Tour de France 2021 : Julian Alaphilippe, un Tour haut en couleur avec le maillot arc-en-ciel ?
Le puncheur français aborde la Grande Boucle avec le maillot de champion du monde sur les épaules, et des ambitions à la hauteur. Forcément.
Pour Julian Alaphilippe, l'année 2021 a une saveur particulière, de celles qui font les grands millésimes. Sacré champion du monde en fin de saison dernière, le Français goûte au bonheur de passer une saison avec le maillot arc-en-ciel sur les épaules, quelque chose de "vraiment spécial". En plus de cela, "Alaf" vient de devenir père d'un petit Nino, "le plus beau moment de [sa] vie, (…) une émotion unique qui donne beaucoup d'énergie", assure-t-il. D'un point de vue sportif, le Français déguste un peu plus, malgré deux victoires cette saison : sa troisième Flèche Wallonne et une étape sur Tirreno-Adriatico.
L'arc-en-ciel et la pancarte
Souvent placé, rarement gagnant, Alaphilippe a les jambes, mais pas les résultats, à l'image de sa deuxième place sur Liège-Bastogne-Liège, devancé d'un cheveu par Tadej Pogacar. En plus de sa réputation de puncheur, le Français paye son statut de champion du monde qui fait qu'il a, plus que jamais, la pancarte de favori dans le dos et qu'il est donc étroitement surveillé par ses adversaires. Le tout combiné à la concurrence de plus en plus féroce de Mathieu van der Poel, qui l'a déjà privé de quelques victoires cette saison. À l'approche du départ du Tour de France, samedi 26 juin, et alors qu'il a déjà annoncé son forfait pour les Jeux olympiques, où il aurait été le leader des Bleus, quelles peuvent donc être les ambitions de Julian Alaphilippe sur la Grande Boucle ?
"L'objectif sera de remporter une victoire d'étape. Lever les bras sur la plus grande course du monde avec le maillot de champion du monde sur les épaules, serait quelque chose de vraiment spécial."
Julian Alaphilippeen conférence de presse
"La première semaine sera importante avec plusieurs opportunités. Nous donnerons le maximum comme nous l'avons toujours fait. Un Tour réussi serait une belle victoire d'étape pour moi et de montrer de belles choses avec l'équipe", a sobrement assuré le Tricolore en conférence de presse la veille des Championnats de France à Epinal, où il a pris la 37e place. Mais on a le droit de ne pas le croire, ou en tout cas de penser qu'il minimise volontairement son appétit sur ce Tour 2021. Ne serait-ce que parce qu'entre Alaphilippe et la Grande Boucle, la belle histoire dure depuis quelques années : meilleur grimpeur et vainqueur de deux étapes en 2018, 14 jours en jaune, à nouveau deux étapes remportées et 5e au général en 2019, une étape et trois jours en jaune en 2020.
Les plus optimistes sont alors tentés de dire qu'Alaphilippe pourrait viser le classement général du Tour, et pourquoi pas dès cette année, vu le parcours moins montagneux et davantage taillé pour ses qualités, sur le papier. À l'automne dernier, le Français n'a d'ailleurs pas caché qu'il "rêvait" de gagner le Tour. Mais cela n'arrivera peut-être jamais. Non pas qu'Alaphilippe n'ait pas les qualités pour jouer le général, mais plutôt parce que cela passe par un cyclisme de contrôle, tout en calcul, qui ne lui correspond pas forcément. D'ailleurs, sa prolongation de contrat jusque 2024 avec la Deceuninck-Quick Step en témoigne, puisqu'on parle d'une équipe intraitable sur les courses d'un jour, mais pas pensée pour contrôler un Grand Tour.
L'exemple de Joao Almeida au Giro 2020 le prouve. Après avoir longtemps tenu le maillot rose, le Portugais a lâché prise dans les derniers jours. Comme Alaphilippe au Tour de France 2019. Et si la Quick Step décide de se métamorphoser dans un futur proche, ce sera peut-être davantage pour favoriser les desseins de son prodige belge, Remco Evenepoel.
En jaune, mais jusqu'où ?
Porteur du maillot jaune à 17 reprises, Julian Alaphilippe ne devrait donc pas viser le général. À moins qu'il ne cache son jeu. "C'est toujours difficile de mettre Julian dans une catégorie ou un rôle attendu. Il est tellement surprenant qu'il arrive encore à nous surprendre, à surprendre ses adversaires", sourit son sélectionneur en équipe de France, Thomas Vœckler. "Le début de Tour en Bretagne, où il fera partie des favoris, sera riche d'enseignements sur ses intentions. On a envie de le voir à l'œuvre dès le début." Les deux premières étapes bretonnes avec leurs arrivées en bosse semblent idéales pour le puncheur français. De là à refaire le coup d'Epernay en 2019, quand il avait pris le maillot jaune au soir de la 3e étape en attaquant dans les coteaux champenois ?
"Je ne serais pas surpris qu'il refasse une petite période en jaune, d'autant qu'il est très performant en chrono. Il ne s'interdira rien. Et puis je n'ai pas de statistiques là-dessus, mais en général un jeune papa tourne toujours bien sur le vélo."
Thomas Vœcklerà franceinfo: sport
Et si le jaune échappe à Alaphilippe en Bretagne, il aura une nouvelle chance lors de la 7e étape marathon entre Vierzon et le Creusot, avec un final escarpé après 249 km de course. "Finalement, son plus gros problème, c'est qu'il a été cinquième du Tour, qu'il est champion du monde, donc qu'il sera encore plus surveillé", conclut Vœckler. Ce qui pourrait l'empêcher de jouer la gagne sur certaines étapes, les grosses écuries se méfiant de lui pour le général même si, a priori, le Français n'en fait pas un objectif. Et ce n'est peut-être pas plus mal.
Car après avoir espéré depuis 1985 un successeur à Bernard Hinault au palmarès du Tour, via Thibaut Pinot et Romain Bardet entre autres, le public tricolore peut s'enthousiasmer grâce au panache d'Alaphilippe, sans que ce dernier n'ait besoin de viser un général qu'il pourrait ambitionner, mais qui irait à l'encontre de son cyclisme offensif. À moins que l'imprévisible puncheur n'ait décidé de nous surprendre encore cette année. Après tout, il "rêve" du Tour, alors pourquoi pas nous ?
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