La série "Laëtitia", adaptée de l'enquête d'Ivan Jablonka sur le meurtre de Laëtitia Perrais, démarre sur France 2
A la suite d'Ivan Jablonka, qui s'était penché sur le viol et le meurtre de Laëtitia Perrais à Pornic il y a huit ans, le réalisateur Jean Xavier de Lestrade a réalisé une mini-série sobre et pudique, mais aussi féministe, sur "la violence ordinaire".
C'est au départ une enquête de l'écrivain et historien Ivan Jablonka sur le meurtre glaçant de la jeune Laëtitia Perrais à Pornic en 2011, qui avait ému la France entière. L'ouvrage d'Ivan Jablonka, Prix Médicis en 2016, abordait ce fait divers comme un objet d'histoire, sociale et sensible. La mini-série évènement Laëtitia, diffusée à partir de lundi soir sur France 2 (elle est également visible sur la plateforme France.TV), en est une adaptation du réalisateur Jean-Xavier de Lestrade (Un coupable idéal, 3 X Manon).
"J'ai voulu parler de la vie de Laëtitia. Pas du cadavre découpé en morceaux, mais de cette jeune femme qui a eu des peines, des joies, des petits copains; qui a traversé des épreuves mais qui a eu sa part de bonheur", expliquait Ivan Jablonka à l'AFP il y a tout juste un an au festival de la fiction de La Rochelle. Il ajoutait être "certain que Jean-Xavier respecterait l'esprit de mon livre et derrière, des êtres humains: un papa, une maman, une soeur, des oncles, des tantes".
Mise à nu d'un "monde de violence ordinaire"
Dans cette mini-série pudique en six épisodes sélectionnée au prestigieux festival américain de Sundance, Jean-Xavier de Lestrade filme la vie de Laëtitia Perrais (jouée par Marie Colomb), placée très jeune avec sa soeur jumelle Jessica (Sophie Breyer) en foyer puis en famille d'accueil, et l'enquête qui a suivi son assassinat par un trentenaire à l'enfance cabossée, Tony Meilhon, près de Pornic en 2011.
La série est aussi l’occasion de revenir sur la condition parfois catastrophique des enfants placés mais aussi sur les questions de la maltraitance infantile et les violences faites aux femmes.
Le réalisateur et documentariste avait déjà travaillé sur l'intime et sur la violence. Quand une productrice lui a proposé le projet, il a d'abord pensé "Le livre a une telle force qu'on ne fera jamais aussi bien". "Mais il fallait donner à cette histoire l'opportunité d'être vue et ressentie par un public plus large que celui des lecteurs du livre", explique Jean-Xavier de Lestrade. "Si on s'arrête à sa mort atroce, ça n'a aucun intérêt. Mais si on creuse (...) il y a un monde derrière, mis à nu, un monde de violence ordinaire, un monde qui affleure très peu. Au milieu il y a deux jeunes filles qui essaient de panser leurs plaies".
Emotion palpable sur le tournage
A l'été 2011, Jessica révéla les viols et attouchements répétés imposés par le père de sa famille d'accueil. Ce dernier, qui s'était arrogé à plusieurs reprises devant les médias le rôle de pourfendeur des délinquants sexuels, sera condamné à huit ans d'emprisonnement pour viols ou agressions sexuelles sur cinq jeunes victimes. Pour Laëtitia, Ivan Jablonka récuse le terme de "fait divers", et préfère parler de "l'itinéraire d'une jeune femme qui se termine de manière tragique, des rencontres bonnes ou mauvaises, un certain état de la société".
Pendant les trois mois de tournage, "il n'y a pas une seule journée où un membre de l'équipe n'a pas pleuré", raconte Jean-Xavier Lestrade. "Certains m'ont raconté des choses qui leur étaient arrivées, des histoires de violence".
Dans les deux oeuvres, la scène de meurtre n'est pas montrée. "C'est inutile", explique le réalisateur. "Mais il y a des scènes violentes quand le père suspend son bébé au balcon, ou quand il viole la mère. Si on veut vraiment respecter Laëtitia, il faut raconter, montrer ces choses-là". "A aucun moment le livre ne se permet de juger qui que ce soit, à commencer par le criminel arrêté, Tony Meilhon. Il a commis un acte terrible mais si on puise dans son enfance, ce sont les mêmes souffrances, les mêmes traumas".
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