Réforme des retraites à l'Opéra de Paris : "La clause du grand-père n'est pas une solution pérenne", juge un danseur
Alexandre Carniato, danseur à l'Opéra Garnier, salue sur franceinfo une avancée alors que le gouvernement a proposé aux danseurs de l'Opéra de Paris que le nouveau régime de retraites entre en vigueur seulement pour les danseurs recrutés à partir de 2022.
Alors que le gouvernement a proposé aux danseurs de l’Opéra de Paris que le nouveau régime de retraites entre en vigueur seulement pour les danseurs recrutés à partir de 2022, Alexandre Carniato, danseur à l'Opéra Garnier salue une avancée mais estime sur franceinfo que cette clause du grand-père "n'est pas une solution pérenne" pour l'Opéra de Paris.
Alexandre Carniato, vous avez 41 ans. Vous gagnez 2 500 euros nets par mois. Et vous devriez toucher une retraite de 1 067 euros mensuels dans un an puisque votre génération est concernée par la clause du grand-père. Est-ce une satisfaction pour vous ?
La fameuse clause du grand père a été proposée pour le ballet. Le ballet est très content. C'est une avancée, mais cette solution n'est pas pérenne pour l'Opéra de Paris. C'est toute la complexité. Les danseurs ne se battent pas seulement pour eux. Les danseurs se préoccupent de l'avenir des jeunes danseurs de l'Opéra de Paris. Qu'est-ce que l'on va dire à la nouvelle génération ? Cela fait 350 ans que ce système de retraites existe. Et désormais que va faire la nouvelle génération ? Elle va venir faire une pige, peut-être une ou deux années, et elle partira sous de nouveaux cieux, là où elle sera largement mieux rémunérée. On sait que c'est grâce à ce système de retraites que les meilleurs danseurs restent à l'Opéra de Paris. On craint de perdre l'excellence qu'a l'Opéra de Paris aujourd'hui au profit d'un nouveau système qui ne fera que nuire à notre patrimoine.
À la fin de la carrière à l'Opéra de Paris, est-ce difficile pour un danseur de se reconvertir ?
C'est très compliqué. On arrive très jeune à l'Opéra de Paris et beaucoup de danseurs n'ont pas le baccalauréat. Pourquoi ? Parce que quand on rentre à 16 ans à l'Opéra, on travaille de 9h30 à 23 heures. Il y a le temps des répétitions, le temps de musculation, le temps de gainage. Les journées sont bien remplies afin de préserver notre corps et afin qu'il dure le plus longtemps possible.
Que faudrait-il mettre en place pour vous aider à vous reconvertir ?
La proposition a été faite de former les danseurs à partir de 42 ans afin qu'ils trouvent un travail avec un salaire équivalent à celui qu'ils touchaient à l'Opéra. Sur le papier c'est vendeur. Mais il faut aussi penser à la réalité du marché. Si l'on est formé pendant deux ou trois ans à partir de 42 ans, on va se retrouver sur le marché du travail à 45 ans. Mais à diplôme équivalent, l'employeur va-t-il choisir quelqu'un de 22 ans ou quelqu'un de 45 ans ? Je pense qu'ils vont plutôt miser sur quelqu'un qui a 22 ans.
De manière plus globale, est-ce difficile de se projeter dans l'avenir quand on est un artiste comme vous ?
C'est très difficile parce qu'il y a un élément vraiment variable qui est : comment mon corps va-t-il pouvoir continuer ? On parle d'une limite d'âge à 42 ans mais certains doivent quitter l'Opéra plus tôt. On est tous différents et certains peuvent avoir des blessures graves. J'ai des collègues qui ont dû partir plus tôt. Ils se sont retrouvés sans pension et à la rue. Quand on parle de l'Opéra de Paris, on pense aux dorures, mais la réalité est différente. Alors on ne se plaint pas par rapport à toutes ces blessures. On a signé pour ça aussi. Mais si l'on veut faire perdurer ce patrimoine qu'est l'Opéra, il faut préserver le système actuel des pensions.
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