: Reportage Tour de France femmes 2022 : au cœur de la caravane publicitaire qui a trouvé son public malgré sa formule réduite
Pour le premier Tour de France femmes depuis 1989, la caravane publicitaire est au rendez-vous, avec un dispositif spécial, bien différent de ce que le public a l'habitude de voir.
Plusieurs dizaines de véhicules sur un parking, des tasses géantes, des poules géantes pour Le Gaulois, une maison géante pour Century 21, les personnages d'Astérix et un Mickey géant... Il y a une semaine, la plupart était sur le Tour de France hommes. Aujourd'hui, ils animent le parcours du Tour de France femmes, en étant bien moins nombreux. 45 véhicules au lieu de 150, ça fait une différence. Mais l'engouement autour reste le même.
Sous la grisaille rémoise, le long cortège se met doucement en place, à quelques mètres en amont de la ligne d'arrivée. Après un rapide contrôle des 45 véhicules sur le parking technique, les cents caravaniers du Tour de France femmes soignent les détails. Et s'échauffent, avant leur longue journée, au gré d'une chorégraphie, alors même que les bus des équipes passent à côté d'eux. Un joyeux bazar.
À quelques minutes du départ, alors que le soleil arrive à son tour, le public s'amasse déjà derrière les barrières. Il ne faut pas rater le premier temps fort de la journée. À l'heure du retour du peloton féminin sur les routes de l'Hexagone, le cortège publicitaire est là, malgré les contraintes. "Le Tour féminin n'a pas le même cadre administratif. Il n'y a pas de privatisation de chaussée comme chez les hommes, on a donc dû s'adapter", explique Aurélien Janssens, commissaire général en charge de la caravane publicitaire depuis 2012.
Une caravane qui innove
Là où le Tour masculin privatise la route pour plusieurs heures, celui des femmes ne peut se payer ce luxe, question de budget. "On fonctionne donc comme sur Paris-Roubaix, Paris-Nice ou Liège-Bastogne-Liège : la route est fermée en bulle autour de la caravane, puis de la course", justifie Aurélien Janssens. Au lieu de rouler avec deux véhicules de front en quinconce, qui distribuent de chaque côté de la route, la caravane du Tour féminin n'emprunte que la droite de la route, en file indienne. Au moment du départ, les spectateurs à gauche, pas à courant de cette particularité, font la moue.
Comédien de formation, mais animateur sur la caravane depuis onze ans, Yannick donne tout au micro, perché sur le char Senseo : "On est dans des tasses, mais on est dans notre assiette. Et vous, Reims, ça va ?", "C'est la caravane, c'est comme le père Noël, mais en juillet !". C'est parti pour plus de 133 km dans le vignoble champenois, avec une caravane réduite à 45 voitures et de deux kilomètres de long (contre 150 véhicules pour dix kilomètres chez les hommes). On y retrouve toutefois quasiment chacun des partenaires du Tour masculin.
"Le ticket d'entrée est moins cher que chez les hommes. Sinon, tout est pareil, notamment le cahier des charges pour les goodies. On tâtonne juste concernant la fréquentation du public, c'est la découverte."
Aurélien Janssens, commissaire général en charge de la caravane publicitaireà franceinfo: sport
Chez Senseo, on a gardé dix des vingt-cinq caravaniers du Tour. "Ça tire un petit peu mais on est tous des petits jeunes, au moins dans nos têtes, donc ça va aller jusque la Super Planche", se marre Yannick. À ses côtés, Rolland, "un petit jeune de 70 ans", enchaîne son onzième Tour : "J'ai commencé en semi-remorques, ensuite je suis passé dans la caravane au volant d'une énorme madeleine. Et aujourd'hui je conduis les tasses de café".
À la barre d'un char de sept mètres de long sur deux mètres cinquante de large, l'ancien chef d'entreprise ne tangue pas sur les petites routes empruntées par la Grande Boucle : "Tout est difficile à conduire sur le Tour, pas en terme de véhicule, mais de concentration. Il faut être à 300%". Comme ses neuf collègues de la caravane Senseo (contre 25 chez les hommes), le chef d'entreprise enchaîne avec le Tour de France femmes après le Tour masculin : "J'étais un peu inquiet sur le déroulement du Tour féminin. On entendait tout et n'importe quoi. Mais je suis super satisfait".
Le public est au rendez-vous. Pour compenser son déficit de taille, la caravane s'arrête plusieurs fois par étape au milieu de villages, pendant une dizaine de minutes. Les forces de l'ordre guident les véhicules qui s'alignent magiquement sur une place. Le public afflue et déambule au milieu des véhicules d'où pleuvent les goodies.
"C'est très intéressant à faire, on a un vrai échange direct avec le public. C'est super convivial. Et il y a même des gens qui nous font des cadeaux. Les Champenois ont été très généreux d'ailleurs : ils nous ont donné quelques bulles qu'on va déguster ce soir en pensant à eux."
Yannick, membre de la caravane publicitaireà franceinfo: sport
Directeur de la caravane Senseo, Dimitri valide lui aussi cette nouveauté, mais il précise : "C'est bien, ça casse le rythme, ça permet de voir un peu plus le paysage que chez les hommes. Le concept est très bien, mais on ne pourrait pas le mettre en place chez les hommes. Parce que là on est que 45 véhicules, pas 150 !".
Avec ses 14 années d'expérience dans la caravane, il mesure la ferveur qui entoure la première édition de ce Tour de France femmes : "On ne pensait pas voir autant de monde. Les villes et régions ont bien communiqué. C'est incroyable !" Les sirènes policières retentissent, le défilé repart.
Avis au public : la caravane féminine s'arrête sur plusieurs fan zone chaque jour pour organiser des distributions d'une dizaine de minutes.
— Adrien Hémard-Dohain (@AdrienHemard) July 26, 2022
Sinon, cela se passe uniquement sur la droite des routes. #TDFF pic.twitter.com/TN0Ss9nVfr
Au total, huit pauses seront ainsi effectuées sur l'étape du jour, avec à chaque fois plus de monde, et plus d'ambiance. Après quatre heures de défilé à 37 km/h de moyenne, le cortège publicitaire donne tout sur la ligne d'arrivée. "Il ne doit plus rien nous rester, faites du bruit", hurle Yannick.
Solidement harnaché, le comédien vient de passer quatre heures debout, à danser dans tous les sens. Les caravaniers ont peu de repos. Une fois la ligne franchie, le travail n'est pas tout à fait fini. Le cortège file vers un parking à l'écart, où il faut nettoyer les chars avant de les monter sur les camions-plateaux.
Au moment de vider le sien, Yannick a toutefois le sourire : il sort trois bouteilles de champagne que le public lui a tendues. "On reviendra !", lance-t-il. Et sûrement plus fort, confie son chef Dimitri : "On est dépassé par l'engouement. On sera plus ambitieux l'année prochaine".
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