"Briser l’histoire des violences raciales" : JoeyStarr remonte sur les planches pour s'emparer des grands écrits de la littérature antiraciste

Quatre ans après "Elephant man", JoeyStarr revient au théâtre, à Lille, avec le même metteur en scène. Une épopée littéraire et poétique, des débuts du colonialisme et de l'esclavage à nos jours.
Article rédigé par Thierry Fiorile
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Joey Starr et le chansigneur Jules Turlet dans "Black Label". (ARNAUD BERTEREAU)

"Nous les gueux, nous les peu, nous les riens, nous les chiens, nous les maigres, nous les nègres !" Ce sont ces mots du poète Léon-Gontran Damas que JoeyStarr égrène au théâtre, jusqu'au samedi 17 février à Lille. L'acteur et rappeur revient sur les planches pour le spectacle Black Label, une épopée poétique noire avec le même metteur en scène qu'il y a quatre ans pour Elephant Man, David Bobée.

De sa voix qui déchire autant le rap que les textes choisis, JoeyStarr sert une vingtaine d'auteurs et autrices, du XIIIe siècle à aujourd'hui, des écrits afro-descendants jusqu’aux Black Live Matters d’aujourd’hui. Les plus connus ont pour noms Aimé Césaire, James Baldwin, Macolm X mais on note aussi des découvertes comme Léon-Gontran Damas ou Tracy K. Smith. Un exercice dans lequel il se sent parfaitement à sa place. "Là, on est sur quelque chose que je n’avais pas complètement réussi à faire passer avec le rap", estime-t-il.

"Mes deux parents sont martiniquais. Toute cette histoire, toute cette culture, j’ai une vraie cassure là-dessus donc ça me porte à mort."

JoeyStarr

à franceinfo

"Je pense que je fais partie du tissu social de ce qu’on a livré ce soir", confie JoeyStarr. À ses côtés sur scène, la musicienne et chanteuse jazz Sélène Saint-Aimé, le chanteur et danseur Nicolas Moumbounou et l'artiste sourd Jules Turlet, un "chansigneur" qui traduit tout le spectacle en langue des signes. "Célébrer ces poètes et ces poétesses aujourd’hui, c’est déjà l’affirmation et la célébration d’une histoire de la littérature, de la politique, de la résistance pour à la fois résister et à la fois essayer de briser cette histoire des violences raciales", estime David Bobée.

"Oui la négritude est un luxe tellement ça a coûté cher. Profession ? Dandy dissident", chante encore JoeyStarr. Les époques, les continents changent, mais c'est la même histoire, celle d'une couleur de peau qui déchaîne la haine, cette négritude, richesse littéraire méconnue. En finissant par la litanie des victimes de violences policières, Black Label soulève un public qu'on devine convaincu par avance, un geste militant dont on peut penser qu'il ne changera pas la face du monde, mais que le duo assume.

"JoeyStarr sur scène, ça fait venir du monde qui ne va pas habituellement au théâtre."

Le metteur en scène David Bobée

à franceinfo

"On leur raconte une histoire, leur histoire et on se donne des forces aussi entre nous. C’est important d’avoir des outils intellectuels, des outils critiques, des outils politiques pour savoir résister à cette violence subie", souligne David Bobée.

Les enfants de JoeyStarr étaient présents dans la salle à l'une des représentations données au théâtre du Nord à Lille. "Je trouve ça intéressant de leur faire un rappel un peu 'upgradé' d’où ils viennent, du pourquoi de tout ça. C’est très important. Peut-être qu’on les inscrira correctement dans le futur avec ce genre d’actions", espère-t-il. Après Lille, Black Label se produira à Rennes, le 6 avril, puis le 2 juin aux Nuits de Fourvière à Lyon.

Thierry Fiorile a assisté à une représentation de "Black Label" à Lille - Reportage

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.