Euthanasier une girafe ou des lions en bonne santé, est-ce normal ?
Le zoo de Copenhague a annoncé l'euthanasie de quatre lions, après avoir déjà abattu une girafe en février. La décision suscite l'indignation sur les réseaux sociaux, mais faut-il vraiment crier au scandale ?
Les internautes amoureux des animaux s'indignent à nouveau. Après avoir euthanasié en février Marius, un girafon en parfaite santé, le zoo de Copenhague récidive. L'établissement annonce avoir abrégé la vie d'une famille de lions, deux adultes et deux lionceaux, pour faire place à un nouveau venu.
Le phénomène n'est pas inhabituel. Dans les zoos européens, entre 3 000 et 5 000 animaux sont euthanasiés chaque année, "du têtard à la girafe", dont "quelques centaines" de grands mammifères, expliquait à la BBC (en anglais) la directrice de l'Association européenne des zoos et des aquariums (EAZA). La chaîne britannique a ainsi retrouvé le cas de cinq girafes, euthanasiées depuis octobre 2012, quatre hippopotames en 2012 ou encore 22 zèbres entre 2000 et 2012.
Est-il normal d'abattre de telles bêtes ? Francetv info pèse le pour et le contre.
Oui, pour préserver l'espèce
Pourtant en parfaite santé, Marius le girafon a été euthanasié car son patrimoine génétique n'était pas assez original, ce qui pouvait créer des problèmes de consanguinité au sein de son espèce. "Si les gènes d’un animal sont suffisament représentés, alors sa reproduction devient indésirable", justifiait le directeur scientifique du zoo de Copenhague Bengst Holst. "Nos ressources ne sont pas infinies et nous devons donner la priorité aux animaux qui peuvent contribuer à la bonne santé génétique des populations captives", expliquait l'EAZA à CNN (en anglais).
"Les zoos sont avant tout des conservatoires génétiques", confirme à francetv info Rodolphe Delord, président de l'Association française des parcs zoologiques et directeur général du Zoo Parc de Beauval (Loir-et-Cher), sans pour autant partager la méthode. "La diversité génétique est primordiable pour nos populations : c'est la seule façon de pouvoir garder des espèces viables."
Non, car des alternatives existent
En France, une telle solution ne serait pas choisie, assure Rodolphe Delord : "L'euthanasie est surtout pratiquée dans les zoos du Nord." "Cette année au zoo de Beauval, nous allons accueillir quatre femelles girafes, dont une est surreprésentée génétiquement", raconte-t-il en guise d'exemple. Pas d'euthanasie prévue, mais la pose d'un implant contraceptif.
La castration des mâles est une autre possibilité : Thoiry (Yvelines) a opté pour cette solution pour éviter toute reproduction de trois jeunes lions, précise Colomba de La Panouse-Turnbull, la directrice générale du parc, dans un entretien au Monde.
Oui, car les animaux ne s'entendent pas toujours
Si le zoo de Copenhague a cette fois-ci euthanasié quatre lions, c'est à cause de l'arrivée d'un jeune mâle dans l'établissement. Au-delà du problème de consanguinité, le zoo de Copenhague explique que le nouveau venu risquait soit d'être tué par les plus vieux, soit de tuer les plus jeunes. "Même dans la nature, si vous rapprochez un lion d'un autre groupe, c'est risqué", affirme Rodolphe Delord.
Pourquoi dans ce cas ne pas transférer ces bêtes dans un autre zoo ou un autre espace ? Pas si simple. "On ne forme pas un groupe de lions au hasard", répond Colomba de La Panouse-Turnbull. La directrice de Thoiry cite le cas de trois lions qui, faute d'entente avec un mâle fraîchement arrivé dans son zoo, ont dû être transférés dans un enclos séparé. Mais tous les établissements n'ont pas la place pour cela.
Non, parce que c'est cruel
Comme cela a été le cas avec Marius, la réaction a été immédiate sur les réseaux sociaux à l'annonce de l'euthanasie des quatre lions. Les équipes du zoo ont été comparées à des "serial killers" ou des "meurtriers", note le New York Times (en anglais). Sauf qu'au Danemark, ces euthanasies ne soulèvent pas d'émoi populaire, relevait l'AFP après la mort de Marius : "Le sentiment général ici est qu'il est normal d'avoir et de tuer des animaux tant qu'on les traite bien", expliquait un professeur de bioéthique à l'université de Copenhague.
"La culture est différente au Danemark, le zoo a même invité le public à voir la girafe se faire découper, remarque Rodolphe Delord. Les Français ne pourraient pas accepter ça et je ne me vois pas prendre une telle décision : nous n'allons pas élever un animal pour l'abattre ensuite." La position fait débat au sein de l'EAZA, note 20minutes.fr. A tel point que la moitié de la réunion annuelle de l'association, programmée fin avril en France, sera consacrée à la gestion génétique.
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