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"Eternal Daughter" : Tilda Swinton dans un double rôle ressuscite des fantômes intérieurs

Sous le jour d’un film de spectres, Joanna Hogg poursuit son travail sur la mémoire entamé dans "The Souvenir" 1 et 2.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Tilda Swinton dans "Eternal Daughter" de Joanna Hogg (2023). (CONDOR DISTRIBUTION)

Une femme remonte le temps avec sa mère dans un hôtel désert de la campagne anglaise, dans Eternal Daughter qui sort mercredi 22 mars. Tilda Swinton dans un double-rôle mère-fille est toute désignée pour les interpréter de sa subtile présence. Un beau film de hantise, tout en intériorité, atmosphérique et gothique, produit par Martin Scorsese.

L’étoffe des souvenirs

Julie (Tilda Swinton), réalisatrice, et sa mère (Tilda Swinton), ont réservé pour quelques jours une chambre dans un hôtel perdu, une somptueuse demeure où la maman a vécu une partie de sa jeunesse. La cinéaste vient y puiser l’inspiration et sa mère des souvenirs. Julie est intriguée par l’absence d’autres clients, par l’attitude du personnel, des disparitions à répétition de son chien, alors qu’une étrange atmosphère règne dans l’hôtel désert. Amenée à l’explorer, elle va à la rencontre d’un indicible secret.

L’Hôtel et son parc font penser à Bly, la propriété du Tour d’écrou d’Henry James, magnifiquement adapté par Jack Clayton dans Les Innocents (1962). Comme le récent Men d’Alex Garland, métaphore des violences faites aux femmes sous la forme d’un film de fantôme, Eternal Daughter invite les spectres pour évoquer l’insaisissable étoffe dont sont tissés les souvenirs, et l’imaginaire qu’on y projette.

Film d’atmosphère


Cinéaste psychologue qui explore la nature humaine et notamment féminine, Joanna Hogg écrit un scénario tout en nuances. La délicate progression du récit recoupe les camaïeux boisés des intérieurs, mélangés aux toiles de Jouy, alors qu’une palette de verts nuancés habille la campagne anglaise. Comme dans tout film de fantôme, le récit doit mener à une révélation, un "twist", qui donne la clé de la hantise. On se souvient de celle des Autres d’Alejandro Amenábar, la conclusion de Eternal Daughter est également surprenante, même si on la voit venir.

Joanna Hogg ne réalise pas un exercice de style, mais un film très personnel. L’auteur-réalisatrice creuse le sillon d’une thématique qui jalonne sa filmographie. Elle explore ici le processus de création dans son rapport à la mémoire. Eternal Daughter n’est en cela pas très éloigné de Shining de Stanley Kubrick, l’instinct meurtrier de Jack Nicholson en moins. Film d’atmosphère propice à la psychologie, tout en jouant des codes de l’angoisse, Eternal Daughter envoûte du sol au plafond.

L'affiche de "Eternal Daughter" de Joanna Hogg (2023). (CONDOR DISTRIBUTION)

La fiche

Genre :  Drame fantastique
Réalisatrice : Joanna Hogg
Acteurs : Tilda Swinton, Joseph Mydell, Carly-Sophia Davies, Alfie Sankey-Green
Pays :  Grande-Bretagne / Etats-Unis
Durée : 1h36
Sortie : 22 mars 2023
Distributeur : Condor Distribution

Synopsis : Julie, accompagnée de sa mère âgée, vient prendre quelques jours de repos dans un hôtel perdu dans la campagne anglaise. La jeune femme, réalisatrice en plein doute, espère y retrouver l’inspiration ; sa mère y voit l’occasion de faire remonter de lointains souvenirs, entre les murs de cette bâtisse qu’elle a fréquentée dans sa jeunesse. Très vite, Julie est saisie par l’étrange atmosphère des lieux : les couloirs sont déserts, la standardiste a un comportement hostile, et son chien n’a de cesse de s’échapper. La nuit tombée, les circonstances poussent Julie à explorer le domaine. Elle est alors gagnée par l’impression tenace qu’un indicible secret hante ces murs.

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