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Sony Pictures a-t-elle eu tort de ne pas diffuser "The Interview" ?

La filiale nippone a commis "une erreur", selon le président américain, Barack Obama, qui s'est exprimé sur le sujet vendredi.

Article rédigé par Kocila Makdeche
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Une affiche du film "The Interview" en train d'être retirée à Hollywood (Etats-Unis), le 18 décembre 2014. (VERONIQUE DUPONT / AFP)

"Il est très sage de votre part d'avoir annulé la diffusion de The Interview." C'est en ces mots que les pirates informatiques ont félicité Sony, vendredi 19 décembre par e-mail. La firme a en effet renoncé à sortir le film après la cyberattaque dont elle a été victime, selon CNN

Sony Pictures, la filiale du géant nippon, a été victime d'une attaque informatique massive et de nombreuses informations ont été dérobées à ce studio. Des menaces d'attentat ont aussi  été proférées contre les lieux qui diffuseraient le film, qui met en scène, de façon parodique, la mort de Kim Jong-un, le leader de la Corée du Nord. Sony Pictures a-t-il eu tort de céder ?

Oui, car c'est mauvais pour la liberté d'expression et le cinéma

Nombreux sont ceux à avoir protesté contre la décision de Sony. L'acteur George Clooney, connu pour ses combats en faveur des droits de l'homme, a exprimé son mécontentement dans une interview accordée à Deadline (en anglais), site spécialisé de l'industrie du cinéma. "Il faut qu'Amy Pascal [vice-présidente de Sony] le mette en ligne, affirme l'acteur. Qu'elle fasse tout son possible pour le sortir. Non pas parce qu'il faut que tout le monde le voie, mais parce qu'on ne va pas nous dire ce qu'on a le droit de regarder ou non."

George Clooney a voulu faire signer une pétition aux personnalités de l'industrie du cinéma pour soutenir Sony face aux tentatives de censure. Mais personne n'a voulu signer cette pétition. "Je ne veux pas pointer du doigt qui que ce soit. Je dis juste que nous en sommes là, face à une industrie qui a été complètement terrorisée. (...) Il faut comprendre ce qui est en train de se passer, le monde vient de changer sous vos yeux, et vous n'y avez pas prêté attention." "Triste jour pour la liberté d'expression", a de son côté posté, sur Twitter, l'acteur Steve Carell.

Après l'annulation de la diffusion de The Interview, certaines salles aux Etats-Unis avaient annoncé que le film de Seth Rogen avec James Franco serait remplacé par un autre, qui date de 2004 : Team America : World Police. La programmation a aussi été annulée, par le distributeur Paramount, comme l'indique le tweet d'un de ces cinémas. 

Oui, car ils cèdent à l'intimidation des hackers

De nombreux journaux américains ont accusé Sony d'avoir courber l'échine face aux menaces des pirates. "Kim Jong won" ("Kim Jong gagne"), a titré le New York Post avec un habile jeu de mots. 

Si le FBI a officiellement accusé la Corée du Nord d'être derrière ce piratage, vendredi, Pyongyang continue de nier. "Notre pays n'a aucun lien avec ce hacker", a démenti un diplomate nord-coréen aux Nations unies. Pourtant, la Corée du Nord s'est réjouie de l'annulation du film. 

Barack Obama a lui-même affirmé que Sony avait fait une "erreur" en annulant la sortie du film. "Un dictateur", ne peut imposer sa censure aux Etats-Unis, a-t-il ajouté. 

Non, car les hackers ont évoqué une menace terroriste 

Le géant nippon n'avait pas cédé, jusqu'à mercredi, lorsqu'un message de menace est apparu sur l'écran des employés : "Le monde sera empli de terreur. Souvenez-vous du 11 Septembre". Les pirates, qui se surnomment "les gardiens de la paix", ont menacé de s'en prendre aux Américains qui assisteront aux projections du film. Mais selon le département de la sécurité américaine, le spectre d'attentats perpétrés par des militants de Corée du Nord n'est "pas crédible".

Non, car Sony risque de voir ses informations confidentielles diffusées 

"Nous avons toujours vos données privées et sensibles", menacent encore les pirates dans un dernier courriel envoyé vendredi. De nombreuses informations ont été dérobées à ce studio, un poids lourd d'Hollywood. Les données personnelles des 47 000 employés ont été révélées, ainsi que le scénario du nouveau James Bond, qui doit sortir en salles fin 2015. Cinq films du studio ont aussi été diffusés sur internet illégalement. 

Oui, car les menacent iront toujours plus loin

Après avoir obtenu satisfaction, les hackers réclament désormais, dans un e-mail, la destruction du matériel promotionnel du film, selon CNN (en anglais). En plus de la destruction des affiches ou des bandes-annonces, les pirates refusent toute sortie d'extraits du film, même si elle échappe à Sony.

Problème : Sony ne pourra pas supprimer la réplication des fuites, s'il y en a. D'autant que l'annulation soudaine du film a créé une grande attente de la part des internautes. Dans la nuit de jeudi à vendredi, un extrait du film parodique a brièvement été diffusé sur YouTube. Et pas n'importe quel extrait : carrément la mort de Kim Jong-un.

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