Le festival Amapola transforme la forêt de Rambouillet en fête écologique et féministe
Pour la deuxième année, le bois de Gazeran dans la forêt des Yvelines a accueilli le millier de festivaliers d’Amapola ce dernier week-end de juillet. 48 heures rythmées par des musiques électroniques émergentes mais également ponctuées d’actions, d’ateliers et de théâtre en faveur du féminisme et de la transition écologique.
La nuit est tombée sur le bois de Gazeran, dans les Yvelines. Vendredi 29 juillet, un enchantement chatoyant vient de s’en emparer. Des flashs de lumières s’en échappent, des basses la secouent… Arrivée à l’orée de cette micro-forêt, un panneau changé en nuage ouvre la voie vers une nature festive et colorisée. "Bienvenue à Amapola" ("coquelicot" en espagnol). Ces dernières nuits, deux scènes aux ornements fleuris ont poussé. De l’une à l’autre, quelque 900 visages de vingtenaires et trentenaires pailletés déambulent, ensorcelés par les rythmiques électroniques. Pour sa deuxième édition, la "tribu des coquelicots" envoûte les terres yvelinoises pour 48 heures de festival pluri-artistique.
"Je suis d’une génération désenchantée" : sur la scénographie solaire de la "Capsule Radieuse" et sur un remix surboosté de Mylène Farmer, les neuf hyperactives de Toutes & Chaos offrent aux festivaliers leur premier moment de communion. Grande fête ou festival à taille humaine ? Quelques minutes après la fermeture définitive des portes à minuit, la fratrie d'organisateurs n’a toujours pas tranché. Après plusieurs années de mini-festivals "avec et pour des amis", Sylvia (28 ans) et Yvan de la Baume (26 ans) sont passés à l’échelle supérieure. "On a simplement voulu créer un évènement qui nous ressemble et qui met en avant la musique qu'on aime. Mais aussi nos valeurs : l'écologie et le féminisme", résume le petit frère.
Brigade des mangoustes et anneaux contraceptifs
Tout au long de la belle nuit d’été, les engagements commencent à germer aux quatre coins du bois. Pendant que les artistes émergents se succèdent avec une parité parfaite, des gilets violets vadrouillent discrètement. Leur surnom apparaît dans une pancarte de la même couleur : "la brigade des mangoustes". Le principe ? Des bénévoles identifiables et formés pour surveiller et agir face aux violences sexuelles et sexistes (VSS). "Tu ne peux pas garantir un espace safe à 100 % en festival, mais on peut créer quelque chose de dissuasif et qui permet de parler de ces VSS", explique Sidonie Gouvard, en partie à l’origine de cette brigade. Pourquoi les mangoustes ? Elle rit. "Parce qu’elles s’attaquent aux serpents".
Les heures passent, les pistes de danses se vident, le camping se remplit, la partie de Twister champêtre se clôture. Quand midi sonne, les plus fêtards se traînent jusqu’aux food trucks végétariens. Quant aux plus reposés, ils se laissent guider jusqu’à la dizaine d’ateliers d’associations écolos et/ou féministes dans le bois. Une fresque du sexisme, une fresque de la forêt, une sensibilisation aux VSS… Pour une après-midi, une partie des festivaliers se métamorphose en élèves studieux. Le cours de fabrication d’anneau contraceptif masculin par Otoko attire tout particulièrement. "On était un peu venus pour la vanne, sourit Benjamin derrière ses lunettes de soleil. Mais finalement, ce n’est pas désagréable et ça parait plus sain que toutes ces pilules hormonales."
"Un festival de sensibilisation plus que de militants"
Au même moment, la lisière du bois se change en théâtre à ciel ouvert. Des bottes de paille en guise de strapontins, la compagnie Notre Insouciance ouvre le bal pendant une petite heure. Monologues, chants, danses… Leur adaptation de La Rose la plus rouge s’épanouit de Liv Strömquist déconstruit l’amour avec humour. Et même la (grande) partie du public qui ne connaissait pas la dessinatrice féministe est conquise. La metteuse en scène, Juliette Hecquet, se félicite : "Toucher des gens qui ne se pensaient pas spectateurs.trices de théâtre, c’est ce qui m’intéresse." La preuve : sans l’avoir prévu, Manon a pu revivre la bande dessinée d’une auteure qu’elle suit depuis bien longtemps.
Toutefois, la trentenaire fait un bilan en demi-teinte d’Amapola. "J’étais attirée par ces engagements que je mène au quotidien et c’est agréable de voir cette génération plus jeune rassemblée sur ces thématiques." Mais le public parfois très "école de commerce" et l'omniprésence de musiques "club", même pendant les ateliers, lui a fait ressentir "un décalage".
Du côté de l'équipe organisatrice, l’objectif de cette deuxième édition est plus que rempli. "Amapola reste un festival de sensibilisation plus que de militants, rappelle Sylvia de la Baume. On placera toujours cette musique qu'on aime en premier, car c’est comme ça qu’on touche le public, qu’il soit ou non sensibilisé à ces questions." Pour son prochain festival et ses prochains évènements ponctuels, le collectif du coquelicot n'a qu'une parole : une parenthèse festive et conviviale, où des graines de réflexions sont plantées.
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