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Alice Renavand, étoile à l'Opéra, raccroche les pointes mais songe à créer une compagnie pour les danseurs plus âgés

Alors qu'elle quitte l'Opéra pour limite d'âge, l'étoile Alice Renavand pense à créer un collectif pour danseurs de plus de 40 ans, avec un répertoire spécifique.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3 min
Alice Renavand, danseuse étoile, à Paris le 11 juillet 2022 (JOEL SAGET / AFP)

A 42 ans, Alice Renavand va raccrocher ses pointes, comme l'exige la tradition à l'Opéra de Paris. Mais pour les danseurs qui ont justement dépassé cet âge fatidique, l'étoile veut créer une compagnie avec un répertoire adapté.

La danseuse va faire ses adieux au Palais-Garnier mercredi 13 juillet en dansant pour la première fois le ballet romantique Giselle, des débuts rares à la fin d'une carrière. "Giselle, c'était un rêve, un fantasme, et il fallait en même temps être à la hauteur", affirme la danseuse dans un entretien à l'AFP, quelques jours après sa prise de rôle le 28 juin. Une date qui a coïncidé avec le 181e anniversaire de la création du ballet à l'Opéra de Paris en 1841.

Petit rat de l'Opéra à 8 ans

Fille d'un couple franco-vietnamien, Alice Renavand a été petit rat de l'Opéra dès huit ans. Elle a été nommée étoile "sur le tard", à 33 ans en 2013, après un parcours plus contemporain que classique au sein du ballet de l'Opéra.

Ces quatre dernières années, elle a dansé peu en raison d'une grossesse, d'une blessure, des grèves et de la pandémie. "Du coup, pour ma dernière saison, je suis allée jusqu'au bout en enchaînant trois prises de rôle", rit-elle. Elle fera même son premier Lac des Cygnes au Théâtre Mogador à la rentrée, dans la version pour enfants montée par un ex-danseur étoile, Karl Paquette.

"La boucle est bouclée" pour cette danseuse qui n'a pas eu des débuts faciles : à peine engagée dans le corps de ballet à 17 ans, sous le coup de la pression et de la concurrence, elle prend 20 kg. Elle les perdra et reprendra confiance grâce à une rencontre avec la grande chorégraphe allemande Pina Bausch, qui la repère quand elle vient créer sa version du Sacre du printemps à l'Opéra.

Fonder un collectif pour les anciens de l'Opéra

"Je ne regrette rien. Les débuts n'ont pas été forcément glorieux mais ça m'a permis d'aller chercher d'autres inspirations", dit la danseuse au visage sculpté et aux cheveux de jais. Parmi ces inspirations, le NDT III, une branche du Netherlands Dance Theater qui avait été créée par le chorégraphe Jiri Kylian en 1991 pour des danseurs âgés de plus de 40 ans. Elle nourrit depuis longtemps le rêve de fonder un collectif pour les anciens danseurs de l'Opéra.

"Les danseurs sont capables de s'exprimer, sans avoir forcément une forme physique extraordinaire, et c'est ce qui me touche", dit la danseuse qui a contacté des danseurs et des chorégraphes pour ce projet. L'idée est de créer "un répertoire spécifique, en tenant compte de la fatigue physique, de la maturité artistique et de trouver des correspondances entre d'anciennes personnalités de la danse et des chorégraphes, plasticiens, musiciens...", décrit-elle.

"On reste danseur"

Elle estime que la retraite à 42 ans est essentielle pour permettre un "renouvellement générationnel" au sein d'une compagnie de 154 danseurs.
Le régime spécial dont bénéficient les danseurs de l'Opéra de Paris, et qui remonte à Louis XIV, a été défendu bec et ongles en 2019 par la compagnie, qui a mené une grève historique d'un mois et demi lorsque le gouvernement d'alors avait avancé sa proposition de réforme des retraites.

Au-delà du débat, la question de la renconversion des danseurs se pose de plus en plus au sein du ballet. La directrice de la danse, Aurélie Dupont, démissionnaire depuis juin, avait indiqué dans un entretien à l'AFP avoir mis en place un système de "bilan de compétences" pour aider les danseurs à s'orienter vers une autre carrière.

"De plus en plus, les danseurs y pensent tôt. Moi, j'ai plein d'amis qui ont fait complètement autre chose : un qui est devenu architecte, une autre fait de la tapisserie", affirme Alice Renavand. "On se refait la vie, mais on reste danseur, avec la sensibilité qui est la nôtre."

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