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Mort du général Jean-Louis Georgelin : hommage unanime à "un chef inconstestable" sur le chantier de la "renaissance" de Notre-Dame

À la tête de l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame, il avait qualifié sa nouvelle charge de "mission de combat" à accomplir pour 2024.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 8min
Jean-Louis Georgelin, en charge du chantier de la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, s'exprimant devant l'assemblage à blanc de la nouvelle flèche de la cathédrale Notre-Dame de Paris à Briey (Meurthe-et-Moselle), dans l'est de la France,  le 20 juillet 2023. (JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP)

Les hommages, qui se multiplient depuis le décès du général Jean-Louis Georgelin vendredi 18 août après une chute lors d'une randonnée en Ariège, attestent du rôle primordial qu'il jouait dans la reconstruction de la Cathédrale Notre-Dame de Paris partiellement détruite par l'incendie du 15 avril 2019.

L'ancien chef d'Etat major avait été nommé représentant spécial du président de la République Emmanuel Macron et président de l'établissement public chargé de la conservation et de la restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris qui a tenu son premier conseil d'administration en décembre 2019. Ce rôle capital, le président Macron l'a résumé dans un message posté sur X (ex-Twitter) : Notre-Dame perd "le maître d'œuvre de sa renaissance", a réagi le chef de l'Etat, après l'annonce de la mort du général cinq étoiles.

"Une autorité et une efficacité incomparables"

"A la tête de l'établissement public, il a avec ténacité, conviction, amour de la cathédrale et de l’Eglise, conduit ses équipes pour que Notre-Dame ouvre fin 2024", a noté pour sa part Olivier Ribadeau-Dumas, recteur-archiprêtre de la cathédrale Notre-Dame de Paris, toujours sur X samedi 19 août.

"Il a mené le chantier de reconstruction de Notre-Dame de Paris avec une autorité et une efficacité incomparables, a déclaré, quant à elle, l'ancienne ministre de la Culture Roselyne Bachelot. Cette abnégation a été également saluée par Rima Abdul Malak qui lui a succédé au ministère de la Culture. "Depuis quatre ans, il était dévoué à son ultime 'mission de combat' ", a-t-elle écrit sur X.

Jean-Louis Georgelin avait lui-même qualifié la tâche qui lui avait été confiée de "mission de combat". Chef d'état-major des armées françaises (Cema) de 2006 à 2010, il avait notamment supervisé les opérations en Côte d'Ivoire, Afghanistan, dans les Balkans ou au Liban. En bon militaire, le général se définissait comme chef d'opérations à la tête d'une "task force" pour Notre-Dame et clamait son obéissance totale à l'Etat. "Je ferme ma gueule, ce n'est pas moi qui vais décider la flèche qui sera retenue, ce qui ne m'empêche pas de jouer à ma place le rôle que je crois devoir être le mien. A ma place, mais ce n'est pas la place publique", disait-il.

Meneur d'hommes

À la tête de l'établissement public, "il avait su créer les conditions humaines et d'organisation pour mener à bien la reconstruction de Notre-Dame", a indiqué la maire de Paris Anne Hidalgo sur X. De même, sur les antennes de Franceinfo, Bertrand de Feydeau, vice-président de la Fondation du patrimoine a décrit un homme "qui s'était imposé comme un chef incontestable sur ce chantier difficile et lourd à porter". "Les équipes sont profondément affectées par cette disparition très brutale de celui qui porte sur ses épaules (cette restauration)", a-t-il ajouté.

C'est également au chef d'orchestre qu'a rendu hommage le Centre des monuments nationaux (CMN) et sa présidente Marie Lavandier. Dans une publication sur le réseau social X, le CMN a salué la mémoire du général, "figure majeure de la renaissance d'un des monuments les plus emblématiques de la France", et exprimé "son soutien aux équipes en deuil qui achèveront et réussiront cette œuvre". 

"Il a su, par son énergie, sa rigueur et sa détermination, insuffler une dynamique de succès au projet de restauration", a pour sa part jugé dans un communiqué la Compagnie des architectes en chef des monuments historiques. L'animateur Stéphane Bern, engagé dans la préservation du patrimoine, a rendu lui hommage sur X "à l'artisan chevronné de la restauration" de Notre-Dame.

Une mission sur mesure

Dans la foulée de l'incendie qui a ravagé le monument mondialement connu, le général Georgelin avait été choisi pour faire avancer avec détermination le chantier extrêmement complexe de sa reconstruction. En fixant un objectif de cinq ans pour la restauration, Emmanuel Macron avait besoin d'un homme qui tranche dans les nombreux arbitrages entre des métiers et intérêts très divers.

Originaire d'Aspet (Haute-Garonne), Jean-Louis Georgelin qui aurait eu 75 ans le 30 août, était cultivé, peu mondain, sobre, et sa foi catholique était aussi ancrée que discrète. Le choix d'un catholique pratiquant par le Président avait été une décision assez politique et habile, appréciée par la droite, le diocèse de Paris et les fidèles. "La France et l'Église perdent aujourd'hui l'un de leurs plus dévoués serviteurs", a déploré dans un communiqué l'archevêque de Paris, Laurent Ulrich, en indiquant que la messe de l'église Saint-Germain-l'Auxerrois, dimanche 20 août à Paris, serait célébrée à la mémoire du général Georgelin.

Carré d'épaules, abord rugueux, grand rire, voix puissante, l'homme était très attaché au patrimoine religieux cultivait le lien direct avec les compagnons du chantier, tel un officier avec ses soldats. Mais il pouvait rudoyer ses collaborateurs. Cela avait été le cas avec l'architecte en chef des monuments historiques, Philippe Villeneuve, qu'il avait prié en novembre 2019 de "fermer sa gueule" après s'être déclaré favorable à la reconstruction de la flèche à l'identique. Le général avait nié toute querelle, parlant de "respect et d'estime réciproques".

Tenir les délais, l'hommage ultime

En 2019, il promettait à Mgr Patrick Chauvet, alors recteur de Notre-Dame, un Te Deum (chant catholique de louange et d'action de grâces) le 16 avril 2024 "pour célébrer le travail qui aura été fait". Trois ans plus tard, interrogé par Franceinfo sur cette date butoir de 2024, il précisait :"Nous avons une planification extrêmement rigoureuse qui (y) conduit". "Évidemment, ajoutait-il, il peut y avoir des aléas, des difficultés. Nous en avons eu beaucoup. On en a déjà eu beaucoup durant la première phase : le Covid, des intempéries assez fortes, car dès que les vents soufflent à plus de 48 kilomètres heure, on ne peut pas utiliser les grues, il y a eu aussi l'adaptation au plomb, etc. On risque donc d'avoir encore des aléas, il faut essayer de les anticiper". 

"À la fin de l'année, nous verrons la flèche dans le ciel de Paris", s'enthousiasmait-il encore, moins d'un mois avant sa mort, le 21 juillet, lors de la répétition générale du montage du premier étage de la flèche de la cathédrale à Briey (Meurthe-et-Moselle). "Le plus grand hommage qu'on pourra lui rendre c'est que le chantier puisse s'achever à l'heure", a insisté Bertrand de Feydeau, vice-président de la Fondation du patrimoine. "Le général Georgelin ne verra jamais de ses yeux la réouverture de Notre-Dame aux Français, dont il aura été l’incomparable artisan. Mais le 8 décembre 2024, il sera présent avec nous, à sa réouverture, d’une autre manière (...)", conclut le communiqué de l'Elysée qui lui rend hommage.

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