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"Squid Game", la série coréenne dystopique et sanglante, fait un carton mondial sur Netflix et inquiète les parents

Tout le monde parle de la série "Squid Game" : de quoi s'agit-il et pourquoi alarme-t-elle les parents ? Franceinfo Culture fait le point.

Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
Les joueurs en vert et les gardes en rouge et masqués dans la série dystopique sud-coréenne "Squid Game" de Netflix. (NETFLIX / YOUNGKYU PARK)

La série sud-coréenne Squid Game (Le jeu du calamar), qui mêle ultra-violence et dénonciation des inégalités économiques, rencontre actuellement un énorme succès sur Netflix au plan international. Elle est en passe de devenir la série la plus populaire de l'histoire du géant du streaming.

Une dystopie ultra violente et sans pitié

Diffusée depuis le 17 septembre sur Netflix, la série en neuf épisodes met en scène des centaines de personnages endettés ou marginalisés participant à un concours de jeux d'enfants traditionnels (style jeu de la marelle ou "1, 2, 3, soleil") dans l'espoir de remporter 45,6 milliards de won (33 millions d'euros). Les perdants sont éliminés sans pitié : ils sont tués. Et il n'y a qu'un seul gagnant possible à la fin.

Le héros Gi-hun, joué par l'excellent Jung Jae-Lee, est un personnage de looser attachant. Chômeur, divorcé et père d'une petite fille, il vit encore chez sa mère et tente de se refaire en dilapidant le peu qu'il a en jouant aux courses.


Sollicité par un VRP enjôleur qui l'aborde à Séoul et sait déjà tout de lui, il va vite se décider à participer à un jeu prometteur qui peut rapporter gros. Il se réveille dans un immense dortoir avec 455 autres candidates et candidats, tous vêtus du même costume vert numéroté. Sous la garde de personnages impersonnels, masqués et vêtus de rouge (on pense à La Casa de papel), le jeu de massacre peut commencer.

Dans la série, les candidats vont devoir à chaque épisode relever un défi cruel inspiré de passe-temps enfantins. La juxtaposition de ces jeux d'enfants et leur conséquence fatale immédiate et sanglante, mais aussi un rythme d'enfer façon thriller, des décors splendides, une esthétique pop colorée et d'excellents acteurs, a fait mouche et conquis en un temps record un très large public à travers le monde. 

Une allégorie des dérives de la société capitaliste

Accusé d'emprunter un peu trop au genre "survival" tels les films Hunger Games, Battle Royale et surtout au long-métrage japonais As The Gods Will (2014), le Coréen Hwang Dong Hyuk, 50 ans, dont c'est la première série, assure avoir commencé à écrire le scénario bien avant, en 2008, au départ pour un projet de film. "J'admets m'être beacoup inspiré des manga et animés japonais", déclarait-il à Variety (en anglais) le mois dernier

"Quand j'ai commencé j'étais moi-même en mauvaise posture financière et je passais beaucoup de temps dans les cafés à lire les BD Battle Royale et Liar Game. Jusqu'à me demander ce que ça me ferait de participer à de tels jeux. Mais je les ai trouvés trop complexes et me suis concentré plutôt sur les jeux d'enfants pour mon propre travail". 
 

"Je voulais écrire une allégorie ou une fable sur la société capitaliste moderne, quelque chose qui montre une compétition extrême, un peu comme la compétition acharnée de la vie. Mais je voulais utiliser le genre de personnage que nous rencontrons tous dans la vraie vie", précise-t-il.

Les raisons de ce nouveau succès coréen

Le phénomène Squid Game est la dernière manifestation de l'influence croissante de la Corée du Sud sur la scène culturelle mondiale, après la sensation de K-pop BTS et le film phénomène Parasite, Palme d'or à Cannes et premier film en langue autre que l'anglais à remporter l'Oscar du meilleur film. Netflix a bien flairé la tendance : la plateforme a prévu d'investir cette année 500 millions de dollars en contenus coréens.

Malgré un cadre purement coréen, les thèmes abordés et la remise en cause des dérives du capitalisme de Squid Game trouvent un écho mondial et sont la clé de son succès planétaire. "La tendance croissante à privilégier le profit sur le bien-être de l'individu" est un "phénomène que nous observons dans toutes les sociétés capitalistes à travers le monde", explique à l'AFP Sharon Yoon, professeure d'études coréennes à l'Université des Notre-Dame aux Etats-Unis.

De fait, dans la série, les participants sont rapidement amenés à renouveler leur assentiment à participer à ce macabre jeu de survie. Or, ils préfèrent risquer la mort plutôt que de retourner à leur misère d'avant.

"La Corée du Sud est devenue assez rapidement une société très inégalitaire, au cours de ces deux dernières décennies", explique de son côté à l'AFP Vladimir Tikhonov, professeur d'études coréennes à l'Université d'Oslo. La mobilité sociale est devenue "bien moins possible" aujourd'hui en comparaison de l'avant-crise financière asiatique de 1997, ajoute-t-il, "et le traumatisme de l'aggravation des inégalités... se répercute sur les écrans".

Pourquoi la série inquiète les parents

Cependant, cette dénonciation de la brutalité sociale se fait au prix d'une violence sans frein à l'écran où l'hémoglobine coule à flots. La série remporte un tel succès qu'elle a déjà des conséquences indésirables et inquiète parents et enseignants.

A Paris, le week-end des 2 et 3 octobre, l'ouverture d'un pop-up store dédié à la série a provoqué une file d'attente interminable sous la pluie, et une bagarre entre adolescents. Les tenues rouges complètes des gardiens et les survêtements verts des participants de Squid Game sont déjà proposés sur le  site de Netflix, et ils promettent de faire un malheur pour Halloween. Quant aux ventes de baskets blanches des malheureux joueurs de la série, elles ont  augmenté de 7.800% depuis trois semaines, selon Variety.

Plus problématique : ce qui n'était jusqu'ici que des jeux d'enfants innocents, se sont transformés dans certaines cours d'école en jeux violents inspirés de Squid Game. La Belgique, où la série est pourtant déconseillée comme en France aux moins de 16 ans, a été la première à sonner l'alarme la semaine passée.

Le jeu "1,2,3, Soleil" s'est en effet répandu dans certaines cours d'école dans une version violente, les perdants étant battus ou fouettés au visage. Ce qui a conduit les écoles communales belges d’Erquelinnes à lancer mardi 5 octobre un avertissement à l’attention des parents, leur demandant de redoubler de vigilance face aux dangers que représente ce type de jeux. Un post Facebook (ci-dessous) partagé plus de 39.000 fois à ce jour.

Le phénomène de reproduction des gestes de la série a également été signalé outre-Manche, où des directeurs d'écoles primaires ont écrit aux parents d'élèves en leur enjoignant de ne pas laisser leurs enfants regarder ce programme "dangereux", rapporte The Independent.

La France n'a pas échappé au phénomène, et il commence à être pris très au sérieux. Interrogée par 20 Minutes, l'Education nationale indique qu'"un message d’alerte va être envoyé aux directeurs académiques des services de l’Education nationale concernant l’éventualité de cas de Squid Game".

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