Les Eagles of Death Metal à l'Olympia : "Pour les victimes, ce concert peut être très violent"
Environ 900 rescapés du Bataclan assisteront mardi soir au concert du groupe américain à l'Olympia. Un événement qui intervient "trop tôt" dans le processus de reconstruction psychologique des victimes du 13 novembre, juge la psychologue Carole Damiani.
Un concert comme aucun autre. Trois mois après les attentats de Paris, les Eagles of Death Metal "terminent", dans la mythique salle de l'Olympia à Paris, mardi 16 février, leur concert "débuté" le 13 novembre au Bataclan. Tous les rescapés ont été invités : pas moins de 900 d'entre eux devraient répondre présents. Mais pour la psychologue Carole Damiani, directrice de l'association "Paris aide aux victimes", ce concert symbolique survient "trop tôt" dans le processus de reconstruction psychologique des victimes.
Francetv info : Comment les victimes du Bataclan seront-elles accompagnées le soir du concert ?
Carole Damiani : Il y aura une anticipation. Les personnes qui le souhaitent pourront visiter la salle avant le début de l'événement. Ensuite, l'idée est de ne pas les laisser seules pendant le concert. Si certains ressentent le besoin de sortir au milieu du spectacle, ils ne seront pas seuls, il y aura des psychologues pour les accompagner. Puis, il y aura un "service après-vente" du concert : ils ne vont pas sortir tout de suite après la fin, et dans le suivi psychologique, on reviendra dessus, car ce n'est pas rien.
Votre association "Paris aide aux victimes" sera-t-elle présente ?
Non, nous n'y serons pas. J'ai demandé à ce que ce soient d'autres psychologues. Nous sommes justement dans le suivi, et pour bien être dans le suivi, il ne faut pas être plongé dans l'émotion du moment. Nos psychologues doivent pouvoir garder une capacité de recul.
Ce spectacle peut-il constituer une étape du processus de guérison ?
Il n'est pas le temps des victimes. Il vient trop tôt ! Un concert ne peut pas apporter autre chose qu'un concert. Certains pensent que c'est un passage obligé, d'autres y vont par solidarité… Mais nous les mettons en garde : "Demandez-vous pourquoi, vous, vous y allez. Réfléchissez-y." En tout cas, je leur recommande de ne pas y aller seul, mais d'être accompagné.
D'autres ont ce sentiment qu'il faut finir quelque chose, que cela va les aider à guérir. Nous disons attention : ça peut n'être qu'une illusion. Le concert peut, au contraire, les replonger dans ce qu'ils ont vécu. Pour guérir, il faut contenir l'événement par les mots, les paroles. Or la musique fait appel aux émotions. Certains ne se rendent pas compte que cela peut être très violent, car la musique porte sur le registre du pur sensationnel, du pur émotionnel.
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