Affaire Cahuzac : retour sur quatre mois de mensonges
Après des mois de démentis formels, l'ancien ministre du Budget a avoué détenir un compte à l'étranger, mardi.
Jérôme Cahuzac a avoué. Après des mois de rebondissements, l’ancien ministre du Budget a reconnu sur son blog, mardi 2 avril, avoir détenu un compte bancaire à l’étranger.
Il explique avoir donné l’information aux juges en charge de l’affaire, lors d’un entretien au pôle financier du tribunal de grande instance de Paris. Il a été mis en examen pour blanchiment de fraude fiscale dans la foulée. L’existence de ce compte avait été révélée le 4 décembre par le site d'information Mediapart. Jérôme Cahuzac avait jusque-là formellement démenti.
Francetv info reprend le fil de quatre mois de mensonges.
1Acte 1 : "Je n’ai jamais eu de compte à l’étranger"
Après un premier démenti dès la publication de l’article de Mediapart et l’annonce d’un dépôt de plainte pour diffamation, Jérôme Cahuzac proteste une nouvelle fois de son innocence le 5 décembre, lors d’un entretien avec le président de la République et le Premier ministre.
L’après-midi, c’est devant l’Assemblée nationale qu’il s’exprime. "Je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte à l’étranger, ni maintenant, ni avant", lance le ministre du Budget sous les applaudissements de la majorité.
2Acte 2 : la contre-attaque, "preuves" à l’appui
Après le démenti du ministre, Mediapart pousse son avantage en publiant un enregistrement sonore le 5 décembre en fin de journée. On y entend un homme présenté comme le ministre s’inquiéter de l’existence d’un compte en Suisse. Le lendemain, Jérôme Cahuzac contre-attaque sur RTL en mettant en cause les sources éventuelles de Mediapart.
Première cible du courroux ministériel, un agent du fisc du Sud-Ouest, Rémy Garnier. En 2008, ce dernier avait adressé à sa hiérarchie un mémoire dans lequel il évoquait "un compte bancaire à numéro en Suisse" ouvert par Jérôme Cahuzac. Le ministre parle d'"un document insensé" et qualifie de fantaisiste la mention de villas à Marrakech et à La Baule.
Le ministre s’acharne ensuite à prouver la légalité du financement de son appartement parisien. Il publie alors son plan de financement sur son blog, où il explique que son apport personnel était financé par un prêt de ses parents, le "remploi de fonds" personnels de sa femme et la revente de son précédent domicile.
Enfin, il dément être l’homme de l’enregistrement. "Je ne vois même pas à quoi cela fait référence (...), ce n’est pas ma façon de parler", assure-t-il.
3Acte 3 : UBS prié de certifier que Cahuzac n’a pas eu de compte en Suisse
Mi-décembre, le ministre poursuit sa contre-offensive en annonçant avoir demandé à la banque suisse UBS, mentionnée dans l’enregistrement, de certifier qu’il n’a pas détenu de compte dans l’établissement.
Sur son blog, Jérôme Cahuzac explique que son avocat a fait une demande anonyme pour s’enquérir de la faisabilité de la démarche. Dans sa réponse, publiée par le ministre, UBS explique qu’elle n’accède pas à ce type de requête, "par principe".
"Je ne souhaite pas en rester là et c’est pourquoi j’ai confié le mandat à mon avocat et à son correspondant au barreau de Genève de bien vouloir poursuivre leurs démarches, assure le ministre. Je ne souhaite rien tant que clouer définitivement le bec des calomniateurs."
4Acte 4 : une démission qui "ne change rien"
Contraint le 19 mars à la démission par l’ouverture d’une information judiciaire contre X pour blanchiment de fraude fiscale, Jérôme Cahuzac continue d’affirmer son innocence. "Cela ne change rien à mon innocence, ni au caractère calomniateur des accusations lancées contre moi", explique-t-il sur son blog. "C’est à la démontrer que je vais désormais consacrer toute mon énergie", prévient-il.
5Acte 5 : "J'ai été pris dans une spirale du mensonge"
Mardi 2 avril, Jérôme Cahuzac avoue. Après s’être rendu au pôle financier du tribunal de grande instance de Paris, l’ancien ministre publie une longue déclaration sur son blog. "J’ai rencontré les deux juges aujourd’hui. Je leur ai confirmé l’existence de ce compte", écrit-il. Il n’indique cependant pas où se trouve ce compte.
"Je les ai informés de ce que j’avais d’ores et déjà donné les instructions nécessaires pour que l’intégralité des actifs déposés sur ce compte, qui n’a pas été abondé depuis une douzaine d’années, soit environ 600 000 €, soient rapatriés sur mon compte bancaire à Paris", poursuit-il.
Il présente ensuite ses excuses au président de la République, au Premier ministre, à ses anciens collègues du gouvernement, aux parlementaires, à ses électeurs et à sa famille. "J’ai été pris dans une spirale du mensonge et m’y suis fourvoyé. Je suis dévasté par le remords, écrit-il. Penser que je pourrais éviter d’affronter un passé que je voulais considérer comme révolu était une faute inqualifiable. J’affronterai désormais cette réalité en toute transparence."
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