A Paris, "pas besoin d'être turc pour s'intéresser à la cause turque !"
Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées hier soir dans le quartier des Halles, en solidarité avec le mouvement de contestation en Turquie.
Il n'y a pas qu'à Istanbul ou Ankara que les Turcs mécontents descendent dans la rue. Plusieurs centaines de personnes ont manifesté mardi 4 juin, à Paris, à la fontaine des Innocents (1er arrondissement), pour soutenir le mouvement de contestation contre le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan. Reportage.
La communauté turque et des sympathisants
"C'est une manifestation inédite." Umit Metin est coordinateur de l'Assemblée citoyenne des originaires de Turquie (Acort). Il revendique "un large rassemblement, avec des personnes venant de tous horizons, pas seulement des Turcs vivant en France". Le but de ce premier rassemblement parisien est clairement établi : "Alerter l'opinion publique française et faire pression sur le gouvernement turc."
Serra Torun est étudiante à Nanterre, près de Paris. Elle souligne l'hétérogénéité des participants aux manifestations en Turquie : "Des jeunes, des vieux, des chômeurs, des cadres..." Depuis la France, elle soutient le mouvement via internet et les réseaux sociaux et participait à la manifestation de mardi soir. Tout comme Jeanne, "citoyenne du monde et citoyenne française", qui affirme sur Facebook que "tout le monde a le droit d'être en désaccord avec le gouvernement et de le faire savoir, et d'essayer d'obtenir raison".
Basak, 22 ans, est là pour dénoncer une accumulation de violences et d'atteintes à la liberté d'expression. "Le pianiste Fazil Say a même été condamné pour avoir cité sur Twitter des vers d'un poème", rappelle-t-elle. Même amertume chez deux autres manifestantes françaises, Hélène et Anastasie : "Nous sommes ravies de voir que les gens se mobilisent pour des questions qui dépassent nos frontières mais qui nous concernent aussi. Il n'y a pas que les allocations familiales qui font parler !", témoignent ces deux sœurs.
Des associations de défense des droits de l'homme
C'est un message auquel s'associe Geneviève Garrigos, présidente d'Amnesty International France. "La solidarité est primordiale, sinon, la répression de la contestation turque restera une affaire interne." Selon la militante, jointe par francetv info, la pression exercée sur le gouvernement turc a des chances d’aboutir car "la Turquie est soucieuse de son image à l’international".
C’est bien la violence de la répression que dénonce l’association de défense des droits de l’homme : "Le recours aux lances à eau est disproportionné, les gaz lacrymogènes sont utilisés à bout portant..." A Istanbul, le bureau turc d’Amnesty International a été mis à la disposition des médecins alors que les secours ne parvenaient pas à arriver jusqu'à la place Taksim.
Des partis politiques
La manifestation est également soutenue par des partis de gauche, du PS à Europe Ecologie-Les Verts en passant par le Front de gauche et le Nouveau Parti anticapitaliste. Roseline Vachetta est membre de la direction de ce parti et ancienne députée européenne. La raison de la participation du NPA est, pour elle, évidente : "Exprimer notre solidarité, cela nous paraît être le minimum face à la répression de ces manifestations qui nous révolte."
Elle voit dans ce mouvement turc des points communs avec des problématiques qui touchent la France. "Les manifestations ont commencé contre le projet de transformer un parc en centre commercial. Un combat contre un projet inutile qui ne sert qu’aux riches, et qui nous fait penser à Notre-Dame-des-Landes", le projet d'aéroport situé près de Nantes.
Reste à savoir comment le mouvement s'organisera pour porter plus loin ses revendications. Les prochaines élections en Turquie sont prévues en 2014. Mais d'ici là, "le gouvernement pourrait peut-être faire passer quelques réformes pour calmer la situation", envisage Esther Benbassa, sénatrice Europe Ecologie-Les Verts née à Istanbul. Qui tient à préciser : "Pas besoin d'être turc pour s'intéresser à la cause turque !"
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