Cinquante ans après sa mort, Pablo Picasso reste un inépuisable sujet de fascination
À l'occasion des 50 ans de sa mort, Pablo Picasso (1881-1973) est célébré à travers une quarantaine d'expositions dans le monde, promettant d'explorer toutes ses facettes. "Picasso mange tout et apparemment, on a encore faim", s'amuse Olivier Widmaier-Picasso, son petit-fils, interrogé par l'AFP. Il se dit "fasciné par le nombre de conservateurs de musée, d'historiens et de chercheurs qui continuent de trouver des angles d'étude".
Les céramiques de Picasso, Picasso et le féminisme, le blanc chez Picasso, Picasso sous l'œil de célèbres photographes, le jeune Picasso à Paris, Picasso sculpteur... Le monument est conjugué à toutes les sauces dans le cadre de "son année", fêtée en France et en Espagne. Il reste "au-dessus de tous", estime Bernard Blistène, président honoraire du Centre Pompidou à Paris, louant, à l'instar d'autres spécialistes, unanimes, le "génie" du père de Guernica et des Demoiselles d'Avignon.
"La puissance dévastatrice de l'œuvre de Picasso au regard de celle des autres, l'invention permanente, la traversée de tous les grands courants de la modernité, l'expérimentation pendant plus de 80 ans (Picasso a peint jusqu'à sa mort à 91 ans), la volonté de plaire et de déplaire... Tout cela est inégalé", ajoute-t-il à l'AFP. Et après des centaines d'expositions lui étant consacrées, il reste une ressource muséale "inépuisable", renchérit Emmanuel Guigon, directeur du musée Picasso de Barcelone.
Picasso à l'ère #MeToo
Avec le mouvement #MeToo, l'image de ce monument de la peinture a toutefois été écornée par des accusations de misogynie et de violences envers ses anciennes compagnes. Ancienne conservatrice du musée Picasso, Émilie Bouvard espère que cet anniversaire marquera "le début d'un processus salutaire" sur la manière dont on aborde cet artiste "populaire", qui "a incarné un engagement dont on continue de parler et s'est présenté comme un homme proche de tout le monde et qui l'était".
"#MeToo est un coup de pied dans la fourmilière qui a du bon", estime-t-elle. "Il faut cesser de parler des femmes qui ont traversé sa vie comme de 'muses'. Certaines se sont suicidées, d'autres ont sombré dans la folie. La seule qui s'en est sortie, c'est Françoise Gilot, seule aussi à l'avoir quitté", ajoute-t-elle.
Peintre aujourd'hui installée aux États-Unis, elle a décrit Picasso comme un "être tyrannique, superstitieux et égoïste", dans un livre à succès Vivre avec Picasso, publié en 1964. "Au-delà de son machisme, Picasso est quelqu'un qui s'appropriait les choses, les êtres, les possédait avec des sentiments paroxystiques de souffrance, de douleur. Il s'est intéressé aux questions archaïques du moi et à la violence afférente avec un certain courage, mais il en faisait baver à son entourage. Aborder cette question, c'est parler autrement, mais avec justesse de Picasso", poursuit Émilie Bouvard.
"Violence" et "sexualité dans l'art" sont des thèmes abordés lors d'un cycle de conférences à Paris, tandis qu'une exposition sur Picasso et le féminisme débutera en juin au Brooklyn Museum de New York, avec comme commissaire d'exposition la comédienne Hannah Gadsby, particulièrement virulente contre Picasso dans un show à succès sur Netflix.
Moins polémique et plus festif, à Paris, le musée qui porte son nom a été métamorphosé par le styliste britannique Paul Smith. "Un pari" pour la directrice du musée, Cécile Debray, dont l'institution pilote les commémorations en France et qui "n'a pas vocation à être un mausolée". Au contraire, l'objectif est de "s'ouvrir aux débats et à la réflexion sur Picasso afin de relire l'œuvre et d'en montrer la vitalité", souligne-t-elle.
Outre les expositions, de nombreuses conférences sont prévues cette année, ainsi que l'inauguration à l'automne à Paris d'un centre de recherche, à deux pas du musée Picasso, et un symposium international au même moment à l'Unesco.
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