"Magic Hour" à Agen : Inès Longevial peint aux couleurs de ses émotions d'énigmatiques autoportraits
Peintre et dessinatrice figurative à la palette de couleurs infinie, Inès Longevial expose ses oeuvres dans un musée pour la première fois. Son exposition, "Magic Hour", regroupe une soixantaine de toiles et dessins de petits, grands et très grands formats, à l'église des Jacobins d'Agen, jusqu'au 11 septembre 2022.
Avec un goût prononcé pour les jeux d'ombre et de lumière sur les peaux, Inès Longevial privilégie l'autoportrait. La captation des visages, souvent mélancoliques et toujours féminins, lui permettent d'y plaquer des émotions, les siennes.
Son exposition, Magic Hour, est à découvrir en ce moment à Agen. Elle est composée de plus de 60 oeuvres, peintures et dessins de petits et grands formats.
Née à Agen en 1990, Inès Longevial peint depuis son enfance. Après s'être fait connaître sur Instagram, elle est maintenant représentée par la galerie Ketabi Bourdet à Paris. Depuis elle a exposé à Paris, Berlin, New York, San Francisco et Los Angeles. Elle se réjouit désormais de pouvoir exposer dans sa ville d'origine pour sa première exposition en musée. "C'est émouvant de présenter mes oeuvres ici, dans cet écrin merveilleux qu'est l'église des Jacobins. En plus, il y a de très beaux vitraux et la lumière qui les transperce joue avec mes peintures, ça crée une sorte de danse magique des couleurs", indique la peintre avec joie et enthousiasme.
La peau, nuancier infini et fascinant
Au fil de l'exposition, on passe d'un nez rose vif aux ombres verdâtres de joues arrondies, d'arcades saillantes jaune poussin au menton plus orangé, d'un sein rebondi beige sable aux cuisses gris bleuâtre. Des couleurs vitaminées et punchy qui donnent peu à peu vie à ces corps statiques. Chacune des oeuvres d'Inès Longevial est une plongée envoûtante dans le songe, tant par les choix chromatiques que les poses de ses sujets et leurs regards magnétiques.
"Pour cette exposition, j'ai choisi de parler de l'heure magique, ce moment de la journée où les peaux sont prises par le soleil. C'est un moment merveilleux que j'aime retranscrire dans mes toiles, inlassablement", explique l'artiste agenaise. Cette heure magique a notamment inspirée la série Magic Hour composée de seize mini portraits en gros plan de femmes de son entourage.
Inès Longevial manipule la couleur au fil des saisons, les tons tièdes du printemps ou froids de l'hiver. "C'est pour la couleur que je suis peintre", précise-t-elle. Son regard sur le monde et son entourage est immuablement traversé par les lumières et les demi-teintes. "J'ai une mémoire vraiment photographique des couleurs, mes souvenirs sont toujours rattachés aux émotions que j'ai pu ressentir face à elles."
"Il y a aussi cet aspect très gourmand, gustatif voire charnel dans mon travail : j'ai toujours envie de lécher la peinture, de la caresser", confie-t-elle. En amatrice d'art culinaire, l'artiste propose une peinture gourmande, suggérant le miel, la glace à la fraise ou le "creamchease".
Visage, géométrie et émotions
Pour l'artiste, le visage est le reflet du moi intérieur. Avec la volonté de ne pas figer l'âme des autres sur ses toiles, Inès Longevial choisi son propre profil pour dévoiler les milles facettes de ses sentiments. Sa moue tantôt rêveuse, maussade ou apaisée, et ses poses originales, reviennent alors sans cesse, sculptées avec une finesse toute géométrique.
En choisissant le portrait, Inès Longevial propose de "revenir à la simplicité et l'intemporalité du visage, et de s'étonner encore de ce qui n'étonne plus", comme la longueur d'un nez ou le contour d'une mâchoire. La peintre façonne les regards, entre absence et présence, et entend ainsi offrir une forme de "consolation" - tant la sienne que celle des spectateurs. "Mes tableaux mettent à disposition une présence calme et silencieuse, comme une oreille attentive ou une épaule sur laquelle se reposer."
Dessins et patchwork, nouvelle intimité des corps
Magic Hour donne également une grande part au dessin sur papier, une étape clé de sa création : "Les papiers sont une recherche intégrante de mon travail, je réalise toujours mes croquis en amont de la toile", détaille l'artiste. "C'est un côté plus intime et plus spontané de mon art" qu'elle choisi désormais de montrer.
Plus intime aussi car la finesse du papier donne l'impression d'épouser encore davantage les formes sensuelles de ses personnages féminins. Le papier lui permet ainsi de réaliser une véritable "chronique des peaux" et des chairs. Sa dernière création, Strategic Life Game, est un immense triptyque, un patchwork de 108 feuilles A4 accolées.
"Parce que" : quand Léo Walk danse sur ses toiles
Au coeur de l'exposition, une toile monumentale est étalée sur le sol de l'église des Jacobins. Parce que est une huile sur peuplier de quatre mètre sur six conçue pour un projet tout particulier : mêler la danse à ses peintures. "J'ai rencontré le danseur Léo Walk et on a tout de suite eu envie de faire un projet commun et associer nos pratiques", raconte l'artiste.
De cette idée est née une vidéo, Parce que, filmée en 2019 par le réalisateur Neels Castillon. On y voit la performance du breakdancer et chorégraphe Léo Walk, couplée à celle de la peintre, peignant ce gigantesque tableau, sur un air de Gainsbourg, dans une maison abandonnée dans le sud de la France.
"J'ai vraiment un rapport particulier avec le toucher, la matière, la texture et ça me paraissait logique avec la danse. J'avais envie que Léo piétine cette peinture." Inès Longevial considère d'ailleurs cette peinture comme une "scène, un espace scénographique, plus encore qu'une toile".
Un espace immersif dédié à la diffusion de cette vidéo dans l'église des Jacobins, clos l'exposition sur cette douce note de poésie.
Deux tableaux d'Inès Longevial seront également à retrouver à Paris, dans le cadre de l'exposition l'Eté Indien à la galerie Ketabi Bourdet, du 30 août au 1er octobre 2022.
Magic Hour jusqu'au 11 septembre 2022. Musée des Beaux-Arts, Agen. Ouverture tout public du mercredi au dimanche, de 14h à 18h. Tarif 5€.
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