Absence de femmes pour le Grand prix du festival de la BD d'Angoulême : "Quelle débâcle ridicule et embarrassante"
Après Riad Sattouf, Joann Sfar et plusieurs autres auteurs de bande dessinée rejoignent la contestation et demandent le retrait de leur nom de cette sélection 100% masculine.
Trente dessinateurs et pas une seule dessinatrice. La polémique sur l'absence de femmes dans la liste des nommés pour le Grand prix du festival de la bande dessinée d'Angoulême prend de l'ampleur, mercredi 6 janvier. Après Riad Sattouf, de nouveaux grands noms de la BD demandent à leur tour que leurs noms soient retirés de la fameuse sélection et relaient l'appel au boycott. La ministre de la Culture elle-même s'invite dans le débat.
Joann Sfar : "Un message désastreux"
La star de la BD française, Joann Sfar, annonce sur sa page Facebook qu'il soutient "à mille pour cent" l'appel lancé par une autre vedette de la bande dessinée hexagonale, Riad Sattouf, également en lice pour le Fauve d'or avec son Arabe du futur 2.
"Aucun auteur ne peut souhaiter figurer sur une liste entièrement masculine", assène l'auteur du Chat du rabbin. "Cela enverrait un message désastreux à une profession qui de toutes parts se féminise", estime-t-il. Lui aussi demande par conséquent que son nom soit "retiré de la liste des nommés".
Angoulème: Je ne peux pas répondre à tous les courriers reçus suite à l'initiative de Riad Sattouf. Bien entendu, je...
Posté par Joann Sfar sur mardi 5 janvier 2016
Etienne Davodeau : "L'un des pires clichés de la BD"
Le dessinateur et scénariste Etienne Davodeau, dont l'album Cher pays de notre enfance, une enquête entre journalisme et neuvième art, figure dans la sélection officielle de l'édition 2016 d'Angoulême, ne veut plus, lui non plus, voir son nom associé à cette liste. Il le dit dans une tribune sur sa page Facebook.
L'auteur multiprimé dénonce une sélection qui "contribue à alimenter l'un des pires de ces clichés" dont souffre la bande dessinée : "celui qui voudrait que la bande dessinée soit par essence un art non-féminin". Ce qui est totalement faux, juge-t-il : "Les femmes sont de plus en plus nombreuses à pratiquer - et à lire - la bande dessinée." Et il se réjouit de "cette évolution" qui "figure parmi les meilleures choses qui nous soient arrivées ces dernières années".
J'ai appris hier que mon nom figurait dans la liste des auteurs éligibles au grand prix du festival d'Angoulême. J'en...
Posté par Etienne Davodeau sur mercredi 6 janvier 2016
Daniel Clowes : "Un 'honneur' totalement vide de sens"
L'Américain Daniel Clowes, auteur des best-sellers Ghost World et Eightball, plusieurs fois récompensé des célèbres prix Eisner et Harvey, fait front lui aussi.
"Je soutiens le boycott d'Angoulême et je demande que mon nom ne soit pas pris en considération pour ce qui est désormais un 'honneur' totalement vide de sens. Quelle débâcle ridicule et embarrassante", lâche-t-il sur son compte Instagram, repris par son éditeur Fantagraphics Books.
Milo Manara : "Les femmes comme sujet et pas objet"
Le célébrissime dessinateur italien Milo Manara, connu pour ses histoires érotiques, souhaite également voir son nom retiré de la liste. "Compte tenu de l'importance que les femmes ont eu dans ma vie artistique (et dans ma vie tout court) et du fait que j'ai toujours essayé d'être respectueux de leur rôle de sujet et pas d'objet dans mon travail", explique l'artiste sur sa page Facebook.
Compte tenu de l'importance que les femmes ont eu dans ma vie artistique (et dans ma vie tout court) et du fait que j'ai...
Posté par Milo Manara sur mercredi 6 janvier 2016
Burns, Blain et Christin boycottent aussi
La liste des auteurs de bande dessinée annonçant qu'ils ne souhaitent plus figurer dans la sélection du Grand prix ne cesse de s'allonger au fil de la journée de mercredi.
L'illustrateur américain Charles Burns, auteur du très applaudi Black Hole et prix Harvey, refuse lui aussi d'associer son nom à une sélection 100% masculine, selon les éditions Cornélius. Tout comme le Français Christophe Blain, à qui l'on doit Quai d'Orsay ou Isaac le pirate, et son compatriote Pierre Christin, le scénariste de la série Valérian, cités par le blog BD du Monde.
Fleur Pellerin : "En tant que femme, ça me touche"
Après Pascale Boistard, la secrétaire d'Etat aux Droits des femmes, c'est au tour de la ministre de la Culture, Fleur Pellerin, de se dire "un peu perturbée". "En tant que femme, ça me touche. En tant que ministre de la Culture, ça me touche aussi", déclare-t-elle au micro de France Info.
"La culture doit être exemplaire en matière de parité et de respect de la diversité, le compte n'y est pas tout à fait", tance la ministre. Et elle renchérit : "C'est quand même un peu étonnant, même si probablement les femmes sont sous-représentées parmi les auteurs de bandes dessinées, qu'on n'ait pas trouvé, sur trente noms, un seul nom de femme à honorer."
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