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"On fait désormais partie du spectacle mort" : le DJ Laurent Garnier lance un SOS pour le monde de la nuit

L'auteur de l'hymne techno "Crispy Bacon" dénonce dans une lettre ouverte à la ministre de la Culture la non prise en compte, voire "le mépris", par le gouvernement du monde de la nuit, très sévèrement touché par la pandémie. Une autre tribune défend dans "Libération" le rattachement du dancefloor au ministère de la Culture plutôt qu'à celui de l'Intérieur.

Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le producteur et DJ Laurent Garnier, au festival We Love Green à Paris (France) le 1er juin 2019. (DAVID WOLFF - PATRICK / REDFERNS / GETTY)

Dans une lettre ouverte publiée sur son site lundi 26 octobre et adressée à madame la ministre de la culture Roselyne Bachelot, le producteur et DJ français Laurent Garnier lance un S.O.S. pour "le monde de la nuit". Avec un faux humour léger et une bonne dose d’ironie, le Chevalier de la Légion d'honneur dénonce la non prise en compte par le gouvernement du secteur du clubbing et des DJ, très sévèrement touché par la pandémie.

Il explique d’abord ne pas s’être senti concerné par le discours de la ministre du 22 octobre, qui a annoncé à cette occasion des aides pour le cinéma, le théâtre et le spectacle vivant. Et pour cause, comme le lui a répondu un ami désabusé au téléphone : "Non Laurent, nous on fait dorénavant partie du secteur du spectacle mort… Roselyne l’a annoncé maintes fois, le monde de la nuit ne dépend pas d’elle mais du ministère de l’Intérieur !"

Un secteur à l'arrêt depuis mars 2020

"J’aimerais attirer votre attention, écrit Laurent Garnier, sur le fait que, depuis début mars, le secteur "de la nuit et des clubs" (dont je fais intrinsèquement partie) est (...) totalement à l’arrêt. Pour nous, la fête est terminée et ce depuis maintenant de longs mois."  Le secteur de la nuit est effectivement resté désespérément portes closes depuis le début de la crise sanitaire alors que les salles de cinéma, les théâtres et certaines salles de concerts ont pu rouvrir malgré un protocole sanitaire compliqué, fait-il remarquer.

Or, les clubs, rappelle le DJ techno célèbre dans le monde entier, emploient "la même pléiade de personnels divers et variés que dans le reste du paysage culturel. Que ce soit au bar, en salle, à la caisse, au vestiaire, au ménage, mais aussi les régisseurs, la sécurité, les intermittents, personnels techniques, sondiers, lighteux, les VJ, les promoteurs, bookeurs, labels, graphistes, imprimeurs… Sans oublier l’impact économique indirect (fournisseurs, restauration, hôtellerie, transport, etc.). La liste est longue, mais surtout très similaire à celle du spectacle vivant."

"Le manque flagrant de considération, l’ignorance émanant de votre ministère envers le secteur de la nuit et des clubs est clairement interprété par beaucoup d’entre nous comme une forme de mépris incompréhensible", souligne Laurent Garnier dans sa missive. "Car que vous le vouliez ou non, les clubs et les lieux de cette culture nocturne étaient (quand ils étaient ouverts) des endroits bouillonnant de création, d’imagination et de partage."

Une autre tribune défend la nuit et la scène techno

Vincent Carry, directeur d'Arty Farty à l'origine du festival Nuits Sonores à Lyon, a publié de son côté lundi une tribune dans Libération appelant lui aussi à la reconnaissance de la nuit et de la scène techno. Sous le titre "La nuit est un espace de culture, de création et d’effervescence démocratique", il défend un secteur "creuset d’une extraordinaire effervescence culturelle" et dénonce fermement le rattachement des "acteurs de l’espace artistique de la nuit" au ministère de l’Intérieur et aux préfets. "Depuis longtemps, les acteurs du secteur nocturne ont accepté avec fatalisme, parfois avec résignation, que leur travail soit considéré à travers le seul prisme de la sécurité, de l’hygiène, de la santé publique. Il s’agit là d’une erreur historique et d’une immense injustice", estime-t-il.

"La planète techno n’est pas seulement une boule à facettes étincelante, béate et insouciante. Elle s’est conscientisée au fil des années", souligne Vincent Carry. Aujourd'hui, "c’est en partie au cœur de la nuit, sur le dancefloor et dans ses à-côtés, dans les bars, les espaces de partage et de convivialité, que la jeunesse forge sa citoyenneté". "Il est temps de revendiquer enfin l’espace de la nuit comme appartenant de plein droit à celui de la culture, comme cela est le cas depuis des décennies à Berlin, Amsterdam ou New York", plaide-t-il.

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