare, mais j’en faisais 6 heures par jour. Maintenant, j’en ai une petite dizaine et mais je n’ai plus le temps de ‘gratter’", résume-t-il. Le central est un mélomane qui écoute "vraiment de tout : Led Zeppelin, Radiohead, du jazz, de l’électro".
Il a 500 disques chez lui et sa bibliothèque iTunes déborde. "Elle prend beaucoup trop de place sur mon ordinateur", sourit-il. La musique permet à celui qui se décrit "comme quelqu’un de très indépendant, mais incapable de vivre tout seul" de se retrouver. C’est son moment. "J’aime la collectivité, je suis malheureux tout seul, mais j’ai besoin de mon indépendance. C’est très paradoxal. J’aime évoluer au sein d’un groupe, être avec mes potes, mais avoir des responsabilités et agir sur sa propre vie, c’est essentiel pour moi".
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