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"Michael Cimino, un mirage américain", documentaire majeur sur un réalisateur visionnaire

Après son magnifique "We Blew It", sur la récupération des idéaux des années 60 aux Etats-Unis, le critique et historien du cinéma Jean-Baptiste Thoret se consacre au réalisateur de "Voyage au bout de l’enfer" et de "La Porte du paradis".

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
"Michael Cimino, un mirage américain" de Jean-Baptiste Thoret (2022). (LOST FILMS)

Suite à un ouvrage dédié à Michael Cimino, Michael Cimino, les voix perdues de l'Amérique (Flammarion), le critique et historien du cinéma Jean-Baptiste Thoret destine son deuxième documentaire à un réalisateur iconoclaste entre tous qui a laissé une trace indélébile sur le cinéma depuis la fin des années 1970. Michael Cimino, un mirage américain, qui sort mercredi 19 janvier, explore le talent et l’énigme d’un cinéaste inclassable, avec toujours chez le documentariste la complémentarité entre l’homme, le pays, son œuvre, et le contexte dans lequel elle s’inscrit.

Grandeur et déclin

En 1978, Voyage au bout de l’enfer (Oscars du scénario, du réalisateur et du film) cassait la baraque au box-office comme premier film (ou presque) sur la guerre du Vietnam. Les studios lui donnaient alors carte blanche pour son long métrage suivant. Cela sera La Porte du paradis (1980), film maudit dont le budget ruinera la major United Artists. Cimino ne s’en remettra jamais, malgré d’autres films comme L’Année du dragon (1985). Au cours d’un voyage à travers l’Amérique, Jean-Baptiste Thoret évoque avec le réalisateur, décédé en 2016, sa carrière mouvementée et son approche dérangeante d’une histoire américaine.

Comme We Blew It, Michael Cimino, un mirage américain est un road movie dans une Amérique contrastée. Ses paysages et villes sont ceux d’une cinématographie : le Colorado de John Ford et la ville sidérurgique de Clairon où fut tourné Voyage au bout de l’enfer. En 2010, Jean Baptiste Thoret avait fait ce voyage avec le réalisateur américain en recueillant ses confidences, entendues ici en voix off. Cinéaste majeur et controversé, Michael Cimino connut la carrière d’un cinéaste prodige tombé dans le déclin, tout en ne cessant de réaliser une œuvre cohérente et interrogative unique sur l’histoire et la société américaine.

Voyage au bout du paradis

Si le documentaire recouvre toute la filmographie de Cimino, il s’attarde particulièrement sur Voyage au bout de l’enfer et La Porte du paradis, emblématiques du réalisateur. Jean-Baptiste Thoret revient dans la ville sidérurgique de Clairton, cadre principal de Voyage, son réalisateur soulignant que le film n’avait pas comme sujet la guerre du Vietnam, mais des individus mis face à un conflit incompris, perdu, et qui allait changer leur vie et l’Amérique.

Jean-Baptiste Thoret confirme après ses multiples articles et ouvrages son acuité à décrypter un cinéma américain des années 70, au centre d’une révolution culturelle qui a été rattrapée et bâillonnée dans les années 80 avec des films plus consensuels. Foisonnant de témoignages (Quentin Taranino, John Savage, James Toback, des habitants de Clairton), sur fond d’images somptueuses du Colorado et d’une Amérique profonde, Michael Cimino, un mirage américain est le témoignage incontournable sur un cinéaste essentiel de la seconde moitié du XXe siècle, à la filmographie fulgurante.

L'affiche de "Michael Cimino, un mirage américain" de Jean-Baptiste Thoret (2022). (LOST FILMS)

La fiche

Genre : Documentaire
Réalisateur : Jean-Baptiste Thoret
Acteurs : John Savage, Quentin Tarantino, Tommy Fitzgerald, James Toback
Pays : France
Durée : 2h10
Sortie : 19 janvier 2022
Distributeur : Lost Films

Synopsis : En avril 2010, Jean-Baptiste Thoret prend la route avec Michael Cimino, de Los Angeles au Colorado. « Si vous voulez comprendre mes films, lui avait alors dit le réalisateur de Voyage au bout de l’enfer, vous devez voir les paysages où ils ont été tournés ». Ce road-movie oral et enregistré deviendra d’abord un profil publié dans les Cahiers du Cinéma puis un livre, Michael Cimino, les voix perdues de l’Amérique (Flammarion). Dix ans plus tard, Cimino n’est plus mais son fantôme continue de hanter certains replis de l’espace américain. Tourné au cours de l’hiver 2020, Michael Cimino, un mirage américain, repart sur les traces de Michael Cimino, à la recherche de son Ouest, cette Amérique réelle et fantasmée qui a traversé ses films, des espaces grandioses du Montana où il a tourné La Porte du paradis à la communauté de Mingo Junction, Ohio, cette petite ville sidérurgique qui a servi de décor à Voyage au bout de l’enfer.

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