Réponses aux critiques sur un reportage d'Envoyé Spécial à Gaza

Le médiateur de France Télévisions répond au site InfoEquitable qui a émis des critiques sur une séquence d'un reportage d'Envoyé Spécial, où une femme palestinienne découvre que son immeuble a été bombardé et que sa famille est morte sous les décombres.
Article rédigé par franceinfo - Jérôme Cathala, médiateur de France Télévisions
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 8min
Elise Lucet présente le magazine de France 2 "Envoyé spécial". (NATHALIE GUYON)

Une séquence du reportage "Les enfants dans l'enfer de Gaza", diffusé le jeudi 18 avril dans Envoyé Spécial, a été jugée "très problématique" par le site InfoEquitable qui a saisi le médiateur de France Télévisions. Après analyse des conditions de fabrications, le médiateur de France Télévisions répond précisément sur les faits et conclut que le reportage signé par Pierre Monégier a été réalisé de façon parfaitement honnête et professionnelle, à partir d’éléments dont les sources sont claires et indiquées dans le générique de fin du magazine. De façon tout à fait exceptionnelle, le reportage s’est même livré à un très rare exercice de transparence : montrer toutes les personnes ayant transmis des images, journalistes gazaouis ou humanitaires occidentaux.

Le médiateur de France Télévisions répond, point par point, au courrier adressé par InfoEquitable.

"Quand France Télévisions diffuse (sans le dire) les vidéos du Hamas" :  ceci est mensonger et diffamatoire.

Pour rappel, il existe bien des "vidéos du Hamas". Il s’agit de vidéos de propagande incluant des images martiales, ou ce que le Hamas présente comme des "preuves de vie des otages" telle que celle diffusée ici ces derniers jours. Ces vidéos sont filmées, montées et diffusées par le Hamas, essentiellement via sa chaîne Telegram. Il n’y a absolument aucun rapport entre ces vidéos du Hamas et la scène brute diffusée dans Envoyé Spécial, qui a été filmée par un cameraman travaillant pour la télévision turque TRT et vérifiée puis diffusée par Envoyé Spécial. Même en multipliant les raccourcis et les approximations, qualifier ces images de "vidéos du Hamas" n’a absolument aucun sens, et relève de la désinformation.

"Une séquence choc d’une femme palestinienne en pleurs a été tournée par un caméraman du Hamas. Sans que les téléspectateurs en soient informés" : ceci est mensonger et diffamatoire.

Comme indiqué, la vidéo en question a été filmée par un caméraman de la chaîne turque TRT (d’ailleurs créditée en fin d’émission pour ces images), qui travaille aussi ponctuellement pour la quasi-totalité des médias mondiaux sur Gaza et notamment Al-Jazeera, CNN, la BBC et, ici Envoyé Spécial qui a racheté ces images et lui a commandé d’autres séquences. La chaîne turque TRT présente d’ailleurs le caméraman en question comme son caméraman sur place, comme on le voit dans ce tweet officiel de la TRT. 

"Mohamed Ahmed intervient dans le reportage pour authentifier la séquence vidéo" : c’est faux.

La vidéo a été authentifiée par Envoyé Spécial, notamment en croisant plusieurs sources vidéos (la même scène a été filmée par plusieurs vidéastes professionnels ou amateurs qui l'ont diffusée sur leurs réseaux sociaux). Envoyé Spécial a également retrouvé la femme en question 15 jours après cette séquence, dans le cadre de ses démarches de vérifications et d'authentification, et diffusé cette interview de 5 minutes sur les réseaux sociaux de l'émission, toujours par souci de transparence.

S'agissant du caméraman, il n'intervient que par souci de transparence envers les téléspectateurs : le reportage dans son ensemble fait d'ailleurs la démarche exceptionnelle de montrer toutes les personnes ayant transmis des images, qu'ils soient journalistes gazaouis (comme ici et comme un second caméraman) ou humanitaires occidentaux.

"Pourquoi l’émission Envoyé Spécial ne précise-t-elle pas l’employeur de l’homme qui lui a fourni la vidéo ?" : cela est précisé en fin de reportage.

L’employeur principal de l’homme qui fournit la vidéo est la chaîne turque TRT, qui est créditée en fin de reportage. Par ailleurs, le caméraman a été pour ce tournage missionné par Envoyé Spécial en qualité de pigiste. Cette question est donc doublement problématique : son employeur principal (TRT) est bien mentionné, et cela n’apporte aucune information particulière pour le reportage.

"Malgré cela, le document vidéo transmis par le journaliste de l’agence Shehab, Mohamed Ahmed, a été considéré comme fiable et ne nécessitant guère plus de vérifications" : cela est  faux, à de multiples titres.

Mohamed Ahmed n’est pas journaliste à l’agence Shehad comme rappelé précédemment mais employé principalement par la chaîne turque TRT. De plus, la vidéo en question a été vérifiée par recoupement avec d’autres vidéos prises le même jour au même endroit par plusieurs vidéastes professionnels et amateurs, ainsi que par le témoignage en longueur de la protagoniste principale, réalisé à la demande d’Envoyé Spécial 15 jours après le bombardement. Toutes les vérifications possibles ont été effectuées.

"Le reportage d’Envoyé Spécial n’a pas été en mesure de préciser la date exacte du bombardement de l’immeuble dans lequel habitait Mme Baalosha ainsi que sa localisation précise, ce qui aurait permis d’authentifier la séquence et d’en savoir plus" : cela est faux.

La date du bombardement est mentionnée dans le reportage, ainsi que la localisation (Gaza City) comme il est d’usage. La date, l’heure, les circonstances et le lieu exacts sont à nouveau rappelés en détail dans l’interview de vérification de la protagoniste principale, mentionnée plus haut, et qui a d’ailleurs été exceptionnellement diffusée par Envoyé Spécial sur les réseaux sociaux de l’émission après la diffusion du reportage, à nouveau par souci de transparence.

"Envoyé Spécial n’a semble-t-il pas cherché non plus à contacter les services du porte-parole de l’armée israélienne pour essayer d’obtenir des informations sur les raisons du bombardement de cet immeuble" : c'est encore une fausse affirmation

Envoyé Spécial a contacté à plusieurs reprises et notamment par écrit, en donnant plusieurs jours de délai et en précisant sa deadline et la date de diffusion de l'émission, les services du porte-parole de l’armée israélienne pour obtenir des informations sur les différents bombardements mentionnés dans le reportage. Malgré plusieurs relances, l'équipe d'Envoyé Spécial n’a eu aucune réponse.

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