De la broderie, de la photographie, des métiers d'art... sept expositions mode à découvrir dans l'Hexagone

Si la mode est à l'honneur en septembre avec l'enchaînement des Fashions Week féminines consacrées au printemps-été 2025, New York, Londres, Milan et Paris à partir du 23 septembre, c'est aussi, hors podiums, le lancement de nouvelles expositions où la création de mode est à l'honneur.
Article rédigé par Corinne Jeammet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 9 min
Calendrier japonais, Paris, Circa 1980. (Françoise Huguier / Courtesy Polka Galerie.)

La maison de broderie Lesage, la photographe Françoise Huguier, le savoir-faire des maîtres d'art ou le travail de l’artiste plasticien Jérémy Gobé ou celui de la créatrice de vêtements Aurore Thibout font l'objet d'expositions tant à Paris qu'en régions, dès ce mois de septembre. Suivez le guide.

"Lesage, 100 ans de mode et de décoration" à Paris

L’exposition Lesage, 100 ans de mode et de décoration célèbre les cent ans d'excellence et d'innovation de cette maison de broderie et de textile résidente du 19M. Elle met en avant de nouvelles formes artistiques nées du dialogue entre la broderie et d'autres médiums ainsi que des collaborations inédites avec des créateurs contemporains (mode, arts plastiques, décoration, design d’espace et d’objet...). Le parcours est ponctué de pièces d’artisanat d’art réalisées pour des maisons de haute couture. Un panorama détaillé des techniques, gestes et étapes de création plonge dans l'héritage de cette maison. Des installations immersives (capsules sonores, vidéo...) permettent de découvrir l’histoire de Lesage et les coulisses des ateliers, rendant hommage au travail de ses artisans.

Pour ces 100 ans, le directeur artistique Hubert Barrère et l’atelier de broderie ont collaboré avec l’artiste Aristide Barraud pour concevoir Murmuration. Composée de centaines d’étourneaux brodés par des milliers de mains sur plusieurs pans d’organza, ce dessin monumental interroge ce phénomène naturel de migration qui conduit les étourneaux d’un continent à l’autre. Tout au long de l’année 2024, différents pans de cette broderie ont voyagé et des ateliers gratuits d’initiation ont été proposés au public. Après Marseille, Paris, Dakar et Venise, Murmuration est de retour à la Galerie du 19M Paris/Aubervilliers.

Lesage, 100 ans de mode et de décoration du 26 septembre au 5 janvier 2025. La Galerie du 19M. 2, place Skanderbeg, 75019 Paris.

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"Couleur, mode d'emploi" de Françoise Huguier à Paris

Entre journalisme de terrain et mises en scène acid-pop des années 80, voici les photographies de mode de Françoise Huguier. Des Cibachromes [procédé de tirage photographique couleur] en tirage unique débordant de couleurs et des Polaroïds vaporeux incarnent ce que le journaliste et critique Gérard Lefort - qui fut, avec Christian Caujolle, l’un des premiers avec à envoyer la reporter sur le terrain de la haute couture et des défilés dans le quotidien Libération - appelle la Huguier’s touch : "ce cadrage basculé, tordu, coudé, qui est sa marque de fabrique". Une géométrie fascinante qu’elle a su faire sienne pour bouleverser et sublimer l’image de mode pour le compte des Vogue, Marie-Claire ou New York Times Magazine.

Devant l’objectif de Françoise Huguier, défilent vingt ans de prêt-à-porter et de couture captés par un œil qui profite d’une époque où les rédactions avaient une culture du reportage qui constitue le creuset de ses inspirations, de la Russie à l’Afrique de l’Ouest en passant par le Cambodge, l’Indonésie ou le Japon dont elle loue les cinéastes tels qu’Ozu, Kurosawa ou Mizoguchi. De ces maîtres du cadrage, elle a gardé une leçon : "le premier plan est fondamental, c’est lui qui donne la dimension et le mouvement." Un principe cher à celle qui a été élue, en janvier 2023, au sein de la section photographie de l’Académie des Beaux-arts.

