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On vous présente Julie Doucet, l'autrice canadienne sacrée Grand Prix du festival de la BD d'Angoulême

Le Grand Prix de la ville d'Angoulême a été décerné mercredi 16 mars à l'autrice canadienne Julie Doucet, pionnière de la bande dessinée alternative et féministe.

Article rédigé par Laurence Houot
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
L'autrice canadienne Julie Doucet, le 15 mars 2022 à Paris.  (JOEL SAGET / AFP)

"Je dédie ce prix à toutes les autrices du passé, du présent et du futur" a déclaré très émue, l'autrice canadienne Julie Doucet, quatrième lauréate (au féminin) du Grand Prix de la ville Angoulême, après Claire Bretécher (Prix du 10e anniversaire en 1984), Florence Cestac (2000) et Rumiko Takahashi (2019).

Le grand Prix est décerné chaque année par la communauté des autrices et auteurs professionnels de bande dessinée pour saluer l'ensemble d'une œuvre. Julie Doucet l'a emporté devant Pénélope Bagieu et Catherine Meurisse, déjà finalistes en 2021. C'est l'Américain Chris Ware (Grand Prix 2021) qui l'a félicitée mercredi 16 mars au théâtre d'Angoulême, au cours d'une cérémonie d'ouverture dédiée à l'Ukraine. 

"Quand je pense que ça a commencé dans les années 80 avec un fanzine, avec un titre pas très net, j’ai du mal à croire que je suis là, à recevoir le Grand Prix, le prix le plus prestigieux au monde de l’industrie la bande dessinée", s'est réjouie la lauréate.

Julie Doucet (Grand Prix d'Angoulême 2022) et Chris Ware  (Laurence Houot)

Fanzine

Née en 1965 à Montréal, Julie Doucet est une figure de la bande dessinée alternative et féministe. La dessinatrice fait ses débuts en bd avec son propre  fanzine Dirty Plotte, dans lequel elle raconte en noir et blanc, d'une ligne expressive, sa vie quotidienne de femme, son corps, sans tabou, mais aussi ses rêves. "Quand j'ai commencé mes fanzines, je n'ai jamais imaginé que je serais un jour publiée. Il n'y avait même pas d'éditeurs BD à l'époque au Quebec", explique l'autrice au lendemain de la remise de son prix lors d'une rencontre. "Je faisais mes fanzine que j'imprimais moi-même, et je les vendais 25 sous chez les disquaires ou dans les librairies. Et j'étais déjà contente que cinquante personnes les lisent !"

"Dirty Plotte", Julie Doucet (Julie Doucet)

L'autrice fait alors figure d'exception dans un milieu alors encore quasi exclusivement dominé par les hommes. Son journal intime en bd est publié en 1991 sous forme de comic-book par l'éditeur Drawn & Quarterly à Montréal. C'est le début pour elle de la reconnaissance de ses pairs, comme l'auteur culte Art Spiegelman (Maus) ou Robert Crumb.

Pionnière

En France, Jean-Christophe Menu, co-fondateur de la maison d'édition de BD alternative L’Association publie son travail dès 1990. Elle est ainsi présente dans le tout premier collectif de la structure, Logique de Guerre Comix. Suivent en 1995 Ciboire de Criss !, un recueil de fragments, puis quatre autres livres, dont Monkey and the Living Dead (L’Association, 1999).

Maxiplotte, L'Association, 2021 (Julie Doucet)

En novembre 2021, L'Association a publié Maxiplotte, une anthologie de son travail de 400 pages, qui rassemble des travaux réalisés entre 1987 et 1999.

"Un jour j'ai laissé tomber la BD parce que je me sentais à l'étroit dans les cases, et aussi dans ce milieu dominé par les hommes. A l'époque, il n'y avait vraiment pas beaucoup de femmes. Et j'en ai eu marre", confie l'autrice.  

Après avoir bourlingué entre New York, Seattle et Berlin, l'artiste s'est en effet tournée vers d'autres formes d'expression, comme les collages, la poésie, le roman-photo. "J'ai d'abord fait un retour à l'estampe, que j'avais étudié pendant mes études, donc un travail muet, mais les mots sont vite revenus. J'ai par exemple fait une autobiographie de 0 à 15 ans de 200 pages avec des mots découpés. Je crois que l'association des mots et des images c'est vraiment mon truc", conclut-elle.

Active en bande dessinée sur une période finalement assez courte, douze ans, Julie Doucet est pourtant considérée comme une figure tutélaire de la BD alternative, une "précurseure d'un nouveau féminisme en bande dessinée", selon Anne-Elizabeth Moore, qui a publié en 2018 une étude sur l'œuvre de Julie Doucet.

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