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Les rois du dancefloor Disclosure de retour avec "ENERGY", un 3e album qui justifie son nom

Pour son troisième album, le tandem britannique a invité au micro une majorité de rappeurs, mais aussi des chanteuses comme Fatoumata Diawara ou Kelis. Résultat : un disque aux climats variés et à l'énergie communicative.

Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Les deux frères Guy et Howard Lawrence sont Disclosure. (HOLLIE FERNANDO)

Quand on est les rois du dance-floor, sortir un album alors que les clubs du monde entier sont fermés depuis des mois pour cause de pandémie et que les concerts et les festivals continuent d’annuler à tour de bras, ressemble à un contretemps. Les frères Guy et Howard Lawrence, 26 et 29 ans, n’ont visiblement pas conscience d’inciter à braver la prohibition en nous offrant avec leur troisième album un shot d’énergie qui donne des fourmis dans les jambes et fait monter des désirs irrépressibles de bras en l’air et de sueur collective.

Sept ans après Settle, album dance de 2013 lesté d'une collection de hits ravageurs, et cinq ans après Caracal, un disque qui avait un peu déçu malgré ses louables efforts de renouvellement et sa pléthore d’invités de luxe (Lorde, Gregory Porter, The Weeknd etc), Disclosure semble enfin se lâcher à nouveau sans arrière-pensées avec ENERGY.

Des chansons vite écrites, dans une ambiance fun

Dans une émission radio en trois épisodes sur Apple Music (Big Tree Energy Radio) dévoilée ces jours-ci, le tandem britannique raconte avoir travaillé trois ans sur ce nouvel album pour lequel ont été esquissés pas moins de 200 morceaux, "ce qui est beaucoup plus que d’habitude", selon eux. Le tri a donc été ardu pour parvenir à condenser ces compositions dans un album de 11 titres, dont deux interludes, qui ne dure que 40 minutes au total.

Afin d’éviter la surcharge, le parti pris a été radical : Guy et Howard n’ont gardé que les chansons qu’ils avaient écrites le plus vite, celles dont l'énergie était particulièrement bonne dans la pièce au moment même de leur création, fruits "d'une journée vraiment fun" en compagnie de leurs invités. "Il n’y a pas eu 50 versions et 10 masters" : l’idée était de réaliser un disque "facile, agréable" enregistré à Londres et Los Angeles avec, au micro, des hôtes du monde entier dont ils sont fans, confient-ils.

C’est plutôt réussi. ENERGY est un album varié dans ses climats qui ne met pas toute son énergie sur le dancefloor et offre de belles respirations rêveuses et sensuelles sans jamais perdre le fil du groove.

Comme le montre leur émission sur Apple music, dans laquelle ils jouent des classiques de Busta Rhymes, Q-Tip, Gang Starr, The Pharcyde et Souls of Mischief, les deux jeunes producteurs et musiciens renouent également sur ce troisième album avec les influences de leur prime jeunesse, celle du hip-hop des années 90 et du sorcier du son J Dilla en particulier, qu’ils adulent. "Nous avons toujours voulu travailler avec des rappeurs, mais nous n'en connaissions aucun et nous n'avions aucun moyen de les contacter", avouent-ils. Leur notoriété leur permet aujourd'hui de les inviter en studio.

Hip-hop et drum'n'bass irriguent leur house

L’album s’ouvre sur Watch Your Step, un titre house efficace mais sans surprise agrémenté de la voix de la chanteuse américaine Kelis, qui chante "I like to dance like I’m alone in the room" (J’aime danser comme si j’étais seule dans la pièce) - confinée et masquée ? Lavender fait monter la température d’un cran et tamise les lumières avec les paroles sensuelles que nous murmure à l’oreille le rappeur californien Channel Tres.

Le trépidant My High, sur lequel les rappeurs Aminé et Slowthai se donnent la réplique, accélère le rythme entre hip-hop et drum’n’bass. Répétant "You was there standing all night, Your heartbeat matching with the light" ("Tu étais là debout toute la nuit, ton pouls au diapason de la lumière"), ils font de ce titre un hymne goguenard aux états seconds comme on peut le voir dans le clip.

Who Knew, avec le rappeur de Chicago Mick Jenkins, ralentit nettement le tempo avec une intro cotonneuse qui bascule doucement vers les rythmes syncopés du UK Garage. Vient ensuite le single (et déjà tube) Douha (Mali Mali), un morceau de house filtrée sautillant et entêtant sur lequel ont été mises en boucles quelques phrases en bambara de la chanteuse malienne Fatoumata Diawara. Le chanteur et musicien camerounais Blick Bassy prend le relais pour Ce n’est pas, une chanson qu’il arrive à rendre mélodieuse et apaisante en dépit des battements de la boîte à rythme old school TR 808.

"Energy" rallume la mèche de "When a Fire Starts To Burn"

Le morceau-titre Energy donne sa direction à l’album. Avec ses rythmes inspirés de la samba, il s’agit du tambour battant du disque, celui qui ramène résolument sur le dancefloor grâce aux injonctions irrésistibles du pasteur américain Eric Thomas, celui-là même qui allumait la mèche de When a Fire Starts To Burn, l’un des hits incendiaires de leur premier album en 2013. "Right now you should feel invicible, powerful, strong. Look : where your focus goes, your energy flows. Are you hearing me ?", scande-t-il, nous faisant regretter de ne pas avoir toutes les cartes en mains pour nous sentir effectivement "invincible puissant.e et fort.e", là tout de suite sous la boule à facettes.

Les voix suaves des chanteuses américaines Syd (du groupe The Internet) et Kehlani calment le jeu sur le R&B délicat Birthday, qui mène en douceur au dernier titre, Rêverie, sur lequel le rappeur Common, un des héros d’enfance des frangins Howard, prend toute sa place de philosophe inspirant sur une mélodie synthétique qui se détache du reste du disque, comme pour un fondu de fin sur grand écran.

Si les nombreux invités, chanteuses et chanteurs permettent depuis les premiers jours d’incarner la musique des deux frères Lawrence, Disclosure a surtout servi de tremplin à de nombreux artistes, comme Sam Smith ou Aluna George sur leur premier album Settle. Et ils continuent de révéler de nouvelles têtes cette fois, en particulier le rappeur californien émergent Channel Tres, adepte de beats house sensuels, dont on suivra désormais l’ascension. Ils attirent également l’attention sur des rappeurs méconnus de ce côté-ci de l’Atlantique comme Aminé et Mick Jenkins et sur le chanteur camerounais Blick Blassy dont ils pourraient élargir l’audience. Partageurs, les deux Disclosure font visiblement circuler l’ENERGY qu’ils ont à revendre.

ENERGY (Island Records/Caroline/Universal) sort le 28 août 2020
Disclosure annonce deux dates en France en mode clubbing (DJ set) début 2021 : à Lyon (Le Sucre) le 16 janvier et à Paris (Le Badaboum) le 13 février.

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