Couleur, mode d'emploi de Françoise Huguier jusqu'au 26 octobre. Galerie Polka. Cour de Venise. 12, rue Saint Gilles. 75003 Paris.

Calendrier japonais, Fête foraine, Circa 1980. (Françoise Huguier / Courtesy Polka Galerie.)

"Le Crin dans tous ses éclats" à Jouy

L’exposition Le Crin dans tous ses éclats propose de découvrir l’histoire de cette fibre, le crin de cheval. Le parcours revient sur le rôle emblématique du cheval dans la région de Jouy-en-Josas où la noblesse et la bourgeoisie prenaient plaisir aux chasses à cheval. Celles-ci inspirent les iconographies de certaines toiles de Jouy. L’équitation est une distraction appréciée de Christophe-Philippe Oberkampf fondateur de la manufacture de Jouy.

Issu d’un animal qui a marqué la société depuis la Préhistoire, le crin de cheval est un matériau utilisé pour de nombreuses applications. Employé brut dans certains objets utilitaires traditionnels, il est également tissé depuis le 17e siècle en Europe, pour créer des étoffes singulières. Cette fibre, pourtant récurrente dès le 18e siècle, n’a été que très peu étudiée sous l’angle de l’histoire du textile en Occident. Ainsi, à travers une soixantaine de pièces, cette exposition invite à découvrir les usages de cette fibre remarquable aux propriétés physiques et esthétiques: résistante, solide, durable, imputrescible, rigide mais souple. Elle est plébiscitée en raison de sa brillance et sa douceur qui permettent de créer des tissus aux armures variées, jouant sur les reflets satinés et les effets de lumière. L’exposition présente les caractéristiques utilitaires, techniques, artistiques et esthétiques via des objets utilitaires traditionnels aux créations contemporaines. 

Le Crin dans tous ses éclats jusqu'au 12 janvier 2025. Musée de la Toile de Jouy. Château de l’Églantine. 54, rue Charles de Gaulle. 78350 Jouy-en-Josas.

"Sous le soleil des savoir-faire, les maîtres d'art à Versailles"

Organisée en partenariat avec l'Association des maîtres d'art, l'exposition Sous le soleil des savoir-faire, les maîtres d'art à Versailles valorise la démarche d'artisans d'exception. Décerné par le ministère de la Culture, le titre de maître d'art est attribué à vie, en reconnaissance de la maîtrise et de la transmission de savoir-faire rares. Il joue un rôle essentiel dans la pérennisation d'un patrimoine immatériel, pour l'excellence duquel la France est reconnue dans le monde entier depuis Louis XIV.

100 créations réalisées par 33 maîtres d’art relevant de matières et de techniques variées : parure florale, laque, vitrail, plumasserie réalisées parfois en collaboration avec des artistes de renom tels qu’Annette Messager et Jean-Michel Othoniel. Ces œuvres sont exposées au cœur de l'espace Richaud. Des textes et cartels détaillés expliquent ces gestes et savoir-faire parfois centenaires mais pouvant également faire appel à des technologies de pointe.

Sous le soleil des savoir-faire, les Maîtres d'art à Versailles jusqu'au 22 septembre. Espace Richaud. 78, boulevard de la Reine. 78000 Versailles. Entrée libre. 

"Reticulum Maris - Dentelle des mers" à Caudry 

L’artiste plasticien Jérémy Gobé présente son projet Corail Artefact. Animé par l’idée que l’art n’est pas déconnecté de la réalité, Jérémy Gobé redonne vie aux objets et aux métiers qu’il métamorphose afin de les sortir du quotidien. En 2010, il trouve à Emmaüs des squelettes de coraux qui deviendront une source d’inspiration pour sa série Corail Restauration. Lorsqu’il constate que le motif Point d’esprit de la dentelle est similaire à la structure du squelette du corail, le projet Corail Artefact prend vie. Ce programme de Recherche, Développement et Innovation cherche à proposer une solution à la dégradation des récifs coralliens et mêle art, science, industrie et éducation afin de sensibiliser le public.

