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Tournoi de Madrid : votre terre battue, vous la préférez bleue ou à point ?

Le tournoi de Madrid se disputera dans quelques semaines sur terre battue… azur. Une révolution pour la petite balle jaune, mais une tendance de fond dans ce sport moins conservateur qu'il n'y paraît.

Article rédigé par Pierre Godon
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
La terre battue qui fait scandale, lors de la présentation du tournoi de Madrid, en novembre 2011.  (EFE / SIPA)

Le tournoi de Madrid (du 4 au 13 mai) n'intéresse d'habitude que les spécialistes acharnés de la petite balle jaune. Mais pour cette édition 2012, le choix de l'organisateur de changer la couleur de la surface fait polémique. La terre battue ocre va en effet se teindre en… bleu. Chronique d'un micro-scandale aux ramifications multiples.

 

Bleu c'est bleu, ça améliore le jeu

Pourquoi a-t-on décidé de passer de l'ocre au bleu intense ? Pour que les spectateurs distinguent mieux la balle, se défend le directeur du tournoi. Pour être raccord avec la couleur du principal sponsor, la Mutua Madrileña, raillent les puristes. Quoi qu'il en soit, ça fait parler. Et si la terre battue teintée coûte quarante fois plus cher (6 000 euros la tonne contre 150 euros pour l'ocre), tout ce battage médiatique a déjà remboursé, en partie, la différence.

"Le tennis est un sport où les choses évoluent très peu, explique le directeur du tournoi, l'ancien joueur Ion Tiriac, sur le site de la chaîne américaine CNN (article en anglais). Les gens sont souvent réticents à la nouveauté, mais une fois qu'ils ont compris que ça servait à améliorer le jeu, ils commencent à l'accepter."

Les fans voient rouge

Ce que les amoureux du tennis reprochent à Tiriac, c'est la légèreté avec laquelle il cherche à rendre sexy la compétition. C'est lui qui, il y a quelques années, avait remplacé les ramasseurs de balles par des top models. Les joueurs, eux, se plaignent d'une différence dans la vitesse du court bleu par rapport au rouge, ou prétextent des considérations bassement esthétiques, comme Samantha Stosur, ancienne finaliste à Roland-Garros : "Je ne veux pas de bleu sur mes vêtements", explique-t-elle à The Tennis Space (article en anglais).

Mais c'est oublier un peu vite qu'il n'y a pas cinq ans, le tournoi de Madrid se disputait sur dur, en fin de saison ; qu'il y a huit ans, il n'intéressait pas grand monde ; qu'il y a dix ans, il… n'existait pas. Désormais, il fait partie des incontournables du circuit masculin.

 

La terre battue en Technicolor

Contrairement à une idée reçue, la terre battue n'est pas toujours ocre. Sa couleur vient de son mode de fabrication (brique pilée, mâchefer et calcaire). Mais aux Etats-Unis, on joue sur une terre battue verte depuis les années 70, qui répond au doux nom de Har-Tru, légèrement plus dure et plus rapide que la surface rouge de Roland-Garros.

Des expérimentations comme celle de Madrid sont encouragées par l'Association du tennis professionnel, l'organisme qui chapeaute le circuit tennistique, qui "estime que c’est une bonne chose que nos tournois cherchent à innover" . Des courts violets ou rayés bleu et blanc sont donc envisageables, et la terre battue rose rempacera l'ocre à Roland-Garros lors de la méconnue journée internationale des femmes, le 7 juin. 

Un court noir a déjà été expérimenté, mais pas sur terre battue, au tournoi indoor de Bilbao (Espagne), note le site spécialisé Pop & Sport. Là encore, le confort visuel des spectateurs a été invoqué, au point de demander aux joueurs de porter des vêtements de couleur claire. D'ici à ce qu'on joue avec de la lumière noire et des habits fluorescents…

 

Le gazon en voit de toutes les couleurs

Rafael Nadal, farouchement opposé au changement de couleur du tournoi de Madrid, a souhaité sur Twitter ne jamais avoir à jouer sur de l'herbe bleue. Pourtant, le rugby s'y est déjà mis : les publicités peintes au milieu du terrain lors du Tournoi des six nations ont donné des air très "combat de paintball" à certains matchs.

Le joueur du XV de France Thomas Lièvremont, couvert de peinture à cause d'une publicité au centre du terrain, à Dublin, en 1999. (PATRICK KOVARIK / AFP)

Il y a surtout le terrain bleu des Broncos, où évolue l'équipe universitaire de foot américain de Boise City (Oklahoma). Un changement de couleur amorcé dans les années 80 pour faire connaître le club. Dommage collatéral ou légende urbaine, son entraîneur a affirmé en 2007 avoir retrouvé sur le gazon bleu un cadavre de canard, qui avait cru plonger dans un étang.

Le terrain bleu du Bronco Stadium, à Boise, dans l'Idaho, aux Etats-Unis. (OTTO KITSINGER III / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Mais outre le tennis, d'autres sports à petite balle s'y sont mis, comme le hockey sur gazon, là aussi pour que le téléspectateur puisse suivre l'action plus facilement. Comme les Jeux olympiques de Londres se dérouleront sur terrain bleu, les favoris ont choisi de s'entraîneur dans les conditions réelles, comme la Nouvelle-Zélande, la Belgique ou la Grande-Bretagne

 

Et si le Tournoi de Madrid avait raison ? Les Grand Chelem d'Australie et des Etats-Unis ont changé la couleur de leur ciment de vert à bleu au milieu des années 2000. Alors, à quand Roland-Garros en mode Schtroumpf ?

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