Pris à haute dose, le baclofène est plus dangereux que les autres traitements de l'alcoolo-dépendance
Le baclofène, médicament utilisé à l'origine pour traiter les affections neurologiques, bénéficie depuis trois ans d'une dérogation pour être utilisé dans la prise en charge de l'alcoolo-dépendance. Pris à fortes doses, il pose des problèmes de sécurité, selon une étude.
S'il est consommé en forte quantité, le baclofène est plus dangereux que les autres traitements de l'addiction à l'alcool. C'est ce que révèle une étude publiée lundi 3 juillet par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS). Cette étude porte sur un peu plus de 210 000 patients qui ont commencé à prendre du baclofène pour traiter leur dépendance à l'alcool entre 2009 et 2015. Elle a été réalisée en collaboration avec l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
Le baclofène est à l'origine un principe actif destiné à traiter les affections neurologiques. Depuis 2014, il bénéficie d'une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) délivrée par l'ANSM pour être aussi utilisé dans la prise en charge des patients alcoolo-dépendants. Initialement de trois ans, cette RTU a été prolongée d'un an en mars 2017 Cette utilisation du médicament a fortement augmenté depuis son autorisation, note l'étude. Ainsi, entre 2009 et 2015, deux personnes sur trois ayant débuté un traitement par baclofène l'ont fait pour une autre indication que celle de l'autorisation de mise sur le marché, principalement dans le traitement de la dépendance à l'alcool.
Jusqu'à 2,7 fois plus de décès avec le baclofène
La prise de baclofène dans le cadre d'un traitement de la dépendance à l'alcool n'est cependant pas sans poser des problèmes de sécurité. En effet, les risques d'intoxication, d'épilepsie et de mort inexpliquée sont d'autant plus fréquents que les doses prescrites sont élevées. Ainsi, en-dessous de 75 mg/jour, le risque d'hospitalisation est entre 9% et 12% supérieur à celui des autres traitements. En revanche, entre 75 et 180 mg/jour, le risque d'hospitalisation est plus important de 15% et le risque de décès est 1,5 fois plus élevé. Cette posologie concernait 16% des patients en 2014. Enfin, au-delà de 180 mg/jour, le nombre d'hospitalisations est en hausse de 46% et le risque de décès est multplié par 2,7. Cependant, seuls 1% des patients prennent plus de 180 mg de baclofène par jour. Par ailleurs, toute posologie confondue, quatre patients sur cinq arrêtent leur traitement au baclofène au cours des six premiers mois d'utilisation.
Face à ces données, l'ANSM estime que le baclofène a "un profil de sécurité préoccupant" lorsqu'il est utilisé en dehors de l'autorisation de mise sur le marché neurologique, surtout à fortes doses. L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé compte donc "engager dès à présenter une révision de la recommandation temporaire d'utilisation du baclofène dans l'alcoolo-dépendance, notamment en ce qui concerne les doses administrées". En effet, la posologie maximale autorisée est actuellement de 300 mg/jour. Enfin, les résultats de l'étude seront pris en compte dans le cadre du dossier de demande d'autorisation de mise sur le marché du baclofène dans le traitement de l'alcoolo-dépendance, annonce l'ANSM. Ce dossier est actuellement en cours d'évaluation par cette agence.
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