C'est ainsi que Jérémy Gobé se tourne vers la dentelle Leavers réalisée à Caudry pour poursuivre ses expérimentations. En partenariat avec l’entreprise caudrésienne Solstiss, il souhaite réaliser une dentelle inédite à partir de polymères produits par des êtres vivants. Déclinée sous un angle scientifique mais aussi artistique, l’exposition présente plusieurs ouvres du plasticien. Des échantillons de dentelle, des créations haute couture en dentelle et broderie (Yiquin Yin, On Aura Tout Vu...) et des oeuvres d’artistes et créateurs (Aurélie Lanoiselée, Simone Pheulpin, Tzuri Gueta...) évoquant les fonds marins complètent les collections du musée.

Reticulum Maris - Dentelle des mers du 20 septembre au 24 août 2025. Musée des Dentelles et Broderies. Place des Mantilles. 59540 Caudry. 

"Aurore Thibout, Dentelle et Katazome en mouvement" à Calais 

Faiseurs de mode, nouveau rendez-vous de la Cité de la dentelle et de la mode, ouvre une fenêtre sur les savoir-faire des métiers de la mode avec pour cette première édition, Aurore Thibout. Créatrice de vêtements et artiste textile, elle réalise des collections en série limitée et conçoit des costumes pour les arts vivants. En dialogue avec les artisans du monde, particulièrement d’Asie, elle travaille sur l’évolution des gestes de techniques séculaires et élabore une mode engagée à l'univers poétique. En 2015, lauréate de la Villa Kujoyama à Kyoto, au Japon, elle y développe un travail de recherche sur le katazome, technique japonaise traditionnelle de teinture au pochoir et à la réserve de colle de riz. Questionnant les possibilités de créer en harmonie avec l’environnement et de faire perdurer des traditions artisanales ancestrales, elle noue des liens avec des tisserands, teinturiers, imprimeurs et artistes japonais. 

Ici, Aurore Thibout présente des vêtements de soie traditionnelle chirimen, de bois tissé et de papier. Ils sont le fruit de ses échanges avec les tisserands de la région de Tango, au Japon, tels que Tamiya Raden et son tissage de bois veiné, ou l’artisan teinturier Akasaka Taketoshi, spécialiste de la technique au pochoir dite "katazome". Dans une symbiose à quatre mains, Aurore Thibout et Akasaka Taketoshi déposent les couleurs à la brosse avec des gestes spontanés mais chorégraphiés pour une maîtrise de la technique du flou et du contrôle du hasard.

Aurore Thibout, Dentelle et Katazome en mouvement du 21 septembre au 15 décembre 2024. Cité de la dentelle et de la mode. 135, quai du Commerce. 62100 Calais. 

Portrait de la créatrice Aurore Thibout (SEBASTIEN CORDOLEANI)

"Au fil du lin et du chanvre" par Joanna Staniszkis, à Villeneuve Lez Avignon

L'Abbaye Saint-André propose une exposition de l'artiste textile Joanna Staniszkis, une créatrice dont les oeuvres, imprégnées de l'histoire et des traditions textiles européennes, transcendent le temps. Cette artiste polymorphe se distingue par son exploration audacieuse des fibres naturelles et des teintures mêlant traditions anciennes et expressions contemporaines. Son oeuvre est un dialogue entre les lieux qu'elle habite et les histoires qu'ils murmurent. En Provence, elle a été fascinée par l’usage ancestral du chanvre et du lin, deux fibres robustes et imprégnées d'histoire. Utilisant des teintures naturelles, elle s'immerge dans les propriétés singulières des fibres anciennes. Ses techniques incluent la sérigraphie, l'impression et des méthodes de tissage traditionnelles qu'elle réinterprète pour révéler des textures et des couleurs inédites.

L'exposition présente une collection de travaux récents mettant en lumière l'évolution de son travail avec le lin et le chanvre. Ici, des pièces teintées naturellement, des impressions réalisées à la sérigraphie et des créations où les fibres anciennes rencontrent des designs modernes.

Au fil du lin et du chanvre par Joanna Staniszkis, jusqu'au 31 octobre. Abbaye Saint-André. 58, rue Montée du Fort. 30400 Villeneuve Lez Avignon. 

Dans l'atelier de l'artiste Joanna Staniszkis (DR)

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